Garde à vue, Dialogue des juges, Gouvernement des juges, Droit à l'assistance d'un avocat, article 6§1 CESDH
Le 15 avril 2011, la Cour de cassation, dans sa formation la plus solennelle, se prononce sur le droit à l'assistance d'un avocat dans la procédure de garde à vue de quatre personnes de nationalité étrangère en situation irrégulière.
Plus généralement, par ces quatre arrêts, la Cour de cassation sonne le glas de la régularité de ces mesures au regard de l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales consacrant le droit à l'assistance effective d'un avocat. Décisions d'autant plus symboliques qu'elles interviennent le jour de sa publication de la loi n° 2011-392 portant réforme de la garde à vue dont l'entrée en vigueur était prévue, au plus tard, le 1er juillet 2011.
Dans les quatre affaires portées devant l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, des ressortissants étrangers en situation irrégulière étaient interpellés puis placés en garde à vue, l'un pour vol et les trois autres pour infraction à la législation des étrangers. À l'issue de ces gardes à vue, un arrêté de reconduite à la frontière, puis une décision de placement en rétention étaient pris à leur encontre. Le Préfet saisissait le juge des
libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la rétention. Les personnes retenues contestaient alors la régularité de cette procédure au motif qu'elles n'avaient pas bénéficié de l'assistance d'un avocat dès le début de la garde à vue et durant leurs interrogatoires.
Statuant sur l'appel interjeté contre les décisions du juge qui avaient soit ordonné (arrêt n° 589), soit refusé d'ordonner (arrêt n° 590, 591, 592) la prolongation de ces mesures de rétention sollicitée par le Préfet, le Premier Président de la Cour d'appel de Lyon avait considéré la procédure régulière, alors que le Premier Président de la Cour d'appel de Rennes l'avait jugée irrégulière dans les trois autres affaires.
[...] En effet, si le Conseil constitutionnel et la Chambre criminelle de la Cour de cassation reconnaissaient l'inconstitutionnalité et l'inconventionnalité de la procédure de garde à vue, ils avaient accordé au législateur, dans un souci de sécurité juridique, un délai expirant au 01/07/2011 pour que la législation relative à la garde à vue soit modifiée. La Chambre criminelle confirmait ce délai et refusait ainsi de censurer les procédures de garde à vue jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Le projet de loi portant réforme du régime de la garde à vue était, par ailleurs, présenté par le gouvernement en Conseil des ministres le 13 octobre 2010, adopté par le Sénat le 8 mars 2011 et par l'Assemblée Nationale en deuxième lecture le 12 avril 2011. [...]
[...] ( ) Nous devrions avoir une réflexion collective sur ce sujet ; c'est au législateur de faire la loi et au juge de l'appliquer et non pas au juge de faire la loi Il considère en effet que ces décisions étaient limites par rapport aux exigences de la démocratie et estime que la Haute juridiction est un peu sortie de son rôle en prenant cette décision La loi 2011-392 portant réforme de la garde à vue consacrant, essentiellement, le droit au silence notifié au gardé à vue et le droit à l'assistance d'un avocat dès le début et tout au long de la garde à vue, est aussi contestée. [...]
[...] Le principe du droit à l'assistance de l'avocat doit donc être respecté dès maintenant et sa violation pourra être sanctionné dans le cadre du contrôle de conventionnalité. À ce titre, l'ordre des avocats émet une réserve et espère que l'État saura lui aussi s'adapter sans délai, en informant les fonctionnaires de police de leurs nouvelles obligations et en rendant effective une indemnisation décente des avocats intervenant au titre de l'aide juridictionnelle Mais, en réaction à ces décisions, le Garde des Sceaux indique dans un communiqué que des instructions précises sont immédiatement données aux magistrats du parquet pour que, sans attendre le 1er juin, les règles définies par la loi publiée ce matin en matière de notification du droit au silence et de droit à l'assistance par un avocat soient appliquées sans délai, afin de garantir d'emblée la conformité des mesures prises aux exigences européennes Dans le même temps, le Ministère de l'Intérieur demandait à la police et à la gendarmerie d'appliquer sans délai la réforme de la garde à vue. [...]
[...] Un contrôle effectif du respect de ce droit à l'assistance d'un avocat vivement critiqué A. L'effectivité de ce droit à l'assistance d'un avocat dans les procédures de gardes à vue garantie par le contrôle de conventionnalité Assemblée plénière casse l'ordonnance de prolongation des mesures de rétention au visa des articles de la CESDH et 63-4 du Code de procédure pénale encore en vigueur au jour où elle statue et jusqu'à ce que la loi portant réforme de la garde à vue prenne effet. [...]
[...] Pourtant, à la différence du Conseil constitutionnel et de la Chambre criminelle, l'Assemblée plénière ne reporte pas dans le temps les effets de sa décision. Elle estime en effet, comme l'explique le Premier Président dans son communiqué de presse que les droits garantis par la Convention devant être effectifs et concrets, le principe de sécurité juridique et les nécessités d'une bonne administration de la justice ne peuvent être invoqués pour priver un justiciable de son droit à un procès équitable Il n'y a donc pas à attendre l'entrée en vigueur de la nouvelle loi pour avoir à respecter le principe de la présence de l'avocat tout au long de la garde à vue. [...]
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