Droit français, liberté d'expression, abus de liberté d'expression, Mélon-Soucramanien, Robert Faurisson, négationnisme, droit de l'homme, principe de légalité, mondialisation, article 11 de la DDHC, article 10 de la CESDH, loi du 29 juillet 1881, liberté de la presse, articles 4 et 5 de la DDHC, loi Léotard, arrêt Perincek C/Suisse, loi Gayssot
Le décès de Robert Faurisson, chef de file des négationnistes français et notamment reconnu coupable de contestation de crime contre l'humanité et d'incitation à la haine raciale, est venu rappeler que la liberté d'expression, bien que constituant un droit fondamental de premier rang, connaît en France certaines limites. La liberté d'expression est donc un droit "[consacré] à un rang normatif supra-législatif parce que [sa] substance correspond à une valeur considérée comme fondamentale dans une société donnée." (Professeur Mélon-Soucramanien).
Plus précisément, il est intégré dans la catégorie plus large des libertés de penser, lesquelles englobent la liberté d'opinion, qui correspond à la liberté de penser en son for intérieur, et la liberté d'expression, qui correspond à l'expression extérieure de la liberté d'opinion et "permet de manifester son opinion en l'extériorisant sous des formes diverses" (Professeur Mélin-Soucramanien).
[...] Le droit français maintient-il aujourd'hui un juste équilibre entre protection de la liberté d'expression et limitation de ses abus ? La question mérite en effet d'être posée, car, si une mise en balance a toujours pu être réalisée entre la liberté d'expression et les autres impératifs nécessairement protégés, la plupart des mesures légales encadrant en France les abus de la liberté d'expression concernent des moyens de communication « classiques », là où la mondialisation apporte de nouvelles difficultés techniques à la tâche des pouvoirs publics. [...]
[...] La protection de la liberté d'expression est également le fait du juge, qu'il soit constitutionnel ou non. La liberté d'expression étant proclamée par la Déclaration, intégrée au préambule de la Constitution qui, depuis 1971, a une valeur constitutionnelle au même titre que le corps de la Constitution, il est légitime de penser que le juge constitutionnel est le juge naturel de la liberté d'expression, garant de sa protection. Il s'est effectivement illustré dans ce domaine à plusieurs reprises : par sa décision du 27 juillet 1982, il proclame la valeur constitutionnelle de la liberté de la communication audiovisuelle. [...]
[...] Dans cette vision de la liberté d'expression, suprémacistes blancs et néonazis peuvent librement exprimer leurs idéologies sans craindre une quelconque condamnation pénale, ce qui serait impensable en France. La liberté d'expression amenant à de multiples conceptions selon les systèmes juridiques, il s'agit ici de n'en étudier que la version française, ainsi que d'évoquer également la vision européenne, dans la mesure où cette dernière influe la première. En France, donc, la liberté d'expression a son régime dans la loi, qui pose de multiples limites à son exercice : Robert Faurisson avait par exemple été pénalement condamné pour ses propos sur la Shoah sur la base de la loi Gayssot du 13 juillet 1990, qui réprime notamment la négation des crimes contre l'humanité avérés. [...]
[...] Si le Comité des droits de l'Homme n'est qu'un organe non juridictionnel de l'ONU, organisation internationale et non pas européenne, l'émission d'un avis contraire à celui français montre la difficulté que constitue pour la France sa propre adhésion à de multiples organisations internationales. Ces organisations ont souvent le pouvoir d'inciter fortement la France à changer sa législation, notamment lorsqu'elle touche aux libertés fondamentales comme la liberté d'expression. La pression diplomatique incite le plus souvent à agir, et la France se retrouve à devoir abandonner sa vision de la liberté d'expression et de ses limites. La France est dépendante de ces organisations, ce qui rend plus difficile d'imposer dans les frontières du pays une régulation de la liberté d'expression qui est la sienne. [...]
[...] C'est ainsi que, dans son arrêt Commune d'Orvault du 26 février 2010, le Conseil d'État, en autorisant l'humoriste controversé Dieudonné à se produire à Orvault, reconnaît la liberté d'expression comme étant une liberté fondamentale, dans le cadre d'un référé-liberté. La liberté doit être protégée, et elle l'est en droit français. Cependant, si l'on parle d'équilibre à opérer avec des impératifs qui lui seraient contraires, c'est bien parce que la liberté d'expression est une liberté limitée. La liberté d'expression, une liberté limitée La liberté d'expression est, d'abord, soumise aux limites communes à toutes les libertés. [...]
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