Régulièrement aux centres des campagnes présidentielles et régionales, le droit des étrangers ne laisse en France personne indifférent. Cette matière évolue sans cesse, ce qui engendre incertitudes et confusions sur son contenu, notamment à propos du droit d'asile. Les accords de Schengen du 14 juin 1985 et de Dublin du 15 juillet 1952 ont déterminé les compétences de chaque État signataire pour refuser le traitement des demandes d'asile. Force est donc de constater que ce droit d'asile « conventionnel » met en cause le droit d'asile constitutionnel tel que la France l'aborde, en ce qu'il permet à l'État de refuser l'examen d'une demande, ou la demande elle-même. Le droit d'asile devient donc ici un droit de l'État, une expression de sa souveraineté.
L'intérêt de cette étude réside alors dans la conciliation entre le droit de l'individu de voir sa demande d'asile examinée et d'obtenir ainsi l'asile, et le droit de l'État de refuser de connaître d'une demande ou d'accorder l'asile. Il s'agit donc de déterminer la nature du droit d'asile: droit de l'individu ou droit de l'État. Le droit d'asile est-il un droit fondamental subjectif d'application directe ? En d'autres termes, ce dernier est-il destiné aux individus ou à l'État lui-même ? Finalement, le droit d'asile en France permet-il effectivement de protéger les individus étrangers dont les droits fondamentaux ont été violés ?
[...] Il était donc inapproprié à l'époque de parler de droit d'asile constitutionnel en France. Cependant, le Conseil constitutionnel va vouloir faire de ce droit une norme autonome et effective. À travers la décision Maitrise de l'immigration du 12-13 aout 1993, ce dernier va considérer que le droit d'asile est un droit fondamental et que la loi ne peut en réglementer les conditions qu'en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec d'autres règles ou principes de valeur constitutionnelle ( que le respect du droit d'asile, principe à valeur constitutionnelle, implique d'une manière générale que l'étranger qui se réclame de ce droit soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à qu'il ait été statué sur sa demande ».Le Conseil a donc pu sanctionner le législateur pour non-respect du droit d'asile (DC avril 1997, Certificats d'hébergement). [...]
[...] Cet élargissement est visible de par l'apparition de nouveaux motifs de refus issus du régime du droit d'asile conventionnel. En effet, la loi précitée crée d'abord l'asile interne qui pourra être opposé aux demandes d'asile conventionnel ou constitutionnel dans le cas où l'individu peut bénéficier d'une protection sur une partie de son territoire d'origine (article 713-3 du CESDEDA) . De même, elle permet d'opposer aux mêmes demandes le pays d'origine sûr (article 741-4 Cette notion est définie comme le pays qui respecte les principes de la liberté, de la démocratie et de l'État de droit ainsi que les droits de l'homme et les libertés fondamentales notion laissée à l'appréciation de l'administration, sous le contrôle du juge, ce qui peut laisser entrevoir une certaine faculté discrétionnaire de cette dernière à refuser l'asile à un individu. [...]
[...] La possibilité pour l'individu concerné d'engager un référé liberté afin d'obtenir l'asile, l'élargissement de la qualité de réfugié nécessaire à l'acceptation de la demande, ou encore la consécration de droits corolaires au droit d'asile témoignent de l'effectivité grandissante de ce dernier. En effet, si le droit d'asile constitutionnel change de nature après la décision précitée de 1993 (il devient un droit subjectif et applicable sans intervention du législateur), il change aussi de contenu en ce qu'il intègre un faisceau de prérogatives qui renforce la substance de ce droit. Les demandeurs d'asile ont par exemple droit au séjour provisoire, lequel implique le droit d'entrée sur le territoire pendant la durée d'examen de la demande. [...]
[...] L'OFPRA est désormais compétent pour traiter de l'ensemble des demandes en raison du principe du guichet unique. Comme dit précédemment, les décisions de l'OFPRA sont susceptibles de contestation devant la CNDA sous un certain délai. Le principe du guichet unique instauré par la loi de 2003, en plus de renforcer l'assimilation et la confusion des procédures applicables, aboutit à un engorgement des juridictions (la CNDA est la première juridiction française en nombre de décisions rendues) qui symbolise peut-être d'une certaine façon le climat d'incertitude qui règne autour du droit d'asile en France, en espérant que cet engorgement juridictionnel puisse pousser le législateur à distinguer les deux sortes de procédures. [...]
[...] De même, le droit au séjour provisoire constitue pour tout demandeur d'asile une liberté fondamentale. En conséquence, le ministre compétent porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en refusant l'entrée sur le territoire français à des étrangers dont la demande n'apparait pas manifestement infondée (CE,2 mai 2001, Dziri). Cependant, l'instauration de mécanismes de protection tendant à donner à l'individu un véritable droit à donner l'asile ne suffit pas à le considérer comme tel, en particulier si l'on étudie les conséquences de l'unification des régimes du droit constitutionnel d'asile et du droit conventionnel d'asile par la loi du 10 décembre 2003. [...]
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