Comme le rappelle le Secrétaire général de l'ONU, l'esclavage ne se cantonne pas aux livres d'histoire. Il est encore pratique courante dans nombre de pays du Sud, en particulier en Mauritanie ou au Niger . Dans ce dernier pays, Le Monde du 29 octobre dernier se fait l'écho de la situation de Hadijatou Mani, femme nigérienne, vendue 500 dollars à un maître qui l'exploitait « pour les travaux domestiques et agricoles, mais également comme wahiya, une esclave sexuelle » . Si, dans le cas en question, le tribunal saisi a condamné les autorités pour ne pas avoir protégé la personne en question, il ne fait nul doute que le phénomène est loin d'être isolé.
Mais l'esclavage contemporain ne se borne pas aux pays les moins avancés. Même dans le monde européen ou nord-américain – les pays de l'OCDE au fort « PIB/habitant » – cette pratique, réprouvée par les opinions publiques, n'est pas absente. Kevin Bales parle ainsi de « milliers » d'esclaves domestiques, cachés dans les méandres des grandes villes occidentales . L'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) décrit un trafic international et lucratif, d'un chiffre d'affaires annuel de 27 milliards d'euros, concernant quelque 137 pays de destination et 127 pays d'origine – sur les 192 États membres de l'ONU.
L'esclavage persiste – ou réapparaît – partout. Pourtant, partout, il est interdit. Aucun État n'est resté à l'abri des mouvements abolitionnistes. La Cour internationale de Justice de l'Organisation des Nations Unies, à laquelle fait partie la totalité des États reconnus par leurs pairs, a même considéré que l'interdiction de l'esclavage est une norme impérative du droit international général, à laquelle nul instrument juridique ne peut déroger . Nul État ne défend ouvertement la thèse de la légalité de l'esclavage.
Dès lors, comment expliquer la prolifération de l'esclavage, malgré son interdiction unanime par la société internationale ? Rassembler des éléments de réponse à cette question permettra, par la suite, d'imaginer une solution à cette insupportable trahison de la dignité humaine, à la base même de l'édifice des droits de l'homme.
[...] Titre 3 : Les nouvelles réponses politiques à l'esclavage Cette partie met en avant les possibilités d'actions concrètes de lutte contre l'esclavage, notamment en mettant l'accent sur la prévention plutôt que sur la répression. Elle s'appuie en particulier sur cette citation de Rober Botte : La loi abolit tel ou tel statut juridique et non telles ou telles conditions d'existence qui rendent possibles, sur tous les continents, l'apparition de formes historiques inédites d'exploitation du travail Le même constat est tiré par Suzanne Miers : (Une des) causes principales de la montée [des] formes contemporaines d'esclavage est la grande disparité de richesses entre pays riches et pays pauvres que la mondialisation n'était pas parvenue à résoudre en ce début de XXIe siècle, exacerbée par les petites guerres et les agitations qui ravagent les pays pauvres. [...]
[...] Ainsi, l'esclavage prit, peu à peu, une dimension raciale. La donne changea naturellement lorsqu'on considéra que les hommes étaient les mêmes, que les races n'existaient pas, et que toute personne avait droit à la dignité et à la liberté quelle que soit sa religion. Le siècle de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen fut donc celui d'un basculement lent et progressif, qui ne se traduisit vraiment en droit qu'au cours du XIXe siècle. Alors, la première mesure envisagée fut, bien sûr, la prohibition de l'esclavage. [...]
[...] Daddah, Mauritanie, les héritiers de l'esclavage in Le Monde diplomatique, novembre 1998 C. Delacampagne, Une Histoire de l'Esclavage, Livre de poche M. Dottridge, Types of Forced Labour and Slavery-like Abuse Occuring in Africa Today : A Preliminary Classification in Cahiers d'Etudes africaines, Esclavage moderne ou modernité de l'esclavage XLV 179- pp.689-712 Sylvie O'Dy, Esclaves en France, Albin Michel I. Ghijs, Esclaves domestiques : Humilié(e)s, violé(e)s, chaché(e)s, L. Pire éditions, Bruxelles S. Jeaneau et A. Kwak, Les tabous de l'esclavage, reportage diffusé sur Arte le 24 juin minutes M. [...]
[...] Annuaire de la Commission de droit international vol.II, p.270, cité in Patrick Daillier, Alain Pellet, Droit international public, L.G.D.J., 7ème édition n°127, p.205 C'est, en effet, à la Cour internationale de justice que l'article 66 de la Convention de Vienne renvoie l'application et l'interprétation de son article 53. Recueil des arrêts de la C.I.J p.32, cité in Patrick Daillier, Alain Pellet, Droit international public, L.G.D.J., 7ème édition n°127, p.205 K. Bales, Disposable people : New Slavery in the Global Economy Pulitzer Price. [...]
[...] Chiffre rapporté par le Rapport de la Documentation française sur l'esclavage contemporain et ses réseaux, rapporté par Michèle Monrinque, p.45 (II.7). Id. Chiffre rapporté par Georgina Vaz Cabral, La traite des êtres humains, Réalités de l'esclavage contemporain, éditions La Découverte Chiffre rapporté par Georgina Vaz Cabral, La traite des êtres humains, Réalités de l'esclavage contemporain, éditions La Découverte http://www.usatoday.com/news/world/2001-05-25-labor-chart-usat.htm Cf. rapport, op. cit. Cité par Roger Botte, Les habits neufs de l'esclavage : Métamorphoses de l'oppression au travail, in Cahiers d'études africaines, n°179-180, Esclavage moderne ou modernité de l'esclavage article consultable en ligne : http://etudesafricaines.revues.org/index5573.html Paul Lafargue, Le droit à la paresse cité par Maurice Lengellé, L'esclavage moderne, PUF p.41. [...]
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