La vie sociale exclut la possibilité de l'existence de libertés sans frontières. Dès lors le droit positif s'est attaché à fixer le statut des libertés publiques et ce faisant à les limiter. La déclaration des droits de lHomme et du citoyen a ainsi affirmé la nécessité d'une telle limitation aux fins d'assurer aux citoyens la jouissance des mêmes droits et d'empêcher les actions nuisibles à la société.
Protection de la société et coexistence des libertés sont donc les deux directives qui fondent la limitation des libertés publiques en France.
Ces deux principes fondamentaux sont très largement repris par le Conseil d'Etat qui estime qu'une limitation peut être apportée à toute liberté « en vue d'éviter un usage abusif ou contraire aux nécessités de l'ordre public » [CE 7 juillet 1950; Dehaene]. Adoptant une position similaire la convention européenne des droits de l'Homme et la Cour européenne des droits de l'Homme précisent les limitations que les législations nationales peuvent apporter aux libertés en se fondant sur l'ordre public.
Reste à préciser la notion d'ordre public. Cette dernière semble pouvoir se définir quant à son but: assurer la protection des structures sociales. Dès lors deux acceptions peuvent en découler: - l'ordre public au sens matériel tel que défini à l'art.2212-2 code général des collectivités territoriales: assurer la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques.
L'ordre public au sens intellectuel: assurer la coexistence des libertés et la jouissance par chacun des libertés reconnues en tant que telles.
Dès lors, il convient d'analyser les limitations portées aux libertés publiques afin de favoriser la coexistence des droits fondamentaux (I) mais il convient également de s'intéresser à l'impératif de protection de la société et ses incidences sur l'exercice des libertés publiques (II).
[...] La prise en compte de périodes troublées aux fins de limiter certaines libertés. En cas de péril national, le constituant a prévu, à l'article 16, des mesures exceptionnelles. Ces mesures ne sont pas des actes de gouvernement mais des mesures de nature législative lorsqu'elles portent sur le domaine de l'article 34 [CE 2 mars 1962; Rubin de Servens]. Or les libertés publiques sont de la compétence du législateur donc les restrictions aux libertés prises en application de l'article 16 ne sont pas susceptibles de recours devant le Conseil d'Etat et devant le Conseil constitutionnel. [...]
[...] Les conflits de liberté ne peuvent alors être résolus que par la seule hiérarchie des normes. Toutefois, aujourd'hui, la quasi-totalité des libertés ont valeur constitutionnelle, dès lors aucune solution n'est concevable. - Pour d'autres, la solution aux contradictions réside dans une conciliation qui doit s'opérer en dehors de toute idée de hiérarchisation. Le juge des libertés doit donc procéder à des choix guidés par un certain pragmatisme: le juge est face à un dilemme car il doit faire prévaloir un droit sur l'autre alors qu'ils sont tous les deux fondamentaux. [...]
[...] Il est admis que les libertés trouvent une limite lorsqu'elles aboutissent au désordre et aux troubles sociaux car la sécurité physique disparaît. Dès lors, l'ordre public encadre, donc limite, certaines libertés qui pourraient, par leur exercice, conduire au désordre: la liberté de manifester peut être encadrée de même que la liberté de réunion. Limitations absolues permettant la protection d'une éthique commune. Il s'agit d'admettre que les libertés publiques peuvent être limitées non plus pour préserver les assises matérielles de la vie sociale mais l'assise morale de la société. [...]
[...] Ainsi la liberté de circuler sur la voie publique prime toujours la liberté du commerce qui est limitée en fonction des nécessites de circulation [CE 22 juin 1951; Daudignac]. Il est possible de trouver une voie médiane entre ces opinions doctrinales: le juge des libertés semble hiérarchiser les libertés au nom de l'ordre public mais il s'efforce aussi de rendre cette hiérarchisation la plus souple possible en tenant compte des circonstances et des conséquences des conflits. La hiérarchisation n'est donc pas un principe absolu et intangible. [...]
[...] La préservation de l'ordre public en cas de périodes troublées ou de circonstances particulières impose des mesures qui peuvent être fortement attentatoire aux libertés publiques. Conclusion L'ordre public est susceptible de connaître plusieurs acceptions: protection matérielle de la société (sûreté, salubrité et sécurité), protection d'une éthique commune, assurance de la coexistence des libertés et préservation de l'exercice d'une même liberté par plusieurs individus. Toutefois l'ordre public permet par lui-même ou avec le concours de circonstances particulières de restreindre les libertés des individus pris dans leur ensemble ou par catégories. [...]
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