« Les lois ne sont pas de purs actes de puissance ; ce sont des actes de sagesse, de justice et de raison. Le législateur […] ne doit point perdre de vue que les lois sont faites pour les hommes, et non les hommes pour les lois ; qu'elles doivent être adaptées au caractère, aux habitudes, à la situation du peuple pour lequel elles sont faites. » (Jean-Etienne-Marie Portalis, Discours préliminaire sur le projet de Code civil). A défaut de l'existence de normes idéales qu'il suffirait de découvrir puis d'appliquer, les hommes ne peuvent en effet qu'eux-mêmes créer les règles nécessaires à toute vie en société. Celles-ci se doivent d'être adaptées à la réalité sociale de la société à laquelle elles vont s'appliquer, sans quoi elles ne seront pas respectées ou bien elles ne le seront que par la seule force de contrainte publique.
Tout d'abord, il s'agit de s'interroger sur la conception d'une légalité qui serait la source suprême de la légitimité. En effet, cette conception est celle de la fusion totale entre légalité et légitimité, qui seraient de fait identiques en tout point : ce qui est légal est nécessairement légitime et ce qui est légitime l'est nécessairement par sa légalité. Celle-ci provient bien entendu des doctrines positivistes pour lesquelles le Droit positif seul possède une valeur juridique. En revanche, le second sens attaché au terme de légitimité parait se dissocier de celui de légalité et se rapprocher des doctrines du Droit naturel : un corps supérieur de règles s'impose au législateur lorsqu'il édicte les normes ; celles-ci possèderaient donc une valeur « supra légale ». Il suffirait donc de déterminer quel est ce corps supérieur de règles qui fonderait toute légitimité ainsi que d'en déterminer leur portée…
Une question centrale s'impose donc : la légalité est-elle l'unique source de la légitimité de la norme ?
[...] Le phénomène d'inflation normative actuel est plutôt préoccupant. En France, la longueur moyenne du Journal Officiel est ainsi passée de pages par an dans les années 1980 à pages annuelles ces dernières années ; tandis que le Recueil des lois de l'Assemblée Nationale passait de 433 pages en 1973 à pages en 2003 et à pages en 2004. C'est en effet en 1991, dans son Rapport public, le Conseil d'État déplore la logorrhée législative et réglementaire et l'instabilité incessante et parfois sans cause des normes. [...]
[...] Aussi légales soit-elles, elles ne seront pas pour autant nécessairement considérées comme légitimes par l'opinion publique la légitimité de la légalité est donc toute relative. Si on accepte le fait que la légalité correspondre à la réalité sociale d'une communauté d'individus il sera quoi qu'il arrive impossible d'obtenir le consentement de tous, qui serait l'expression d'une société utopique ou totalitaire. Une perception individuelle de la légitimité ne peut être liée qu'à une perception individuelle de la justice en terme de sentiment subjectif Du sentiment de justice Sa perception de la justice est indissociable de celle de la légitimité et ne peut être qu'individuelle. [...]
[...] En revanche une conception davantage holiste s'appuyant sur une communauté d'individus peut aboutir à une légitimité collective fondée sur la volonté générale, qui s'apparente aux diverses formes de la démocratie, qu'elle soit représentative selon le principe de la souveraineté nationale ou directe selon celui de la souveraineté populaire. Il ne s'agit bien entendu que d'exemples. En outre la diversité des textes relatifs aux Droits de l'Homme et leurs diverses interprétations témoignent de cette difficulté à fixer ces grands principes de vie en communauté, surtout au niveau international. Les deux conceptions se rapportant à la légitimité évoquée ci-dessus paraissent donc opposer l'objectif (rationalité légale) au subjectif (sentiment de légitimité, de justice), cela ne signifiant aucunement que l'une est plus juste ou meilleure que l'autre. [...]
[...] Quelles conséquences découlent de ce phénomène ? Sans doute l'évolution rapide de la société au cours du XXe a nécessité une évolution réciproque du Droit, mais n'y a-t-il pas trop de Droit, trop de domaines où il s'étend ? En effet, si les Lois (et la légalité en général) ne sont perçues que comme des moyens de modeler la société à ses idées, alors quel est l'avenir et quelle est la pérennité de la Loi ? C'est bien parce que l'on néglige le fait que dans une société libre les normes servent bien plus les intérêts inconnus des citoyens, potentiellement profitables à tous, que des intérêts particuliers soumis au législateur qu'émerge cette dérive du Droit remettant en cause la légitimité des normes ; car les normes par définition ne servent personne si ce n'est le bien commun. [...]
[...] Une question centrale s'impose donc : la légalité est-elle l'unique source de la légitimité de la norme ? Il s'agit tout d'abord de montrer que la légalité représente la source objective de la légitimité de la norme pour ensuite tempérer cette approche en s'interrogeant sur la nécessaire subjectivité des normes et la remise en cause perpétuelle de l'ordre légal en place (II). I De la légalité comme source de légitimité objective de la norme Il s'agit tout d'abord d'évoquer la nécessité d'établir un ordre légal structuré afin d'assurer la stabilité au sein d'une société et favoriser l'émergence d'un Etat de droit affranchissant les citoyens de l'arbitraire pour ensuite évoquer le rôle central des différents processus d'élaboration des normes A De l'instauration de la légalité, préalable à toute société stable Il s'agit tout d'abord de montrer que l'établissement d'un ordre légal est nécessaire à l'instauration d'une société ordonnée et stable pour ensuite montrer qu'il s'agit d'un préalable indispensable à l'instauration d'une justice efficace puis à l'Etat de droit D'un ordre fondé sur la légalité La légalité est indissociable du pouvoir de contrainte de l'Etat. [...]
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