"La liberté est le droit de faire ce que les lois permettent" écrivait Montesquieu, philosophe critique du pouvoir et auteur de "De l'esprit des lois" [1748]. Dès lors apparaît l'idée selon laquelle le Droit permet de protéger la liberté en l'encadrant.
De ce point de vue, l'Etat de droit peut-être considéré comme un compromis entre l'idéologie démocratique et les valeurs libérales. En effet, il est une construction doctrinale imaginée au XIXème siècle par les juristes allemands puis français et qui a surtout mis l'accent sur les aspect formels et procéduraux de l'encadrement du pouvoir par le droit. L'Etat de droit, inspiré de la notion allemande de "Rechtsstaat", entend ainsi enregistrer la poussée démocratique tout en l'encadrant et la canalisant par le droit.
Pour autant, les notions d'Etat de droit et de démocratie ne sauraient être confondues. En effet, si l'on considère le droit indépendamment de toutes valeurs morales ou politiques, il ne s'agit plus que d'un corpus de règles. Par conséquent, un Etat qui se bornerait à appliquer le droit à la lettre pourrait être considéré à la fois comme un Etat de droit et une dictature.
En outre, l'hégémonie du droit est condamnée par certains auteurs qui dénoncent le risque de dérive vers un "gouvernement des juges" qui consisterait en ce que les magistrats outrepassent les limites fixées par les dispositions constitutionnelles en les interprétant.
Néanmoins, l'observation des régimes politiques contemporains tend à démontrer que l'Etat de droit demeure le cadre privilégié de l'épanouissement des libertés fondamentales, définies comme un ensemble de droits et libertés reconnues et protégées juridiquement.
D'autre part, l'interdépendance qui unit ces notions se reflète dans l'idée que l'Etat de droit ne saurait lui-même exister sans l'existence et la consécration de ces libertés fondamentales.
Par conséquent, les libertés fondamentales sont-elles l'essence ou le produit de l'Etat de droit ?
Il apparaît ainsi que, si les libertés fondamentales apparaissent comme un critère substantiel de la dénomination d'Etat de droit [I], celui-ci est lui-même instrumentalisé au service de ces dernières [II].
[...] La Constitution, dénominateur commun de l'instauration de l'Etat de droit et de la consécration des libertés fondamentales La Constitution est assimilée à la loi fondamentale d'un Etat. Elle s'entend de l'ensemble des règles écrites ou coutumières qui en déterminent la forme, la dévolution et l'exercice du pouvoir, ainsi que les rapports entre gouvernants et gouvernés. Or, il apparaît qu'en définissant les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions, elle constitue le cadre de l'Etat de droit. En effet, le juriste autrichien Hans Kelsen a redéfini la notion d'Etat de droit comme un (Etat dans lequel les normes sont hiérarchisées de sorte que sa puissance s'en trouve limitée(. [...]
[...] Il implique dès lors que la puissance de l'Etat trouve ses limites dans la garantie des droits fondamentaux reconnus aux individus. La notion d'Etat de droit sous-tend alors l'existence d'un double contrôle : un contrôle des citoyens et un contrôle de la puissance publique. La finalité même de l'Etat consistant à garantir ces droits, il doit exister une possibilité d'opposition au pouvoir fondée sur le droit. En effet, l'Etat de droit traduit la subjectivisation du droit qui dote chacun d'un statut qui lui attribue un pouvoir d'exigibilité et lui confère une capacité d'action. [...]
[...] Le Conseil constitutionnel, organe en charge de faire respecter la norme suprême, consiste en effet à contrôler la conformité des lois à la Constitution [article 61] et celle de la Constitution aux traités internationaux sur le point d'être adoptés [article 54]. Or, il apparaît que l'intégration du préambule de la Constitution de 1946 et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dans le bloc de constitutionnalité a permis un renforcement de l'Etat de droit. Bibliographie - “L'Etat de droit” de J.Chevallier. Edition : Monchrestien. [...]
[...] D'où il découle que les droits fondamentaux caractérisent la nature du pacte social, de sorte que la dénomination d'Etat de droit est étroitement conditionnée par l'équilibre entre droits et devoirs, droits individuels et collectifs. Il apparaît ainsi que ces préceptes jusnaturalistes ont été largement repris, notamment par la Constitution de 1958 qui énonce en son préambule que (Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme [ . Or, la Constitution est présentée comme le socle commun des notions d'Etat de droit et de libertés fondamentales. [...]
[...] Par conséquent, il ne saurait exister d'Etat de droit sans Constitution. De la même manière, il semble que les libertés fondamentales n'aient de sens en tant que telles que par leur incorporation au texte constitutionnel. En effet, seule la reconnaissance de la valeur constitutionnelle des libertés individuelles et collectives leur confère une protection maximale. En ce sens, la décision (Liberté d'association( [1971] du Conseil Constitutionnel illustre l'attitude de la France tendant à protéger des textes à l'origine purement déclaratifs en leur attribuant une valeur constitutionnelle. [...]
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