Arrêt 15 mars 2022, pourvoi 21881/20, CEDH Convention Européenne des Droits de l'Homme, libertés fondamentales, état d'urgence, régime d'exception, droit suisse, Covid 19, liberté de réunion, principe de proportionnalité, liberté de manifestation
L'opinion qui suit concerne uniquement la conformité de la législation suisse par rapport à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La question de l'éventualité d'une absence ou non d'épuisement des voies de recours internes - et donc la recevabilité de la requête - ne sera pas examinée. Il faut toutefois noter d'emblée qu'il s'agit d'un point d'une importance capitale, puisqu'outre la recevabilité, l'épuisement ou l'inépuisement des voies de recours internes conditionne également la possibilité pour le juge interne d'effectuer lui-même un contrôle de proportionnalité des dispositions litigieuses, le rôle de la Cour n'étant évidemment que subsidiaire. Ce détail n'est pas sans importance tant la jurisprudence de la Cour repose sur ce caractère subsidiaire.
De même, l'opinion présentée ne tient pas compte d'une éventuelle condamnation effective des requérants, mais se concentre prima facie sur la conformité du droit suisse. Une telle présentation in abstracto ne peut évidemment qu'être prise avec les réserves de rigueur quant au sens que prendra la décision définitive. Il s'agit pour autant d'une analyse détaillée du mécanisme général.
[...] Cette liberté est particulièrement importante dans une société démocratique, en tant qu'elle est intimement liée tant à la liberté d'expression elle-même capitale dans une société démocratique (Voir Handyside c. RU, 1976) mais aussi à la liberté religieuse. Cependant, cette liberté peut être restreinte pour protéger d'autres droits fondamentaux, tels que la sécurité publique, la protection de l'ordre et la protection des droits et libertés d'autrui. La Cour européenne des droits de l'homme a établi les conditions à remplir pour que ces restrictions soient considérées comme valides en vertu de l'article 11. [...]
[...] Cour européenne des droits de l'homme mars 2022, n°21881/20, Communauté genevoise d'action syndicale c. Suisse - La sortie de l'état d'urgence sanitaire et les autres régimes d'exception Opinion du juge [Prénom Nom] dans l'affaire n° 21881/20 portée devant la grande chambre de la Cour européenne des droits de l'homme. Remarques préliminaires L'opinion qui suit concerne uniquement la conformité de la législation suisse par rapport à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La question de l'éventualité d'une absence ou non d'épuisement des voies de recours internes - et donc la recevabilité de la requête - ne sera pas examinée. [...]
[...] Cette jurisprudence n'est pas sans rappeler la jurisprudence Benjamin de 1933 du Conseil d'État français, à la différence qu'ici, les buts autorisés sont prévus par la Convention elle-même, et non pas laissés à l'appréciation de la Cour. En résumé, pour déroger à la liberté de manifestation protégée par l'article 11 de la CEDH, les restrictions doivent être prévues par la loi, nécessaires dans une société démocratique et proportionnée au but légitime poursuivi. La Cour européenne des droits de l'homme veille à ce que les restrictions ne soient pas utilisées pour restreindre abusivement la liberté de manifestation. [...]
[...] Conclusion Les dispositions suisses sont ainsi bien prévues par la loi, et poursuivent un motif légitime au sens de l'article 11§2 de la Convention. En revanche, leur manque de proportionnalité nous fait dire qu'elles ne sont pas nécessaires dans une société démocratique. Nous concluons donc à la violation de principe de l'article 11§2 de la Convention par les dispositions suisses de l'article 10d de l'O.2 Covid-19. Les conséquences de cette condamnation doivent dépendre des faits d'espèce. En l'absence de peine privative de liberté effectivement prononcée contre les requérants, ou d'amende, il semble que la condamnation soit en elle-même une satisfaction équitable. [...]
[...] Il s'agit d'une formulation dont la structure innerve les articles 8 à 11 de la Convention. Les restrictions doivent être prévues par la loi, ce qui signifie qu'elles doivent être expressément prévues dans la législation applicable et doivent être suffisamment claires pour permettre à toutes les parties concernées de comprendre leur portée et leur application (Voir Rotaru c. Roumanie Maestri c. Italie Gorzelik et autres c. Pologne Sindicatul « Păstorul cel Bun » c. Roumanie, 2013). La « loi » désigne en réalité le droit positif en vigueur, qu'il soit législatif, réglementaire ou jurisprudentiel. [...]
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