Depuis la loi Perben II de 2004, les opérations de sonorisation et de fixation d'images sont légalement prévues et codifiées. Malgré cela, elles font encore l'objet d'un important contentieux judiciaire, comme en témoigne l'arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de cassation du 21 mars 2007. En l'espèce, dans le cadre d'une enquête préliminaire concernant un trafic de voiture, les enquêteurs prennent de la voie publique et à l'aide de téléobjectifs, des photographies de personnes et de plaques d'immatriculation de véhicules, dans l'enceinte d'une propriété privée. Les pièces ainsi obtenues sont versées au dossier de procédure. Les occupants des lieux et propriétaires de voitures demandent l'annulation de ces actes de procédure, au motif que ces opérations de police ont porté atteinte à leur vie privée.
La Cour d'Appel déclare irrégulières les opérations ayant consisté à photographier à leur insu les personnes présentes dans la propriété privée. En revanche, elle déclare régulières les opérations ayant consisté à photographier les plaques d'immatriculation des véhicules stationnés dans la propriété, aux fins d'identification des titulaires des cartes grises. Un pourvoi en cassation est formé. La Cour de cassation, quant à elle, approuve la Cour de cassation, concernant les photographies des personnes. En revanche, elle censure la Cour d'Appel à propose des opérations ayant consisté à photographier les plaques d'immatriculation, au motif que ces opérations ont porté atteinte à la vie privée des intéressés.
[...] La Cour de Cassation, en conclut donc que les enquêteurs ont interféré dans la vie privée des intéressés. C'est en effet le simple fait que la scène n'était pas visible de la voie publique, que les clichés ont été pris de l'extérieur, que la Cour constate à la violation de la vie privée. Il est possible de rapprocher cette position à celle de l'arrêt du 12 mars 2008 qui décide implicitement que les clichés pris par les enquêteurs, sans autorisation d'un magistrat, dans les parties communes d'un immeuble, sans autorisation des propriétaires, portaient atteinte au respect de la vie privée des individus. [...]
[...] Et cela, au visa de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen. Il est pourtant regrettable que la cassation de l'arrêt se fasse sous ce seul visa, et non sous celui cumulé des articles 706-96 et 75 (cadre de l'enquête préliminaire). En effet, puisque s'il avait existé un fondement textuel à la fixation d'images lors d'enquête préliminaire, aucune violation de la vie privée n'aurait été constatée, cette violation aurait même été considérée comme légitime. [...]
[...] La Cour de Cassation dans l'arrêt d'espèce précise que ces opérations doivent être réalisées sous l'autorité et le contrôle d'un magistrat. Cette position est également celle de la Cour européenne des Droits de l'Homme. En effet, concernant les opérations opérant une certaine ingérence dans la vie des individus, elle exige que celles-ci soient faites sous le contrôle et l'autorité d'une juge, gardien des libertés individuelles (CEDH, KRUSLIN et HUVIG contre France, 1990). La Chambre Criminelle reprend l'exigence de la CEDH. [...]
[...] Exclusion de la fixation d'images dans le cadre d'une enquête préliminaire Les enquêteurs ne peuvent avoir recours à la fixation d'images que dans des cas bien particuliers et précis définis par la loi dont l'enquête préliminaire ne fait pas partie A. Le champ d'application de l'article 706-96 du code de procédure pénale L'article 106-96 du code de procédure pénale prévoit la possibilité pour la police judiciaire de procéder à des opérations de fixation d'images. Mais son domaine est limité précisément. [...]
[...] Et c'est justement parce qu'il n'existe pas de fondement textuel à ce genre d'opérations qu'il y a atteinte non légitime à la vie privée des individus. De plus, ce visa donne l'impression que la Cour de Cassation condamne ce genre d'opérations car elles sont attentatoires à la vie privée et non parce qu'il n'y a pas de texte les prévoyant. On peut même se demander, dans le cas où la Cour de Cassation n'aurait pas décidé qu'il y avait atteinte à la vie privée, si elle n'aurait pas, par là même, autorisé les opérations. [...]
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