La question de l'aide à la mort renvoie à une réalité qui est devenue un problème politique majeur dans notre société. Cependant, cette expression peut désigner soit une euthanasie active qui consiste à abréger les souffrances du malade en lui administrant un produit qui le ferait mourir, ou bien le fait de soulager au maximum les souffrances physiques et psychologiques du malade pour rendre sa fin de vie supportable, c'est-à-dire une euthanasie passive.
Dans l'affaire Pretty contre Royaume-Uni, la Cour européenne des Droits de l'Homme a eu à se prononcer sur l'existence ou l'inexistence d'un droit à la mort. En l'espèce, Mme Pretty souffre d'une maladie neurodégénérative progressive, qui conduit de manière inévitable à une paralysie du corps et à une mort dans d'atroces souffrances. Bien qu'elle ne soit plus en mesure de s'exprimer de façon compréhensible, son intellect et sa capacité à prendre des décisions restent intacts. Selon Mme Pretty les stades ultimes de la maladie sont d'une extrême souffrance et s'accompagnent d'une perte de dignité. À ce titre, elle souhaite pouvoir décider quand et comment elle va mourir et ainsi échapper à cette souffrance et à cette indignité.
Mme Pretty par une lettre du 27 juillet 2001 invite le Director of Public Prosecutions (DPP – Procureur britannique), à prendre l'engagement de ne pas poursuivre son mari si ce dernier, en conformité avec la volonté de son épouse, l'aide à se suicider. Logiquement, le DPP refuse de prendre un tel engagement. Mme Pretty n'a plus d'autre solution que de saisir la Divisional Court, qui rejette également sa demande par un jugement du 17 octobre 2001. Après épuisement des voies de recours interne, Mme Pretty saisit la Cour européenne des Droits de l'Homme pour faire invalider la décision de la juridiction britannique.
Mme Pretty va au soutien de son argumentation invoquer une violation des articles 2, 3, 8, 9 et 14 de la Cour européenne des Droits de l'Homme. L'extrait qui nous est proposé limite la réponse de la Cour aux articles 2 et 3, qui traitent respectivement du droit à la vie et de l'interdiction des traitements inhumains ou dégradants.
Le droit à la mort peut-il trouver sa source dans le principe de dignité humaine ?
[...] En l'espèce, la Cour reconnaît que le gouvernement britannique n'a pas infligé de mauvais traitement à Mme PRETTY. De la même façon, elle ne s'est jamais plainte d'avoir reçu les soins adéquats. La situation de Mme PRETTY n'est pas comparable avec celle d'un requérant malade du SIDA qui avait été menacé d'expulsion vers une île, où il n'aurait pu bénéficier d'un traitement médical approprié et où il aurait été exposé au risque de mourir dans des circonstances très pénibles. Les souffrances et l'indignité éventuelle qu'invoque Mme PRETTY ne découlent pas du comportement ou des traitements du Royaume-Uni. [...]
[...] Le principe même des libertés fondamentales est de permettre à l'individu de faire un choix. Cette liberté de choix devant être respectée et même garantie par les normes légales. Il est évident que la liberté va s'inscrire dans un contexte sociétal. L'article 4 de la DDHC dispose que : La liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui La question du suicide est déjà traitée par Beccaria en 1764 dans son ouvrage fondateur, Des délits et des peines. [...]
[...] Par ce motif, le refus d'admettre l'euthanasie ne peut pas être considéré comme une entrave à la liberté de conscience. Enfin, Mme PRETTY se place sur le terrain des discriminations. Elle précise que le refus émis par le DPP constitue en soi une discrimination, puisque la personne qui souhaite se suicider mais qui ne le peut pas est condamnée à mourir dans la souffrance et dans l'indignité, contrairement à la personne qui souhaite se suicider et qui a les capacités physiques pour accomplir cet acte. [...]
[...] La Cour rappelle la prééminence de l'article 2 et se réfère à la jurisprudence McCann et autres contre Royaume-Uni (27 septembre 1995). En effet, sans le droit à la vie que serait le droit au respect de la vie privée ou la liberté de conscience ? La vie est ce qui fonde l'humanité, de ce point de vue la vie est sacré et doit être protégée avant tout autre droit. Par conséquent, la vie est indisponible, c'est-à-dire que l'Etat est garant de la dignité humaine, même si cela va à l'encontre de la volonté de la personne. [...]
[...] Les Pays-Bas a été le premier pays au monde, en 2001 à légiférer et libéraliser l'euthanasie. Les médecins hollandais peuvent aujourd'hui, à la demande d'un patient, interrompre sa vie ou l'aider à se suicider, à condition de respecter des critères fixés par la loi et de déclarer sa mort à une commission de contrôle. La Suisse a suivi cette voie, puisqu'elle autorise l'assistance au suicide dès lors que le tiers intervenant a un mobile autre qu'égoïste. Dans ce sens, la législation suisse a mis une première limite à l'euthanasie, puisque si celle-ci est pratiquée, elle ne pourra en aucun cas l'être par des professionnels de la mort qui s'enrichiraient sur la souffrance des patients. [...]
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