Référé-liberté, Conseil d'Etat, crise sanitaire, pouvoirs publics, loi d'exception, assignation à résidence, confinement, état d'urgence sanitaire, droit commun, liberté fondamentale, Constitution, juge des référés-libertés, circonstances exceptionnelles, administration, pandémie, mesures de police, voie de recours exceptionnelle, Louis Fournoux, proportionnalité, COVID-19, coronavirus
« Le Conseil d'État ne s'attendait pas à être tant sollicité : entre le 10 mars et la fin du mois de juin, la section du contentieux a enregistré 382 requêtes en lien avec le Covid-19, dont 230 en référé, c'est-à-dire à juger en urgence. C'est 60 % de plus qu'en période normale. Et ces chiffres n'ont cessé d'augmenter ». Par ces propos, issus d'un discours du 17 septembre 2020, Bruno Lasserre, Vice-président du Conseil d'État, tend à mettre en avant le recours croissant aux procédures d'urgences durant la pandémie de COVID-19. En effet, si comme le disait René Chapus, « le signe extérieur d'une bonne justice, c'est l'excellence de ses procédures d'urgences », alors au vu des conclusions de Monsieur Bruno Lasser, il apparait que le juge de l'urgence, c'est-à-dire le juge des référés, soit le témoin d'une « bonne justice », à en croire l'inflation de son action. Étant juge de l'urgence, le juge des référés, et plus particulièrement du référé liberté, doit se prononcer en moins de 48 heures sur une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Ce dispositif d'urgence fait suite à l'adoption de la loi du 30 juin 2000, réformant les procédures d'urgence au sein de la juridiction administrative. C'est donc pour son vingtième anniversaire que le juge des référés a dû amplifier son contrôle de l'action de l'administration pour faire face à la pandémie de COVID-19.
[...] Dès lors, l'administration ne peut que prendre des mesures nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi (CE Benjamin). Ce contrôle de la proportionnalité de l'action de l'administration en période de pandémie, s'est réalisé de manière croissante, grâce aux recours aux référés-libertés, ce qui tend à interroger la nécessité d'autres voies de recours et son qualificatif de « voie d'exceptionnelle ». Ainsi, en quoi le recours croissant aux procédures d'urgence comme tend à le mettre en avant Monsieur Bruno Lasser, a-t-il conduit à faire du référé-liberté la voie de recours pour protéger les atteintes aux libertés fondamentales durant la pandémie ? [...]
[...] C'est ainsi que dans un premier temps, le Premier Ministre Edouard Philippe décrète le 16 mars 2020 avec une faible base textuelle, une assignation générale de la population française à résidence. Mais ce qu'il est intéressant de remarquer est les visas sur lesquels se fonde le décret du Premier Ministre : « Vu les circonstances exceptionnelles découlant de l'épidémie de COVID-19 ; Vu l'urgence ». En effet, par cette expression, le Premier Ministre fait référence explicitement à la jurisprudence des circonstances exceptionnelles, qui prévoit que les règles de droit habituelles puissent être assouplies, voire écartées lorsque l'urgence et/ou la situation hors du commun le justifie (CE Hériès). [...]
[...] Il a assorti son ordonnance d'une injonction visant à la réouverture de ladite plateforme. En résumé, ceci tend à souligner que le référé-liberté s'est imposé comme le moyen permettant de contrôler la régularité et la proportionnalité de l'action de l'administration dans la mesure où cette voie de recours permet rapidement d'ordonner à l'administration de prendre des mesures pour la protection des libertés fondamentales. Le juge des référés, un « substitut » aux pouvoirs publics dans la protection des administrés Certes, le référé-liberté est apparu comme un moyen de contrôler l'action de l'administration lorsqu'elle édictait de nouveaux actes administratifs, mais il n'en demeure que le référé-liberté a aussi été le moyen de protéger les administrés lorsque l'administration refusait de prendre des mesures. [...]
[...] Cette décision illustre donc que le référé-liberté n'est plus simplement un recours par lequel le justiciable peut protéger ses libertés fondamentales, mais un recours par lequel le juge des référés-libertés peut se substituer aux pouvoirs publics pour protéger ces dites libertés. En somme, la crise sanitaire débutée au mois de mars dernier, a conduit à faire du référé-liberté, la voie de recours juridictionnelle efficace pour protéger les libertés fondamentales des administrés dans la mesure où le juge de l'urgence peut prendre toutes mesures visant à la sauvegarde de ladite liberté. Néanmoins, force est de constater que l'inflation du recours aux référés-libertés durant la pandémie de COVID-19 a indéniablement conduit à redessiner le périmètre du référé-liberté. [...]
[...] ⟨10.3917/civit.045.0149⟩ [HYPERLINK: https://dx.doi.org/10.3917/civit.045.0149]. ⟨hal-03194432⟩ [HYPERLINK: https://hal.univ-lorraine.fr/hal-03194432] Références législatives : LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de COVID-19. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000041746313/ Livres : Gilles DUMONT, Jean SIRINELLI, Droit administratif, 14[ème] édition, HyperCours, Dalloz. Jean Waline, Droit administratif, 28[ème] édition, Dalloz. [...]
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