Arrêt du 18 février 2016, liberté d'expression, liberté artistique, création artistique, injure, Incitation à la haine, article 10 de la CEDH, article 11 de la DDHC, arrêt Ministère Amer, Dieudonné, droits fondamentaux, protection des droits fondamentaux
Dans cette affaire, un artiste (rappeur) est poursuivi du chef d'injure en raison du sexe et d'incitation à la haine, à la violence et à la discrimination dans ses chansons.
Après un jugement rendu par les juges du fond, le conseil des parties civiles et le ministère public interjettent appel. La Cour d'appel de Versailles, saisie de l'affaire, doit se prononcer sur la question de savoir si les faits reprochés sont condamnables.
Les appelants contestent la décision au titre d'injure publique et d'incitation à la haine et à la violence en raison de l'appartenance du sexe. Ils vont demander des dommages et intérêts, affirmant que les femmes étaient qualifiées par des termes « outrageants, dégradants et méprisants ». De plus, ils estiment que cette décision ne permettait pas de prendre une distance entre le rappeur et son personnage.
[...] En effet, il est admis que les propos tenus dans une ?uvre de fiction ne sont pas nécessairement considérés comme une apologie de la violence ou de la discrimination. La Cour d'appel ira dans ce sens, car la distinction entre l'artiste et le personnage de l'?uvre sera une des conditions retenues pour acquitter l'intimé. Cependant, cette distinction entre le rappeur et sa personne est discutable, car, en 2021, le rappeur Freeze a été condamné pour provocation à la haine raciale lorsque, dans ses chansons, il compare l'ancien Premier ministre Jean Castex à un « porc nazi ». [...]
[...] Alors, la question de la liberté d'expression dans le rap ou ?uvre artistique est encore loin d'être tranchée, puisque, selon les termes employés et le contexte, les sanctions sont différentes. Voilà pourquoi, nous pouvons affirmer que la solution est tournée vers des besoins nouveaux de la société. En l'occurrence, dans notre arrêt, les paroles d'une chanson de rap qui est le genre artistique contesté par les parties civiles et le ministère public peuvent être appréhendées de manière différente si l'on était par exemple à une époque où les droits de la femme étaient encore limités. [...]
[...] En tout état de cause, le raisonnement semble cohérent et logique. Puisque sanctionner les artistes reviendrait à restreindre la liberté d'expression c'est-à-dire que nous serons plus libres d'émettre nos pensées et avis. B. L'admission contestable des limites de la liberté d'expression Les principales limites à la liberté d'expression en France relèvent de deux catégories : la diffamation et l'injure d'une part, et les propos appelant à la haine d'autre part. En l'espèce, il s'agit de propos sexiste envers les femmes ou le principal concerné n'a pas été condamné. [...]
[...] Elle a notamment relevé que le morceau était « le fruit de l'imaginaire du créateur » et que le personnage qui tient les propos incriminés est présenté comme un « perdu d'avance ». En réalité, cette précision apportée par le juge n'est pas anodine, puisqu'elle va dans différents arrêts rappeler la définition du RAP. Effectivement, dans notre arrêt, elle va « tenir compte du style de création artistique en cause, le rap pouvant être ressenti par certains comme étant un mode d'expression par nature brutal, provocateur, vulgaire, voire violent, puisqu'il se veut le reflet d'une génération désabusée et révoltée ». [...]
[...] Mais tout dépendra des propos utilisés et du contexte. II. Un acquittement discutable au regard des droits fondamentaux La nature du problème posé à la cour est relative à un principe fondamental mais elle apporte une exception à ce principe A. L'admission de l'encadrement de la liberté d'expression La liberté d'expression est l'un des droits les plus précieux de l'homme. C'est un support de la démocratie, puisqu'elle a une valeur constitutionnelle et conventionnelle avec, d'une part, l'article 10 de la CEDH, et de l'autre, l'article 11 de la DDHC. [...]
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