Le droit est aujourd'hui confronté à de nouvelles questions concernant la protection de l'être humain, de son corps et de sa personne, notamment face à d'éventuelles nouvelles menaces qui n'existaient pas au moment de la rédaction des règles constitutionnelles. Le développement des biotechnologies, de l'informatique ou de la médecine rendent ainsi nécessaires de disposer de normes de références adéquates à même de protéger les autres normes constitutionnelles.
S'il n'existe pas de véritable hiérarchie des principes constitutionnels, la portée de chacun est différente. Depuis quelques années, un principe matriciel semble s'être imposé, engendrant d'autres droits de portée et de valeur différentes, le principe du respect de la dignité de la personne humaine. Selon Paul Ricœur, dans toutes les cultures, il y a eu le besoin de reconnaissance d'une exigence qui a été que « quelque chose est dû à l'être humain du seul fait qu'il est humain ». Le respect de la dignité humaine est ainsi la reconnaissance de la primauté de la personne et le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie sur le fondement de sa dignité. Elle constitue alors en tant que principe matriciel le fondement de tous les droits. Il ne figure pourtant pas en tant que tel dans la Convention européenne des droits de l'homme de 1950, révélant ainsi la difficulté pour ce principe de sortir du cadre du droit naturel pour s'inscrire dans celui du droit positif. La Cour européenne des DH a cependant considéré qu'il était implicitement exprimé notamment par la protection de la vie (art2) ou l'interdiction des traitements inhumains ou dégradants (art3).
Pourtant, il existe bel et bien aujourd'hui un risque de confrontation de ce principe irréductible avec la liberté de la personne au fondement de son autonomie, reconnu de longue date notamment dans la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. Selon la définition de Bertrand Mathieu, la liberté individuelle est un « droit à agir dans le sens déterminé de la liberté personnelle dont relève de la sphère d'autonomie de la personne ». Il s'agit alors de clarifier les frontières entre dignité et liberté en tentant de créer des hiérarchies entre elles, au profit notamment de la dignité.
La dignité humaine peut-elle donner dans le droit positif une réponse à toutes les situations juridiques où elle entre en contradiction avec la liberté individuelle?
[...] La dignité humaine peut-elle donner dans le droit positif une réponse à toutes les situations juridiques où elle entre en contradiction avec la liberté individuelle? La suprématie du principe de dignité de la personne humaine se matérialise à la fois par la protection de la liberté de l'individu et la protection de l'individu contre sa liberté Le respect de la dignité de la personne humaine au fondement de la protection de sa propre liberté La dignité de la personne humaine constitue un droit intangible, tant par sa consécration morale que par sa place centrale dans le système juridique et son rôle fondateur. [...]
[...] L'article 3 de la Convention Européenne des droits de l'Homme est ainsi invocable à chacune des étapes de la détention (arrestation de la personne, sa mise en garde à vue, incarcération et rétention). L'article 3 a pu aussi être invoqué dans les établissements scolaires ou hôpitaux à l'encontre de traitements dégradants ou de châtiments corporels, mais aussi lors de conflits armés. Dans ce cas- ci, le principe de respect de la dignité de la personne humaine constitue donc une protection des libertés individuelles par rapport à l'État. [...]
[...] Dans ce cas, l'individu peut revendiquer le respect de sa dignité, mais est aussi libre de la définir pour ne pas restreindre sa liberté. Le plus difficile dès lors est l'abandon du terrain moral et philosophique pour appliquer cette définition abstraite dans le domaine juridique. Face à la difficulté de donner une définition en droit positif de la dignité humaine, on assiste à une transposition de manière indirecte de ce principe dans le droit positif dans différents textes convergents sur le contenu, mais n'excluant pas des incertitudes. Finalement, qu'est-ce qui est du ressort du respect de la dignité humaine ? [...]
[...] II) Une suprématie du principe de dignité qui ne peut s'appliquer à toutes les situations juridiques face à la liberté individuelle Le problème laissé entier de la définition précise en droit positif de la notion de dignité quant à sa place vis-à-vis de la liberté individuelle La notion de dignité humaine semble poser un problème de l'ordre de la définition, notamment dans sa transformation d'une notion morale et philosophique en concept et norme juridique. Ceci n'est ainsi pas à négliger, car de sa transposition en droit positif du principe de dignité dépend la place qui lui est donnée face à la liberté individuelle. [...]
[...] Une définition pourrait être donnée par la Commission européenne des Droits de l'Homme qui pose dans l'arrêt Patel du 14 décembre 1973 qu' un traitement est dégradant lorsqu'il provoque un abaissement de rang, de la situation ou de la réputation de celui qui en est l'objet aux yeux d'autrui aussi bien qu'à ses propres yeux Cette définition donne ainsi l'avantage d'englober les divers types de droits rattachés au principe comme les droits économiques et sociaux, mais peut sembler trop vague pour être satisfaisante. Il y a en outre un problème d'ordre philosophique. Nous avons dit que la notion de respect de la dignité humaine était intrinsèquement rattachée à l'humanité. Or le droit ne définit pas ce qui fait l'humanité d'un être humain qui est d'abord d'ordre philosophique. Deux conceptions s'opposent ainsi. [...]
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