Le testament de Jean Soulas, procureur au Parlement de Paris, 9 juin 1421 : commentaire

Extraits

[...] C'est ce qui conduisit à une insinuation de certains testaments dans les registres du Parlement. De cette insinuation on ne conserve plus aujourd'hui aux Archives nationales que le registre X1A 9807, qui couvre la période 1400-1421. Ici, Jean Soulas, non seulement agent de la monarchie, s'en remet aussi à la juridiction de la prévôté de Paris pour ce qui est de ses exécuteurs testamentaires : et pour ce les obliga et soubmist à la jurisdicicion et contraincte de la dicte prevosté de Paris précise-t-il dans la partie concernant la désignation des exécuteurs testamentaires. [...]

[...] 636-637] Item en tant que touche les quarante livres parisis de douaire dont il douée Jehannette, sa femme, et dont les lettres furent et sont passées par devant Jehan de Beauvais et Thomas Boynel, notaires du roy nostre dit seigneur ou dit Chastellet, le dit testateur veult qu'elle en joysse paisiblement durant sa vie, se ses heritages y pevent souffire ; si non, il lui avoit, avant qu'il l'espousast, autres foiz requis et encores requiert qu'elle ait et vueille avoir ses povres parens et amis pour humblement recommandez, et prendre en pacience le dit douaire sur ses diz biens immeubles, tant qu'elle vivra, et des biens meubles, c'est assavoir de leur part leur faire ou faire faire pleine delivrance sans empeschement, premierement, pour paier et accomplir ce present testament par la dicte Jehanne, sa femme, et autres ses executeurs cy dessoubz nommez, et aussi qu'elle les vueille acquicter envers ses enfans, envers lesquelx le dit testateur n'en est riens tenu, si non à cause du mariage de lui et d'elle, durant lequel il leur a fait le moins de desplaisir qu'il a peu ; et quelque chose qu'il soit, il supplie à elle et ses diz parens et amis d'estre amis et de non plaider ensemble, et que chascun se mette à raison et laisse aler du sien, car il disoit savoir quant il la print, qu'elle avoit bonne chevance en denrées de mercerie où s'est pou cogneu et entremis ; aussi avoit elle pluseurs choses à expedier par procès qui au dit testateur ont cousté de peine, travail, souci et chevance plus qu'elle n'a sceu ne sçet ; et oultre que, quant il l'espousa, ses biens meubles valoient bien six cens livres parisis et plus sans les debtes qui lui estoient deues, qui montoient plus de iiic frans, dont il n'est pas paié, et si avoit et a d'eritages qui valent iiiic livres parisis et plus pour une fois, se le temps eus testé bon comme il sera au plaisir de Dieu, et tout compté et rabatu, elle avoit bien de quoy vivre, aussi avoit le dit testateur ; et ce qu'il a dit cy dessus n'est mie pour reproucher, mais pour ung pou sentir de l'estat de l'un et de l'autre, se mestier estoit de le dire et savoir, ce qu'il ne sera point de besoing. Legs pieux à des établissements ecclésiastiques, le plus souvent pour des fondations de messes [p. 637] Item le dit testateur laissa à l'euvre de l'eglise Saincte Katherine du Val des Escoliers viii solz parisis pour une fois. [...]

[...] Cette place de l'exécution testamentaire déclinera à l'époque moderne : les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire seront si limités qu'il apparaîtra comme subordonné à l'héritier. La nouvelle coutume de Paris ne lui accordera ainsi que la saisine des meubles et lui interdira de vendre aucun bien, même mobilier, ou de payer une dette, sans l'accord de l'héritier. Parmi les responsabilités des exécuteurs testamentaires se trouve le règlement des dettes. C'est donc en toute logique qu'après la désignation des exécuteurs testamentaires suit un rappel des dettes du testateur et des sommes qui lui sont dues. [...]

[...] Legs faits à des personnes laïques [p. 635] Item il ordonna et voult estre paié à Margot, qui fu sa chamberiere du temps qu'il demouroit à la Barre du Bec à Paris, de laquelle et du dit testateur fu aucunement parlé, et en recompensacion de ce que il lui povoit avoir fait ou mesfait et qu'il lui povoit estre tenu, x livres tournois, et s'elle est trespassée, il les laissa à ses enfans ou heritiers, s'aucuns en et sinon que la dicte somme soit convertie en messes et bienfaiz pour l'ame d'elle, et plus avant que la dicte somme, se faire se peut. [...]

[...] On trouve ensuite dans ce testament des dispositions d'ordre familial : le testateur rappelle le douaire, ce gain de survie qu'il a constitué en faveur de son épouse si elle devient veuve. Il développe ici assez longuement sur ce sujet, bien que ce ne soit pas l'usage, mais il ne s'agit pas pour autant de remettre en cause ce douaire comme il l'explique lui-même : ce qu'il a dit cy dessus n'est mie pour reproucher, mais pour ung pou sentir de l'estat de l'un et de l'autre, se mestier estoit de le dire et savoir, ce qu'il ne sera point de besoing Ce développement a en tout cas le mérite de nous livrer un témoignage intéressant sur la structure de la famille et de la belle-famille du testateur et leur train de vie. [...]