Dans une société dite « permissive, libérale, et individualiste » où diverses formes d'expériences sexuelles sont dorénavant tolérées par le citoyen moyen, les juges doivent aujourd'hui faire face à cette incontournable et grandissante évolution des mœurs.
Les pratiques sadomasochistes s'inscrivent notamment dans cette évolution. Le terme sadomasochiste puise ses origines dans la littérature du 19e siècle, à travers le célèbre Marquis de Sade et Sacher-Masoch.
On associe le sadisme au comportement sexuel dans lequel le plaisir ne peut être obtenu qu'en infligeant au partenaire des souffrances physiques et morales. Le masochisme quant à lui est un comportement sexuel dans lequel le plaisir ne peut être obtenu qu'en passant par sa propre souffrance physique ou morale. Le sadomasochisme peut ainsi se définir comme les pratiques sexuelles consistant à utiliser la douleur, la domination, ou l'humiliation dans la recherche du plaisir.
Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme a dû se prononcer sur l'ingérence étatique dans la sphère de la vie « intimement » privée, eu égard l'allégation de la violation de l'article 8 de la convention par les requérants.
En effet, en 1997 avec l'affaire Laskey, Jaggard et Brown contre Royaume-Uni ainsi qu'en 2005 avec l'affaire K.A/A.D, la Cour s'est attachée à étudier deux requêtes émanant de personnes incriminées au niveau national sur la base d'une saisie-perquisition de cassettes vidéos au sein de leur domicile, suite à une enquête judiciaire concernant un établissement fréquenté habituellement par les requérants.
Dans ces deux affaires révélant un « culte de la violence », le chef d'inculpation retenu était : coups et blessures volontaires. Aussi, il semble opportun de relever qu'en 1997 la Cour fait abstraction, bien que donné par les « victimes », du consentement pour confirmer la décision des juges britanniques, alors qu'en 2005 elle se fonde paradoxalement sur l'absence de consentement de la « victime ». L'on parle, dès lors, d'un revirement jurisprudentiel en la matière.
Par ailleurs, en considération des dommages réellement ou potentiellement occasionnés au regard de ces pratiques, il convient de mettre en exergue la nécessaire protection de la santé dont la tâche incombe à l'État.
[...] Or, il s'agit davantage d'une liberté fondamentale dans la mesure où l'État ne peut pas assurer l'existence d'un tel droit. Cependant, en matière de relations sexuelles, l'élément fondamental repose sur le consentement du partenaire. La sacralisation du consentement En droit pénal, le consentement se définit comme l'adhésion donnée d'avance par une personne à une infraction portant atteinte à ses droits. Cependant, le consentement ne supprime pas légalement l'infraction sauf si celui-ci exige une fraude ou une violence. Dans l'affaire Laskey, les «victimes» étaient consentantes, néanmoins, les juges retiennent la qualification de coups et blessures volontaires alors que dans l'affaire K.A et A.D, malgré la similarité des faits, les juges ont recherché à travers les cassettes vidéo la réalité du consentement de la victime qui, en l'occurrence, «criait stop et pitié». [...]
[...] Le Conseil Constitutionnel se réfère en 1994 pour la première fois au principe de dignité humaine (CC , 27/07/1994) en l'érigeant en un principe à valeur constitutionnelle s'attachant ainsi à sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation». Suite à cette décision, la loi bioéthique du 29/07/1994 introduit dans le Code civil un article 16 selon lequel : loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie». [...]
[...] Une mêlée de dispositions fondamentales : une articulation délicate L'article 8 de la Convention pose le principe du droit au respect de la vie privée et une exception qui légitime l'ingérence étatique dans la sphère privée, nécessaire dans une société démocratique, sous certaines conditions : la sécurité nationale, la sûreté publique, le bien-être économique du pays, la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou la protection des droits et libertés d'autrui. Par principe, la vie sexuelle relève d'un aspect intime de la vie privée. Ainsi, la Cour a souvent souligné que l'expression «vie privée» est large et ne se prête pas à une définition exhaustive. Des éléments tels que le sexe, l'orientation et la vie sexuels sont des composantes importantes du domaine personnel protégé par l'article 8 (CEDH, 21/10/1981, Dudgeon). [...]
[...] Concernant les pratiques sadomasochistes, le droit pénal ne prévoit pas expressément d'infraction. Mais, à la lecture des arrêts, révélant des actes d'une extrême violence qui effleurent la torture et la barbarie, l'application des articles L.222-1 et suivant du Code pénal peut être soulevé. L'article 1134 prévoit certes que «les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites». La loi en l'occurrence, s'apparenterait aux règles et codes applicables en matière de pratiques sadomasochistes. Le consentement n'effaçant pas l'illégalité de l'acte, le contrat sera révoqué, par conséquent, pour les causes que la loi autorise. [...]
[...] Ainsi, s'inscrit dans l'évolution jurisprudentielle de la Cour, l'arrêt Laskey, Jaggard and Brown c.Royaume-Uni du 19 février 1997 qui condamne les pratiques sadomasochistes d'adultes homosexuels consentants. Au cours d'une perquisition pour une autre enquête, des cassettes vidéo ont été saisies alors qu'elles mettaient en scène des individus s'adonnant à des pratiques sexuelles singulières d'une extrême violence, ce qui a donné lieu à une condamnation par les juridictions britanniques. La CEDH retient la qualification d'actes de cruauté en se fondant implicitement sur le respect de principe de la dignité humaine pour débouter les requérants. [...]
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