Article 3 CEDH Torture effet horizontal obligation positive
D'après L.E Pettiti, l'effet horizontal de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) permet d'en faire « un instrument de protection généralisée, et pas seulement une prise de position contre le monstre froid, le Léviathan de Hobbes », autrement dit, l'Etat. L'effet horizontal de la CEDH, c'est-à-dire l'effet qu'elle peut produire entre deux personnes de droit privé, est en cause dans l'arrêt rendu par la Cour européenne de sauvegarde des droits de l'homme (Cour EDH) le 23 septembre 1998 opposant le requérant A au Royaume-Uni.
En effet, dès 1990, le service de protection de l'enfance local inscrit A, citoyen britannique, sur la liste des enfants à risque pour « sévices physiques avérés ». Son beau-père reconnait l'avoir frappé avec une canne. Il ne reçoit qu'un avertissement de la police puis est placé en garde à vue le 5 février 1993, avant d'être relâché le lendemain. A cette occasion, une pédiatre constate de nombreuses traces sur le corps de A pouvant provenir de coups administrés à l'aide d'un bâton les jours précédents. A fait appel à la justice britannique et son beau-père est jugé en février 1994. Le jury conclut à la majorité que le beau-père n'est pas coupable d'atteintes à l'intégrité physique jugeant que le traitement constituait un « châtiment raisonnable » en application de la loi britannique. Après avoir épuisé toutes les voies de recours qui s'offraient à lui, A saisi, le 15 juillet 1994, la Commission européenne de sauvegarde des droits de l'homme (Comm. EDH), selon la Protocole !!!!!!!!! alors en vigueur. Il allègue, notamment, de la violation de l'article 3 de la Convention selon lequel «Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » au motif que l'Etat ne l'a pas protégé contre les mauvais traitements de son beau-père puisque la loi nationale a permis de l'acquitter.
Les juges de la Cour EDH concluent à la violation de l'article 3 de la Convention par le Royaume-Uni. Après avoir constaté la violation de cet article 3 par le beau-père de A, le « minimum de gravité » permettant la qualification de « mauvais traitement » ayant été atteint, ils constatent que cette violation a été rendue possible par le droit britannique, qui prévoit l'existence d'un « châtiment raisonnable ». Par une lecture conjointe de l'article 1, selon lequel les « Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I » de la Convention, et de l'article 3, les juges affirment que cette possibilité offerte par le droit britannique viole l'obligation qu'ont les Etats parties à prendre les mesures nécessaires afin d'empêcher que leurs ressortissants ne soient victimes des traitements interdits par l'article 3 de la Convention. Cet arrêt soulève donc des questions essentielles.
La violation de l'article 3 de la Convention par un membre de la famille du requérant, dès lors qu'elle est admise, peut-elle entrainer l'engagement de la responsabilité du Royaume-Uni au motif que sa législation a rendu possibles les mauvais traitements infligés? Le caractère spécifique de l'article 3 de la Convention a-t-il une influence sur son effet horizontal?
Quel est l'apport de l'effet horizontal pour les justiciables ?
[...] Le contexte a donc un rôle spécial dès lors que l'article 3 est en cause. Or, cette contextualisation par la suite, était vue comme une atteinte faite au caractère absolu de l'article pourtant fortement consacré par la Cour. Cette critique a vu le jour avec la saisine de la Cour par des ressortissants accusés de terrorisme et susceptibles d'être expulsés vers leur pays d'origine. Or, dans les faits en cause, les requérants invoqués une violation de l'article 3 de la Convention soit par les autorités de leur pays d'origine, soit par un groupe de personnes résidantes dans le pays d'origine. [...]
[...] Pour autant, cette exclusion est peut-être remise en cause aujourd'hui, la Cour, à l'occasion de son arrêt N contre Royaume-Uni rendu le 27 mai 2008 faisant référence au souci de ne pas faire porter une charge trop lourde aux Etats parties. Elle fait donc référence à un des points du contrôle de proportionnalité appliqué lorsque la Convention s'applique de manière horizontale. Le contrôle de la violation de l'article 3 par un particulier pouvant être imputée à un Etat partie pose donc à la Cour des problèmes bien particuliers, auxquels elle apporte une réponse au fil de ses décisions. [...]
[...] Munzy en déduit que l'article 3 est absolu dans sa signification prescriptive, les textes ne reconnaissant aucune dérogation, mais qu'il est relatif dans sa signification descriptive, la Cour devant apprécier les faits pour en déduire le dépassement, ou non, du seuil requis. La Cour a défini les éléments caractéristiques des trois différents traitements évoqués par l'article la torture, les peines ou les traitements inhumains ou dégradants. Elle a défini les traitements dégradants à l'occasion de l'arrêt Tyrer rendu le 25 avril 1978 contre le Royaume-Uni. [...]
[...] Il est aussi invocable par un détenu subissant de mauvais traitements causés par ses codétenus Pantea contre Roumanie juin 2003). L'effet horizontal est aujourd'hui admis par tous L'admission quasi-unanime de la solution consacrée L'utilité de l'effet horizontal a été comprise dès 1970, l'Assemblée consultative du Conseil de l'Europe ayant adopté cette année, à l'égard de l'article la résolution suivante : Le droit au respect de la vie privée, garanti par l'article 8 de la Convention ( . ) doit protéger l'individu, non seulement contre les atteintes par les autorités publiques, mais également contre celles commises par les individus et des institutions Pour autant, ce n'est qu'en 1994 que les spécialistes constatent une consécration explicite de cet effet (arrêt Lopez Ostra). [...]
[...] La nécessité de la reconnaissance de l'effet horizontale de la Convention fait aussi objet d'un consensus international, en ce sens qu'elle est un traité garantissant le respect des droits de l'homme. P.236. Après avoir consacré de manière explicite l'effet horizontal de l'article 3 de la Convention, la Cour adapte cet effet au particularisme de l'article 3 (II.). II. L'adaptation nécessaire de l'effet horizontal au cas d'espèce L'article 3 invoqué par le requérant a la particularité d'être un article dit absolu Le contrôle de proportionnalité ne peut donc avoir lieu à son égard et l'étude de sa violation repose, notamment, sur la situation du requérant (B.). A. [...]
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