Cette liberté a été consacrée en France pour la première fois par la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 qui dispose que « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » Dans cette conception liberté d'expression et liberté de communication sont imbriquées l'une dans l'autre, la liberté d'expression étant une composante de la liberté de communication.
Dans sa mission d'assistance juridique, l'avocat voit sa liberté d'expression renforcée par le respect dû aux droits de la défense. La liberté de parole de l'avocat si elle est un démembrement de sa liberté d'expression, se voit accorder une protection particulière du fait qu'elle est indiscutablement liée aux exigences d'un procès équitable. Cette liberté semble aussi ancienne que la profession elle-même. Ainsi sous l'ancien régime dès 1707 l'ordonnance de Lorraine permettait à l'avocat de « parler librement quelle que fût la qualité de son adversaire ». La magistrature française a été une des garantes de cette liberté , sanctionnant notamment les comportements visant à intimider l'avocat ou à nuire à sa réputation. L'avocat n'a pour autant jamais eu le droit de tout dire à l'audience. Sa liberté a toujours été encadrée, dans le respect d'autres valeurs, de manière fluctuante selon les époques. Ainsi sous Napoléon la volonté politique de museler les avocats ressortait clairement d'un serment qui les contraignait à jurer allégeance et fidélité à l'empereur, à ne rien dire ni publier de contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs, à la paix de l'état ou à la sécurité publique.
Malgré tout, cette liberté s'est pérennisée jusqu'à nos jours. Protégée à la fois par le biais de la liberté d'expression et des droits de la défense, la liberté de parole de l'avocat parait solidement enracinée dans notre droit. À ces grands principes se rajoute l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui crée une immunité pour les écrits et les propos tenus par l'avocat à l'audience.
[...] Bertrand DE LAMIS défend dans son ouvrage La liberté d'expression et le droit l'idée selon laquelle l'immunité accordée à l'avocat n'aurait pas vocation à le protéger de poursuites sur le fondement d'un tel article. À l'appui de cette théorie, il se fonde sur l'alinéa deux de cet article qui prévoit des sanctions renforcées lorsque l'outrage a lieu à l'audience d'une cour, d'un tribunal, ou d'une formation juridictionnelle Selon lui cette incrimination n'aurait plus de raison d'être si elle tombait sous le coup de l'immunité accordée aux avocats. [...]
[...] Ce sont les principaux délits d'opinion visant à restreindre la liberté d'expression, à sanctionner ses excès. Il existe plusieurs textes sanctionnant l'injure et la diffamation. L'article du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé L'injure est constituée par Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferment l'imputation d'aucun fait Cette loi incrimine l'injure publique, envers un particulier ou envers certaines personnes, énumérées à l'article 31 de ladite loi. [...]
[...] Ainsi dans un arrêt rendu le 8 juin 1999[12] les hauts juges affirment très clairement que l'immunité de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ne reçoit exception que dans le cas où les écrits outrageants sont étrangers à la cause Une formulation similaire est adoptée dans un arrêt rendu le 13 février 2001.[13] Ce choix est cohérent. Le but du législateur en encadrant l'immunité accordée aux avocats est de limiter les abus, en ne donnant pas un permis de dire n'importe quoi sous couvert de l'exercice des droits de la défense. La liberté de parole donnée aux avocats ne doit pas être utilisée de manière abusive, à des fins autres que la défense du client. Or un abus est possible tout autant sur le terrain de la diffamation que de l'injure ou de l'outrage. [...]
[...] Ce choix montre que les juges accordent une importance réelle aux buts de l'immunité, permet une défense juste et raisonnable du client en protégeant la liberté d'expression de l'avocat. une restriction pour les propos étrangers à la cause L'immunité est donc limitée par l'obligation de rester dans le cadre des faits de la cause. Le législateur ne donne aucune précision sur ce qu'il entend par la notion de propos étrangers à la cause Selon le Poitevin, cette expression renvoie à tous les faits qui ne servent en rien à justifier les conclusions ou les moyens de défense des parties mises en cause. [...]
[...] Cette conception est largement inspirée de l'article 19 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme adoptée le 10 décembre 1948, qui précise que Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit. Plus récemment et surtout d'application plus effective, l'article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales consacre une liberté d'expression élargie, qui comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Consacrée par toutes les grandes déclarations de droit, la liberté d'expression est sans conteste une liberté fondamentale. [...]
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