L'association des notions de propriété et de créance paraît, de prime abord, très difficile.
En effet, en droit civil actuel, la propriété est le droit le plus absolu sur une chose ; elle est donc un droit réel. En revanche, la créance est un rapport de droit entre deux ou plusieurs personnes obligeant l'une à faire, donner ou ne pas faire quelque chose envers l'autre. C'est un droit personnel.
Comment alors concevoir un droit réel sur un droit personnel ? Il faudrait pour cela au moins que ce rapport personnel soit considéré comme une chose.
La question vient donc naturellement : Une créance est-elle une chose appropriable, en plus d'être un droit personnel ?
La distinction droit réel et droit personnel nous vient directement de l'interprétation des textes romains par les glossateurs.
Ainsi, la même problématique se pose sous l'angle du droit romain.
Les créances et la propriété n'ont cependant pas toujours existé sous les mêmes formes que celles qui nous ont été transmises par les glossateurs.
[...] La notion de propriété en droit romain et son évolution La notion de propriété en droit romain n'a pas toujours existé telle qu'elle nous a été transmise[12]. La notion de dominium est une notion qui n'apparaît que tardivement, à l'époque classique Au temps les plus anciens, seule une maîtrise de la chose était reconnue. C'est une notion large et concrète, très loin de la notion de technique juridique qu'est le dominium. Nous étudierons donc l'apparition du dominium La notion de dominium, notion de droit romain classique : La propriété, en droit romain classique, n'est pas définie. [...]
[...] Il y a sûrement eu d'autres étapes avant l'intégration par le droit de cette distinction. Gaius n'a donc pas inventé cette distinction. Il l'a empruntée à la philosophie et la grammaire. Cette distinction a cependant son intérêt propre en droit. Les juristes ne font pas entrer les mêmes choses dans les res incorporales que les grammairiens. Ils ne semblent considérer comme ayant une existence propre que les jus. La possesio ne serait donc pas une res incorporales, car c'est une situation de fait. [...]
[...] Le terme n'est pas employé par Cicéron[15]. Cette notion n'existait donc pas à son époque. Certains auteurs[16] attribuent à Varron sa première utilisation. Cependant, celui-ci n'utilise pas la notion abstraite de dominium mais la notion concrète de dominum, propriétaire[17]. Le terme dominium fait son apparition dans un épitome, publié par Paul, du Digesta d'Alfemus Varus qui reproduit peut-être un responsum de son maître Servius Sulpicius[18] : Un propriétaire qui avait deux fonds voisins avait vendu l'un d'entre eux, et s'était réservé, dans la mancipatio, au profit du fonds qu'il conservait, l'eau qui naissait dans le fonds et un espace de dix pieds de large autour de la source. [...]
[...] La propriété des créances, en tant que choses incorporelles est donc impossible. La distinction des res corporales et incorporales au lieu de permettre une telle possibilité, la nie totalement, en opposant directement, la propriété et les autres droits dont font partie les obligations. Conclusion La propriété des créances semble presque mieux envisageable dans la période qui précède la reconnaissance des res incorporales. En effet, à cette époque, le mancipium s'exerce également sur les servitudes prédiales rustiques. Cependant, il faut souligner qu'il ne s'agit alors, en aucun cas, d'une propriété telle que le dominium, mais, seulement dune puissance. [...]
[...] Elle exprime, cependant, une notion large d'appropriation qui ne doit pas être confondue avec la notion technique juridique de dominium. Le terme dominium n'a pas toujours été utilisé en droit romain. Le dominium correspond à la propriété d'une chose. Auparavant, les juristes ne parlaient pas de dominium, mais, de dominus, c'est-à-dire de propriétaire. Le passage de dominus à dominium s'est fait lentement. A son apparition, le dominium prend d'abord un sens large de pouvoir exercé par le dominus. Cet aspect perdure[14], d'ailleurs, bien après l'apparition de l'aspect plus technique de la notion. [...]
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