Si 1814 passe pour être une année charnière en ce qu'elle montre les prémices de la déchéance de l'Empire, elle n'en demeure pas moins l'occasion de restaurer le pouvoir monarchique. Car Napoléon Ier, de descendance corse, n'ayant aucun sang noble ni ancêtre glorieux pour justifier son ascension, doit sa place au plébiscite et au soutien du peuple français. Et, c'est pour conjurer cet état de fait et ce statut que Louis XVIII, fort de l'appui des monarchies et des armées coalisées d'Europe tente d'octroyer une charte (un long préambule et 76 articles) d'inspiration monarchique à la France le 4 juin 1814. Encouragé par la défaite de l'Empereur en octobre 1813 à Leipzig, sa destitution prononcée par le Sénat le 3 avril 1814 et son exil fixé le 11 sur l'île d'Elbe par le traité de Fontainebleau ; le comte de Provence devenu Louis XVIII depuis la mort officielle de Louis XVII monte sur le trône et tente de réhabiliter ce qu'il convient d'appeler un pouvoir légitime ou de droit divin. Mais le peuple redoute que le Roi renie cette charte au profit de l'absolutisme d'avant 1789. En vérité, comme ses déclarations de Hamm (1793) et de Vérone (1795) le laissaient paraître, il s'agissait de son ambition formelle mais il sait qu'il ne peut tenter ce coup de force au risque de renouer avec la guillotine et renonce à l'absolutisme lors de sa déclaration du 2 mai 1814 à Saint-Ouen. Malgré une certaine torpeur institutionnelle, les termes de la charte ne trouveront à s'appliquer qu'au terme des Cent-Jours - après que l'empereur ait reparu en France le 1er mars, rallié l'Empire, fédéré une armée et subi l'ultime défaite de Waterloo le 18 juin 1815.
[...] Le Roi peut dissoudre la Chambre des députés. - Quoiqu'il en soit, les pouvoirs des deux Chambres sont limités à deux fonctions: le vote de la loi et le contrôle du budget. Elles n'ont pas le droit d'initiative des lois, mais seulement celui d'amender le texte proposé par le roi, ou de le rejeter. La Chambre des Députés est composée de 430 députés élus pour cinq ans au suffrage censitaire et renouvelés par cinquième tous les ans. Les membres de la Chambre des Pairs sont en nombre illimité, nommés par le roi, à vie ou héréditaires. [...]
[...] Le préambule prône donc un retour aux valeurs traditionnelles, vers un ordre conservateur. Cela mérite d'être nuancé tant il est question d'un "renouvellement". À première vue, de nouvelles institutions sont mises en place, véritablement "nationale[s]", capables de concilier avec pragmatisme "les temps anciens et les temps modernes". Un système parlementaire bicaméral. - Le préambule annonce une assemblée où le Corps législatif est appelé à devenir la première "Chambre des députés". Il y en a une autre en vérité sur laquelle le préambule ne se prononce pas, conservatrice et dotée des mêmes pouvoirs: la Chambre des pairs. [...]
[...] Il s'agit en somme de sauver les apparences d'une restauration intégrale et de justifier un retour "paternel" en s'appuyant sur la conscience nationale des peuples. La "sagesse des rois" doit composer avec le "voeu des peuples" pour assurer à la charte de solides assises et une véritable pérennité ("longue durée). - La "liberté publique" n'est pas moins en danger que le trône lorsque ce dernier est soumis à "la violence" et aux troubles. En cela, la personne du roi et la Nation sont deux entités indissociables. [...]
[...] Le terme de "charte" fait référence à l'Ancien régime et "constitutionnelle" fait référence à une volonté révolutionnaire. Il n'est donc pas question de renier les aléas de l'Histoire mais d'"apprécier les effets des progrès toujours croissants des lumières" et de considérer comme il se doit "les rapports nouveaux que ces progrès ont introduits dans la société". Le préambule propose une alternative en prenant en compte les lumières par la création d'un cadre institutionnel selon les principes d'une constitution libérale limitée par l'autorité royale. [...]
[...] Nous avons enfin cherché les principes de la Charte constitutionnelle dans le caractère français, et dans les monuments vénérables des siècles passés. Ainsi, nous avons vu dans le renouvellement de la pairie une institution vraiment nationale, et qui doit lier tous les souvenirs à toutes les espérances, en réunissant les temps anciens et les temps modernes. Nous avons remplacé, par la Chambre des Députés, ces anciennes Assemblées des Champs de Mars et de Mai, et ces Chambres du Tiers-État, qui ont si souvent donné tout à fois des preuves de zèle pour les intérêts du peuple, de fidélité et de respect pour l'autorité des Rois. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture