L'ouvrage se veut une histoire du droit sous la Ve République en France : « L'objectif (…) est d'explorer les rapports particuliers que la Ve République a entretenus avec le droit. » Au sein du droit contemporain, le régime de la Ve République, et plus précisément les « quatre décennies » de mai 1958 à mai 1995, se singularisent par une « application régulière, machinale » des institutions et un rapport passionnel au droit, auquel elle va même jusqu'à s'identifier
[...] Comme l'auteur le fait remarquer à juste titre, certains soutiennent (sans pour autant se contredire) les deux principes : certes le droit ne peut rester figé sous peine de disparaître et de se couper de la société à laquelle et pour laquelle il est censé s'appliquer. Cette conviction que le droit doit s'adapter aux mœurs (dans la mesure où celles-ci ne constituent pas une menace pour la société) a notamment été défendue par le président Valéry Giscard D'Estaing lorsque, justifiant sa volonté de voir adopter la loi Veil légalisant l'avortement, il prit pour argument le fait que la loi jusque là en vigueur (celle de 1920) était de toute façon inapplicable et inappliquée Cependant le droit peut lui-même susciter des évolutions sociales, comme le montrent les dispositions prises en faveur de la parité hommes-femmes. [...]
[...] Quant au droit du travail, il a directement été affecté par la montée du salariat, y compris féminin, mais aussi du chômage, sous la Ve République, comme en attestent par exemple les mesures législatives prises en 1981 sur le temps partiel. La théorie des acquis sociaux constitue à cet égard un môle important de résistance au changement du droit. Il convient en outre de souligner la spécificité de la Ve République, lors de laquelle les partenaires sociaux jouent un rôle nettement supérieur au pouvoir politique, ce qui explique que la législation sur le travail soit assez peu affectée par les alternances au pouvoir. [...]
[...] On remarque par ailleurs une corrélation entre les domaines où l'inflation du droit est la plus forte et ceux qui donnent lieu aux débats politiques les plus passionnés (travail, impôts . Les conséquences de cette inflation sont bien évidemment négatives : elles conduisent à l'ignorance et à la dévalorisation des lois. Plus celles-ci sont nombreuses, plus elles sont susceptibles d'être mal appliquées. Pour remédier à ce problème, l'auteur émet un certain nombre de propositions, parmi lesquelles l'idée d'un moratoire législatif qui semble cependant très improbable dans les circonstances actuelles, même si la création en 1995 d'un Office d'évaluation de la législation montre que les politiques sont conscients du problème (le paradoxe qui veut qu'on crée de nouvelles normes pour prévenir un excès de normes montre assez la difficulté de maîtriser la passion du droit). [...]
[...] Dès lors, le problème de la réduction de cette inégalité devant le droit (mais non pas devant la loi) est moins facile à résoudre qu'il en a l'air. Ainsi l'essor des médias, s'il a permis une diffusion beaucoup plus large et donc beaucoup plus démocratique de l'information sous la Ve République, les nouvelles technologies (Internet) restent encore réservées à une minorité initiés qui disposent des moyens financiers et de la formation nécessaires à leur utilisation. Il nous appartient donc de veiller à ce que les nouvelles opportunités de la communication ne contribuent pas à renforcer ces inégalités mais au contraire à les atténuer autant que possible. [...]
[...] Concernant maintenant la passion de la société pour le droit et la pression consécutive qu'elle exerce sur le législateur, il faut, avant même d'en rechercher les causes ou de déplorer ses conséquences néfastes, remarquer que cette passion contrairement à ce qu'affirme M. Carbonnier, n'est pas celle de la société entière, ou plutôt elle ne se manifeste pas de la même manière et avec la même intensité chez tous. Seuls ceux qui ont un minimum d'accès au droit la partagent (ce problème est traité dans le paragraphe suivant). [...]
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