La question d'une hiérarchie entre les libertés ne se pose pas d'un point de vue formel. En effet, certaines libertés ont acquis un rang constitutionnel du fait de leur consécration par le juge constitutionnel alors que d'autres ne sont reconnues que par le législateur ou le juge ordinaire et n'auraient qu'une valeur législative, ou infra législative et supra décrétale. La question d'une hiérarchie entre les libertés doit se poser en d'autres termes : il s'agit de savoir si, au sein des libertés reconnues comme ayant valeur constitutionnelle, certaines seraient d'un rang supérieur aux autres, ce qui reviendrait à admettre l'existence de libertés de premier rang et de libertés de second rang.
Certains auteurs défendent la thèse de l'existence d'une hiérarchie entre les libertés à valeur constitutionnelle, parmi lesquels Louis FAVOREU et Bruno GEUNEVOIS. Le conseiller d'État Bruno GEUNEVOIS a construit sa théorie en s'appuyant sur la jurisprudence du conseil constitutionnel, qui selon lui a clairement opéré une distinction entre les libertés, certaines étant considérées comme plus « fondamentales » que d'autres. En fonction de la hiérarchie dégagée par le juge constitutionnel, la compétence du législateur serait plus ou moins étendue
Louis FAVOREU quant à lui, a repris la thèse développée par GEUNEVOIS en précisant les caractéristiques essentielles auxquelles les libertés dites « de premier rang » doivent répondre. Partant, FAVOREU s'est livré à son tour à une classification des libertés fondée sur la jurisprudence de conseil constitutionnel.
[...] Toutefois il n'est pas difficile de trouver pour chaque nouveau principe reconnu comme ayant valeur constitutionnelle, le fondement textuel d'une telle décision. Ensuite, Georges Vedel combat la théorie développée par Genevois et Favoreu, en s'appuyant à son tour sur la jurisprudence du CC. Il constate également qu'au gré de ses décisions, le CC est amené à faire prévaloir certaines normes sur d'autres. Ainsi, la liberté individuelle, la liberté de communication, seraient des libertés de premier rang. Le droit de propriété ou le droit d'entreprendre des libertés du second rang. [...]
[...] Ce principe trouve une illustration dans une décision du juge constitutionnel du 16 juillet 1971, relative à la liberté d'association, dans laquelle il affirme que la déclaration préalable est admissible mais en aucun cas l'autorisation préalable, et ce même si elle émane non plus de l'autorité administrative, mais de l'autorité judiciaire. La liberté d'association est donc une liberté publique fondamentale. Puis, le second principe énoncé est celui du rôle du législateur qui doit tendre à rendre plus effective l'exercice de la liberté et non à la restreindre. Ce deuxième principe supporte toutefois une exception car la loi peut restreindre l'exercice d'une liberté publique fondamentale lorsqu'elle a pour but de la concilier avec un autre principe ou objectif à valeur constitutionnelle. [...]
[...] le pouvoir constituant dérivé est l'expression de la souveraineté dans toute sa plénitude Il en résulte que ce que le peuple a édicté, le peuple peut le modifier, aucune norme ne s'imposant au pouvoir Constituant, qu'il soit originaire ou dérivé, comme immuable ou intouchable. Ceci aboutit au rejet de toute idée de supra constitutionnalité. Au total, si la thèse d'une hiérarchie entre les libertés a été soutenue par une partie de la doctrine, emmenée par Favoreu et Genevois,et l'est encore aujourd'hui, force est de constater que la jurisprudence du conseil constitutionnel n'a jamais corroboré une telle théorie. [...]
[...] Toutefois la thèse de l'existence d'une hiérarchie entre les libertés rencontre des contradicteurs parmi lesquels Georges VEDEL. Celui-ci considérait en effet que l'affirmation d'une hiérarchie entre les libertés constitutionnellement reconnues constituait un non-sens car la valeur constitutionnelle ne peut pas être hiérarchisée. Toutes les libertés contenues dans le bloc de constitutionnalité ont la même valeur. Si certains auteurs, à l'image de Serge ARNE ont défendu l'idée de l'existence d'un noyau dur ou d'un bloc de supra constitutionnalité dans le sens d'un ensemble de règles de droit positif d'un rang plus élevé que la Constitution, dont le contenu s'imposerait au constituant et dont une autorité pourrait assurer le respect, il convient de constater que cette thèse n'a jamais été corroborée sur le plan de du droit positif par le conseil constitutionnel. [...]
[...] Une analyse notamment de deux décisions importantes du conseil constitutionnel nous obligera à donner raison à cette dernière thèse, et à rejeter toute idée de supra constitutionnalité. Le refus de reconnaissance d'une supra constitutionnalité Jean-Jacques Rousseau écrivait Un peuple est toujours maître de changer ses lois, même les meilleures car s'il lui plaît de se faire mal à lui-même, qui est-ce qui a droit de l'en empêcher ? L'idée du contrat social illustre bien la décision du 26 mars 2003 par laquelle le CC s'est déclaré incompétent, sans exception ni réserve, pour statuer sur une révision constitutionnelle, que celle émane du peuple par référendum, ou du Parlement réuni en Congrès. [...]
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