Ordonnance de Montil-lès-Tours, article 125, 1454, Charles VII, réformation, ordonnance de Saint-Louis, Coutumes de Beauvaisis, lettres patentes, gardien des coutumes, absence d'écrits, lettres patentes de Charles VIII
Le terme ordonnance renvoie non seulement à la notion d'ordre, au fait d'ordonner quelque chose (au sens de devoir), mais aussi à la notion d'ordre par opposition au désordre, c'est-à-dire le fait d'ordonner quelque chose (une matière, un territoire) là où régnait le désordre. En ce sens, existe d'ailleurs dès le XIIe siècle un véritable esprit de réformation, au sens strict de reformation : il s'agit de reformer l'ordre ancien pour mettre fin aux injustices et aux abus qui se sont introduits avec le temps. Cet esprit, cette volonté royale n'est donc pas nouvelle en 1454. L'ordonnance de Saint Louis de 1254 pour l'amélioration de l'état du royaume en est un exemple. Dès lors, que s'agissait-il d'ordonner en 1454 ? Autrement posée : quel désordre y avait-il durant cette période sur le plan juridique ?
[...] L'ordonnance relève d'autres difficultés liées aux coutumes, notamment leur diversité et leur territorialité. Se pose en effet la question de la délimitation de leur ressort. À cet égard encore, l'ordonnance entendait apporter de la clarté à ce paysage coutumier, de l'ordre (ordonnance) dans ce fatras coutumier. En ce sens, un quatrième caractère de la coutume pose problème : sa malléabilité : « et souvent les coutumes muent et varient à leur appétit » c'est-à-dire qu'elles changent, elles se modifient sans pour autant qu'on en fasse état par écrit, ce qui vient accentuer ce flou juridique. [...]
[...] La mission du roi explique aussi la mise en place d'une justice déléguée. Effectivement, le roi ne peut être présent partout et s'occuper de toutes les affaires, si bien qu'il se doit d'instituer des juridictions qui rendront des jugements en son nom. Au XIIIe siècle, se met alors en place une organisation que l'on peut schématiquement présenter de la manière suivante : - Le roi et son entourage (cour, conseil, secrétaires d'État, etc.) - Les États généraux - Les hommes du roi en provinces (baillis, sénéchaux, gouverneurs, etc.) - Les parlements (rendent la justice souveraine, se chargent de la police et se mêlent des affaires d'État) - Les juges royaux de droit commun (justice et police en province) : prévôtés, sénéchaussées et bailliages - Les juges d'exception tels les juges des eaux et forêts, les amirautés (police et justice de tout ce qui concerne les affaires maritimes) - La Chambre des Comptes - L'administration fiscale confiée tantôt à des officiers tantôt à des sociétés privées (sous contrôle du roi malgré tout) - L'administration militaire qui comporte l' « épée » (les hommes d'armes proprement dits) et la « plume » (ceux qui commandent, mais ne combattent pas forcément ou ceux qui se chargent de la fourniture de l'armée par exemple) - Les institutions indépendantes que le roi incorpore peu à peu au royaume (Église gallicane, corporations de métiers, villes, seigneuries, universités, etc.) Pour finir, il ne faut pas oublier qu'à cette période la justice intègre la police. [...]
[...] Désormais, avec la rédaction officielle des coutumes ordonnée par le roi et prévue à l'article 125 de l'ordonnance de Montils-lès-Tours, la norme de référence devant les tribunaux sera ce qui sera écrit dans ces livres c'est-à-dire le texte écrit. Les parties – ou les avocats – ne pourront plus alléguer ou proposer une autre coutume, autre que celle qui aura fait l'objet de la rédaction officielle comme c'était le cas auparavant dans les pays de coutumes, parce qu'il est enjoint aux juges, dans ce cas, de ne pas les entendre ni de les recevoir. [...]
[...] Par exemple, lorsque Saint-Louis (1226-1270) essaiera, en 1258, de remplacer le duel judiciaire (procédure accusatoire) par une procédure d'enquête (procédure de type inquisitoire), celui-ci se confrontera à la résistance des nobles qui tenaient à cette prérogative (défendre leur droit à la pointe de l'épée) ; si bien que l'ordonnance royale ne vaudra finalement que pour le seul domaine royal. Il n'y avait donc pas, au niveau du droit procédural, d'uniformisation. Ces usages, procédures, styles de procédures et coutumes sont divers selon la diversité des pays de notre royaume. [...]
[...] À ce propos, l'ordonnance parle de tous les pays de notre royaume. En réalité, elle ne va pas concerner les pays de droit écrit, où les coutumes sont déjà rédigées, mais seulement les pays de coutumes. • Après le principe de la rédaction des coutumes, l'ordonnance traite de la méthode décidée par le roi pour mener à bien cette rédaction. Le texte [de la coutume faisant l'objet de la rédaction] étant accordé par les auteurs coutumiers, praticiens et gens de chacun des pays de notre royaume, lesquels coutumes, usages et styles ainsi accordés seront mis et écrits en des livres, lesquels seront apportés par- devers Nous, pour les faire voir et visiter par les Gens de notre Grand Conseil ou de notre Cour de Parlement, et pour Nous les décréter et confirmer ». [...]
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