CEDH Cour Européenne des Droits de l'Homme, CESDH Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme, contrôle de conventionnalité, responsabilité sans faute de l'État, affaire Benalla, arrêt Mediapart, pourvoi 20/01194, 6 juillet 2022, perquisition, source journalistique, liberté d'expression, proportionnalité, atteinte à la vie privée, atteinte à l'intimité, liberté de la presse
La société éditrice du journal en ligne Mediapart estime être victime d'une tentative de perquisition en date du 4 février 2019, perquisition dans le but de déterminer les sources d'enregistrements de conversations privées entre A. Benalla et V. Crase, dans le cadre de l'« affaire Benalla ».
La société Mediapart assigne alors l'agent judiciaire de l'État devant le Tribunal de Grande Instance de Paris par acte d'huissier le 4 avril 2019, pour mettre en oeuvre la responsabilité sans faute de l'État si la société est considérée comme tiers à l'enquête sur l'« affaire Benalla », ou sa responsabilité pour faute si la société est usagère du service public de la justice.
[...] En réplique, l'agent judiciaire de l'État demande à ce que la société Mediapart soit déboutée, sans pour autant avancer de moyens à l'appui de sa demande. Bien que l'assignation ait initialement été faite devant le Tribunal de Grande Instance de Paris, suite à l'intervention de la loi de programmation 2018-2022 pour la réforme de la justice et la création des tribunaux judiciaires, c'est le tribunal judiciaire de Nanterre qui se retrouve compétent pour trancher le litige, ce qui n'en change pas le fond. [...]
[...] Concernant la mesure de perquisition en elle-même, elle était en tout état de cause disproportionnée, même en l'admettant légale. En effet, elle n'était pas la mesure la moins coercitive possible, et comme l'a noté la CEDH, une telle perquisition a un effet « inhibiteur » sur d'autres sources, entravant la liberté de la presse. Partant, la perquisition viole le droit à la liberté d'expression qui protège la liberté de la presse et des sources, et met en jeu la responsabilité de l'État. [...]
[...] L'idée de légalité de l'atteinte n'implique pas nécessairement une loi au sens législatif du terme, mais une source de droit quelconque et antérieure au litige. En l'espèce, cette atteinte est prévue par le code de procédure pénale et l'article 2 de la loi de 1881. On verra le but légitime infra, mais l'on peut déjà dire que, dans le cadre de cet article 10, le tribunal retient que ce qui importe est la proportionnalité des atteintes concrètes, et pas abstraites. [...]
[...] Tribunal judiciaire de Nanterre, 1re chambre civile juillet 2022, n° 20/01194, Mediapart - La responsabilité de l'État pour une perquisition dans les locaux d'un journal Dans cette décision de la première chambre civile du tribunal judiciaire de Nanterre du 6 juillet 2022, ce dernier reconnaît la responsabilité de l'agent judiciaire de l'État dans une violation du droit à la liberté d'expression tel qu'il résulte de l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH), faisant ainsi une application rigoureuse de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en la matière. [...]
[...] Sans retracer la jurisprudence détaillée de la CEDH, d'autant plus que le tribunal judiciaire de Nanterre la cite in extenso, il est notable de voir que c'est elle qui guide son appréciation de l'espèce. Le juge rappelle le cadre conventionnel et jurisprudentiel spécifiquement parce que c'est ce dernier qui va servir d'étalon à l'analyse ou non de la faute de l'État. C'est spécifiquement le degré de protection particulier qui fait que l'atteinte au secret des sources et, partant, à la liberté de la presse, sera constitutif d'une faute de l'État même si les sources n'ont finalement pas été divulguées. [...]
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