La liberté d'expression est un droit fondamental garanti par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Au niveau européen, cette liberté est protégée par l'article 10 de la Convention européenne des Droits de L'Homme. Cependant l'exercice abusif de la liberté d'expression peut être constitutif d'une faute, c'est relativement à cette matière que s'est prononcée la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 avril 2008.
En l'espèce, dans le cadre d'une campagne antinucléaire, des associations de défense de l'environnement ont reproduit sur leur site internet la lettre A de la marque de la société Aréva ainsi que la dénomination «A Aréva » accompagnées d'une tête de mort et d'un slogan. Après une infructueuse tentative d'obtenir en référé l'arrêt des reproductions, la société assigne les associations, au fond, en contrefaçon et en responsabilité civile. La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 17 novembre 2006, déboute la société de sa demande en contrefaçon, mais accueille sa demande en
responsabilité civile en considérant que les agissements des associations constituaient un dénigrement des marques de la société et les a condamné sur le fondement de l'article 1382 du Code civil à un euro de dommages et intérêt pour abus du droit à la liberté d'expression, ainsi qu'à l'interdiction, sous astreinte, de poursuivre les reproductions. Les associations se pourvoient en cassation contre cet arrêt.
[...] En l'espèce, en appliquant les trois critères précédemment cités, la Cour de cassation s'est livrée à un examen des faits et non du seul droit. En effet, la Cour de cassation tranche ici au fond et sans renvoi, montrant ainsi l'importance de la solution posée par cet arrêt et donc l'importance de la liberté d'expression. D'autre part, avec ces trois critères de l'abus du droit de libre expression la Cour de cassation laisse un champ d'action important à la liberté d'expression. [...]
[...] En effet, tant que l'action litigieuse est conforme à l'objet de l'association qui la mène, poursuit un but d'intérêt général, en recourant à des moyens proportionnés, elle ne peut pas donner lieu à réparation. [...]
[...] Le pourvoi en cassation soulève ici deux problèmes de droit. D'une part, le juge peut-il appliquer le droit commun de la responsabilité pour faute à ce litige ? D'autre part la campagne menée par les associations à l'encontre de la société constitue-t-elle un usage abusif de la liberté d'expression ? La Cour de cassation répond par l'affirmative à la première question, l'action antinucléaire des associations visait, à travers les marques de la société, non pas la réputation et l'image de la société, mais les produits et services délivrés par celle-ci. [...]
[...] L'application du droit commun de la responsabilité pour faute Alors que les associations affirment que le litige relève des conditions dérogatoires de la loi du 29 juillet 1881, la Cour de cassation refuse de lui appliquer ce droit spécial de la presse, favorable aux demandeurs ( A ) et recourt au droit commun de la responsabilité civile, favorable à la société ( B Le refus du recours aux conditions dérogatoires de la loi du 29 juillet 1881 favorables aux demandeurs Les associations souhaitaient se voir appliquer le régime spécial de la presse, issu de la loi du 29 juillet 1881, sur la base d'une atteinte à la réputation. Le droit spécial de la presse est favorable à la liberté d'expression et dispose que le délai pour agir contre une publication est de trois mois. En l'espèce le recours à ce régime dérogatoire serait favorable aux associations, vu que l'action en justice introduite par la société l'a été après ce délai de prescription de trois mois. Cependant la cour régulatrice refuse d'appliquer au litige les dispositions de la loi du 29 juillet 1881. [...]
[...] La cour régulatrice reprend les trois critères fixés dans un arrêt de la deuxième chambre civile de la cour de cassation rendu le 19 octobre 2006. Ces trois critères sont : l'agissement conformément à son objet, dans un but d'intérêt général et avec des moyens proportionnés. Si ces trois critères sont réunis, il n'y a pas d'abus du droit de libre expression. Ainsi, la Cour de cassation considère que les actes reprochés aux associations répondent aux trois critères et donc ne constitue pas un abus du droit de libre expression A travers cette approche de la faute dans ‘exercice d'un droit, on peut voir l'influence du droit européen sur le droit interne. [...]
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