Le 17 juin 1789, les députés du Tiers-Etat se réunissent en Assemblée Nationale; face à la volonté du Roi d'imposer des représentants du clergé et de la noblesse et d'empêcher le rassemblement des représentants du Tiers, les députés prêtent alors le serment du jeu de Paume, jurant solennellement « de ne jamais se séparer, et de se rassembler partout où les circonstances l'exigeront, jusqu'à ce que la constitution du royaume soit établie et affermie sur des fondements solides ». Face à cette détermination, le Roi leur accorde le droit de se réunir en une Assemblée Nationale Constituante avec les deux autres ordres le 9 juillet 1789.
« Que l'assemblée s'occupe […] de la rédaction des droits de l'homme et du citoyen […] qui servira de base à toutes les lois, soit politiques, soit civiles » écrivait la noblesse de Béziers dans ses cahiers de doléances; aussi la constituante va-t-elle s'atteler à s'accorder sur une déclaration dont le but est « de sortir de l'ignorance, de l'oubli et du mépris » les droits « naturels, inaliénables et sacrés de l'homme », finalement adoptée le 26 août 1789.
Cette Déclaration des droits de l'homme et du citoyen est aujourd'hui encore reconnue comme fondamentale, et, s'il est vrai qu'elle n'est pas la première déclaration de droits (on peut évoquer la Magna Carta de 1215, le Bill of Rights de 1689 ou encore la Déclaration d'indépendance des Etats-Unis du 4 juillet 1776), force est de constater son influence universelle, consacrée par la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée le 10 décembre 1948 par les pays membres de l'Organisation des Nations Unies et qui reprend ou reformule les 17 articles, y adjoignant des droits sociaux et culturels qui n'étaient pas évoqués en 1789.
Qui plus est, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 n'est pas seule; en 1793, en 1795, en 1848 puis en 1946, d'autres déclarations seront rédigées: cependant, aucune ne parviendra à formuler de manière aussi élégante, simple et limpide les droits de l'homme que l'aïeule de 1789, ce qui explique, au moins en partie, que la Déclaration de 1789 fasse maintenant partie de la Constitution de notre République, adoptée en 1958, où elle siège en bonne place dans le Préambule.
Pour autant, quel rôle joue la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dans l'histoire constitutionnelle française ? N'existe-t-il pas d'ailleurs plusieurs déclarations ? N'a-t-elle qu'une valeur philosophico-politique, ou bien également une valeur juridique ? Quel est le statut de ces déclarations de droits dans les diverses constitutions élaborées depuis la Révolution, en particulier celle de la Vème République ?
Manifestement, et ce malgré les périodes d'autoritarisme qui vont succéder à la Révolution, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen va transmettre des principes aux Constitutions des différents régimes qui vont obliger leurs rédacteurs à repenser le droit et à s'interroger sur les notions de liberté, d'égalité devant la loi, de souveraineté populaire et de séparation des pouvoirs: cependant, le statut juridique de la déclaration va, au cours de l'histoire du droit français, gagner inéluctablement en importance dans son intégration à la Constitution et sa reconnaissance comme part intégrante du « bloc de constitutionnalité ».
[...] Du texte de la Déclaration se dégage une logique d'incomplétude (Claude-Albert Colliard) qui motive les conquêtes ; en aucun cas la Déclaration n'apparaît comme un texte achevé, figé. La nature de la Déclaration de 1789 reste, de ce fait même, incertaine ; s'agit-il uniquement d'un traité de droit naturel, qui ne possèderait qu'une valeur philosophico-politique, ou bien également d'un code de règles positives ? En effet, tandis que certains articles possèdent un caractère précis et impératif nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit décrète l'article d'autres proclament des idées générales vagues la loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société dit l'article 5). [...]
[...] La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen proclame explicitement l'égalité devant l'impôt ; le Directoire et le Consulat vont donc s'efforcer de mettre en place un système fiscal conforme aux prescriptions des déclarations. Les principes de réalité de l'impôt (on frappe des biens, des situations mais pas des personnes), de proportionnalité (pourcentage d'imposition et non valeur fixe) et de neutralité (l'impôt doit remplir les caisses de l'Etat, il ne doit pas servir à l'obtention de résultats économiques ou sociaux) sont alors établis ; mais au début du XXème siècle, l'impôt de proportionnel devient progressif (il remplace l'égalité en proportion des facultés par l'égalité en sacrifice), et de neutre devient un impôt de redistribution. [...]
[...] Mais cette séparation des pouvoirs est si marquée qu'elle entraîne une paralysie du gouvernement, donnant lieu à de nombreux coups d'Etat, dont celui du général Bonaparte le 18 Brumaire. La Constitution du 13 décembre 1799 qui instaure le Consulat va donc morceler le pouvoir législatif en le divisant en 4 organes distincts (Tribunat, Conseil d'Etat, Corps Législatif et Sénat) ; le pouvoir exécutif est partagé entre les trois Consuls, mais en réalité le Premier Consul en est le seul détenteur ; la Constitution de l'An X août 1802) va encore affaiblir le pouvoir législatif et renforcer l'autorité de Bonaparte (dissolution du Tribunat et du Corps Législatif avec l'accord du Sénat), qui devient Premier Consul à vie et contrôle entièrement le Sénat. [...]
[...] Bien qu'aucun des partisans d'un tel changement ne se soit exprimé sur le sujet, gageons que dans le Préambule de cette Constitution, nous retrouverons cette Déclaration. Et, - preuve ultime de sa valeur - nous ne pouvons tous que l'espérer. Bibliographie Conseil Constitutionnel (Colloque des 25 et 26 mai 1989), La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen et la jurisprudence, Presses Universitaires de France Colliard, Claude-Albert (Colloque des 6,7 et 8 mars 1989 présidé par), La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; ses origines, sa pérennité, La Documentation française Zarka, Jean-Claude, Histoire Constitutionnelle de la France de 1789 à nos jours, Gualino Amson, Daniel, Droit constitutionnel : Histoire constitutionnelle française (1789-1958). [...]
[...] Le Président de la République partage l'initiative des lois avec les assemblées, nomme les ministres avec l'accord des assemblées et peut dissoudre la Chambre des députés avec l'appui du Sénat, mais il est irresponsable. Le cabinet, avec à sa tête un Président du Conseil, est responsable devant le Parlement. Le pouvoir législatif se partage donc entre la Chambre des députés et le Sénat qui ont exactement les mêmes pouvoirs (élaboration des lois et contrôle de l'action du gouvernement), mais gagnent sans cesse en importance, suscitant ainsi l'antiparlementarisme au sein de toute une partie de l'opinion publique française. [...]
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