« La Cour européenne des droits de l'Homme n'a d'utilité que pour les révisionnistes, les délinquants et les Turcs ». Ces propos violents ne peuvent qu'être opposés à l'objectif noble de la CEDH qui est d'organiser une protection internationale des droits de l'Homme. La vivacité d'un tel débat ne pourrait être possible sans le droit à la liberté d'expression. L'arrêt qui nous est proposé d'étudier, en date du 25 mai 2002, est d'ailleurs relatif à cette liberté, chère à la Cour européenne et consacrée par l'article 10 de la Convention.
En l'espèce, le Maroc s'était porté candidat pour son admission aux Communautés. Un rapport a été alors formulé pour renseigner la Commission des Communautés européennes sur la production et le trafic de drogues au Maroc. Un article publié dans le journal « Le Monde » a repris ce rapport, et a posé le doute sur la véritable détermination du roi concernant la lutte contre le développement du haschich au Maroc.
Les requérants furent alors successivement condamnés pour délit d'offense à un chef d'Etat par les différentes juridictions qui se sont appuyées sur l'article 36 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Ayant épuisé toutes les voies de recours dans l'ordre interne, sans obtenir gain de cause, les requérants ont décidé de saisir la Cour européenne invoquant la violation de l'article 10 de la Convention.
Le problème de droit qui se pose alors ici est le suivant : la restriction à la liberté d'expression (article 10 de la Convention EDH) posée par le délit d'offense à l'encontre d'un chef d'Etat étranger est-elle « légitime » et « nécessaire » ?
[...] De plus, cet article portait atteinte à la réputation et aux droits du roi du Maroc. La France pose ses arguments mais ceux-ci ne conviennent pas à la CEDH qui va tous les contredire les uns après les autres et d'une certaine manière, cela va conduire à l'abrogation de l'article 36 de la loi du 29 juillet 1881. Tout d'abord, la CEDH répond que l'article de M. Colombani se rapportait à une question d'intérêt général, et pouvait donc être à juste titre communiqué aux citoyens. [...]
[...] caractère exceptionnel de la restriction recherché par la CEDH La CEDH a montré qu'elle était très attachée à la liberté d'expression dans de nombreux arrêts tels que l'arrêt Fressoz France du 21 juin 1999. Alors, même si une dérogation est possible, la CEDH ne veut pas que la liberté d'expression perde de sa solennité en subissant restriction sur restriction. Une restriction doit avoir un caractère exceptionnel. C'est pourquoi les exceptions à la liberté d'expression appellent une interprétation étroite En effet, pour qu'une restriction soit possible, elle devra remplir rigoureusement certaines conditions. [...]
[...] En effet, si les avis de la CEDH et des juges nationaux diffèrent, c'est parce qu'ils n'ont pas apprécié la nécessité du délit d'offense à l'encontre d'un chef d'Etat étranger de la même manière. Mais on ne peut pas dire qui des deux l'a apprécié le plus justement. En effet, apprécier quelque chose, c'est estimer, peser le pour et le contre. Les expressions qui s'utilisent traduisent d'ailleurs bien une certaine subjectivité : pouvoir, liberté ou encore marge d'appréciation On peut citer dans l'arrêt quelques mots qui montrent que la CEDH n'est pas assurée de ce qu'elle avance. [...]
[...] A partir de là on peut se demander pourquoi l'appréciation des juges nationaux serait moins convaincante, moins juste que celles des juges de la CEDH étant donné que l'appréciation s'appuie sur des critères alors subjectifs. Et cette question revêt un intérêt d'autant plus important que la décision de la CEDH influence grandement le droit interne. La première partie s'articulera autour de l'idée que la liberté d'expression est un droit surprotégé car cher à la Cour EDH Nous verrons dans une seconde partie les conséquences de l'appréciation divergente de la légitimité et de la nécessité d'une dérogation à cette liberté (II). I. [...]
[...] La liberté d'expression n'est donc pas absolue. Il s'agit alors de trouver un équilibre entre ce qui peut être exprimé ou non, dans le but de respecter l'intérêt général. On peut reprendre l'expression ma liberté s'arrête là où commence celle d'autrui En effet, la Cour affirme que la presse ne peut user de la liberté d'expression comme bon lui semble non plus : elle ne doit pas franchir certaines limites, tenant notamment à la protection de la réputation et aux droits d'autrui ainsi qu'à la nécessité d'empêcher la divulgation d'informations confidentielles La limite semble alors légitime, puisqu'il s'agit de protéger autrui, et de respecter ses propres droits. [...]
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