En des temps d'interrogations profondes à propos du droit international et des relations entre les peuples, il semble particulièrement bienvenu de s'interroger sur les idées exprimées par Kant à propos du droit cosmopolitique, notamment dans Vers la paix perpétuelle, publié en 1795, qui vient prolonger et affiner les conceptions avancées dans Idée d'une histoire universelle d'un point de vue cosmopolitique (1784). La formulation kantienne du droit cosmopolitique intervient à la maturité de sa philosophie critique, à l'apogée des Lumières allemandes, elle est particulièrement aboutie et plus réaliste qu'on ne le lui a reproché. Mais il faut en premier lieu définir ce que Kant entend par droit cosmopolitique. Il semblerait que Kant voit dans le droit cosmopolitique le droit de l'étranger à ne pas être traité en ennemi, dans une société qui n'est pas la sienne. Il s'agirait donc en quelque sorte d'un droit de visite, dont Kant aura à cœur de développer le principe. Mais, au-delà d'un droit de visite, c'est un droit à l'échange réciproque entre les peuples, ce que d'aucuns ont appelé un droit du commerce international avant l'heure. Kant ne voit donc pas dans le droit cosmopolitique la source d'une homogénéité des peuples sur un plan international (il refuse l'idée d'un état métanational), mais plutôt une reconnaissance au sein de chacun d'eux de « droits inaliénables » du visiteur, afin de préparer la paix universelle dont Kant est convaincu qu'elle est l'horizon de l'homme, inscrite dans les projets indicibles de la Nature, inévitable à terme. Pour permettre l'institution, ou plutôt l'institutionnalisation d'un droit cosmopolitique librement consenti par les états, Kant est amené à penser que ces états ne peuvent qu'avoir une forme républicaine, thèse qu'il faut mettre en relation avec la valorisation du droit qu'il développera par la suite (notamment dans sa Doctrine du droit, parue en 1796). Ainsi, et seulement ainsi, les hommes pourront passer de l'état de guerre permanent à une situation de paix perpétuelle. L'idée de droit cosmopolitique s'articule ainsi chez Kant sur une double thématique : celle de sa conception d'un horizon « naturel » (et donc absolu) que constitue la paix universelle (I), renforcée par sa réflexion sur les moyens de l'établissement d'une telle situation (II).
[...] On retrouve ici la dialectique de la guerre et de la paix développée auparavant. En dégageant les différentes formes d'un état (selon la manière dont le chef gouverne et selon la forme du gouvernement), Kant évacue opte pour le système représentatif car pour lui le législateur ne peut être, en une seule et même personne, en même temps l'exécuteur de sa volonté et évacue la démocratie car selon lui tous veulent y être le maître Il considère donc que le personnel politique doit être restreint tout en représentant le plus de citoyens possibles. [...]
[...] L'idée de droit cosmopolitique s'articule ainsi chez Kant sur une double thématique : celle de sa conception d'un horizon naturel (et donc absolu) que constitue la paix universelle renforcée par sa réflexion sur les moyens de l'établissement d'une telle situation (II). I. L'idée présente chez Kant d'un horizon inévitable et fondamentalement naturel d'une paix perpétuelle est déterminante dans la formulation, dans sa pensée, d'une véritable philosophie politique découlant d'une certaine philosophie de l'histoire. Cette philosophie passe par la conceptualisation d'un dynamisme irrésistible de la nature relayé par l'absolu kantien du droit A. [...]
[...] Or cette moralité nécessaire se traduit pour Kant par le droit, destiné à régir les rapports des hommes entre eux, et par conséquent à fonder la paix universelle. Ce pacifisme juridique résulte de l'idée que le droit est mû par une force intrinsèque qui le dirige vers le droit cosmopolitique. Ainsi l'histoire des actions humaines serait orientée par l'idée du droit. Cette conception du droit peut être mise en relation avec l'idée de liberté chez Kant, car l'état de paix doit être considéré comme la coexistence maximale, républicaine, des libertés, ce rapport des libertés entre elles tel que leur exercice les maximise mutuellement (cf. [...]
[...] Cette expérience échouera du fait notamment d'un principe d'organisation interne exclusif et de la volonté de certains de ses membres de rompre le pacte originel qui l'a fondée. En conséquence, il semble plus approprié de considérer que la pensée de Kant sur le droit cosmopolitique peut se résumer à l'affirmation la paix est le droit et non le droit est la paix comme le pensait Fichte. Ainsi le droit cosmopolitique (condition de la paix perpétuelle) doit pour Kant résulter d'un certain état des mentalités, l'aboutissement de la raison et de la moralité. [...]
[...] Cette fédération basée sur le droit devrait passer par une alliance de paix beaucoup plus forte qu'un simple traité (qui signifie la fin d'une guerre), un contrat mutuel des états qu'exige la raison, du haut du trône du pouvoir moral législatif suprême Pour Kant, l'arrivée à cet état de droit international participe du processus de civilisation, et l'on retrouve ici l'idée kantienne de progrès naturel vers la prééminence de la raison et de la moralité par le droit. Le droit cosmopolitique est l'aboutissement du progrès de la morale et de la pacification des mœurs. [...]
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