La loi possède plusieurs significations, variables selon les périodes historiques et les différents régimes politiques. Deux définitions principales lui sont rattachées : l'une lui donne un sens matériel, l'autre formel. La loi matérielle est un acte juridique à valeur abstraite, à portée générale et de caractère permanent. Elle désigne donc toute règle de droit (ou « norme » dans le vocabulaire juridique moderne). On peut y inclure les règlements pris par le pouvoir exécutif, les traités internationaux… La loi formelle au contraire désigne exclusivement les lois émanant du pouvoir législatif, dans nos régimes modernes le Parlement. Il existe des lois au sens formel qui ne sont pas des lois au sens matériel car elles n'ont pas abstraites, ou générales, ou permanentes. C'est le cas par exemple d'une loi votée par l'Assemblée Nationale en France visant à organiser à une date précise des funérailles nationales pour un individu particulier. On peut aussi définir l'autorité de plusieurs façons possibles. La première définition, la plus évidente, est le fait de posséder un pouvoir sur autrui afin de se faire obéir. Elle désigne aussi dans une deuxième définition l'influence que l'on peut avoir sur autrui grâce à un certain crédit, on parle alors « d'autorité morale ». Cela se rattache à la distinction que l'on opère entre « avoir de l'autorité » et « être l'autorité ».
Il est assez naturel dans notre esprit de lier autorité à loi. Depuis que les Etats ont renoncé à la force pour maintenir la paix sociale et qu'ils se sont autolimités dans des règles de droit (on parle d'Etat de droit), la loi s'est associée à l'idée de souveraineté, de toute-puissance et donc d'autorité à la fois réelle et morale. Cedant arma togae disait Cicéron : que les armes cèdent à la toge. Il nous est naturel de voir l'Etat user de son « monopole de la violence physique légitime » (M. Weber), et donc de devoir respecter la loi au nom de l'intérêt général. Si l'on se pose la question de l'autorité de la loi, c'est donc qu'on laisse de la place à sa possible remise en cause.
Dans quelle mesure l'autorité de la loi connaît-elle une certaine perte de vitesse dans le système juridique français de nos jours ?
Si la loi possède une autorité naturelle, une force obligatoire qui s'impose, car posée au centre de notre ordre juridique (I), elle connaît cependant une nette perte d'efficience de cette autorité qu'elle soit réelle ou morale (II).
[...] Une règle n'est pas juridique par nature (exception faite de certaines comme le Code de la Route). Elle devient règle de droit lorsque l'Etat la rend obligatoire et lui intègre un système de sanctions[1]. Jean Carbonnier donne ainsi l'exemple de l'interdiction de fumer : Dans le métro, la défense de fumée procède du droit ; ailleurs, de la politesse ou de l'hygiène. Il faut donc que la sanction émane de l'Etat, pour rendre la règle différente de la règle religieuse ou de la règle morale. [...]
[...] Cedant arma togae disait Cicéron : que les armes cèdent à la toge. Il nous est naturel de voir l'Etat user de son monopole de la violence physique légitime (M. Weber), et donc de devoir respecter la loi au nom de l'intérêt général. Si l'on se pose la question de l'autorité de la loi, c'est donc qu'on laisse de la place à sa possible remise en cause. Dans quelle mesure l'autorité de la loi connaît-elle une certaine perte de vitesse dans le système juridique français de nos jours ? [...]
[...] Pourquoi une telle perte de vitesse du législateur et donc de la loi s'est-elle opérée ? Après la Seconde guerre mondiale, le légicentrisme est désavoué. Les régimes totalitaires qui se sont placés au pouvoir sur la base du droit, et qui se sont entourés d'un appareil de lois sophistiqué, ont montré le caractère dangereux d'une toute puissance de la loi. C'est pourquoi la Constitution de 1958 désacralise en quelque sorte la loi, en l'encadrant fortement. Elle la limite de façon exclusive (article de telle sorte que l'on a pu dire que la loi devenait l'exception du processus législatif et surtout elle met en place un contrôle de constitutionnalité qui se développe fortement (et qui permettra notamment d'intégrer dans le bloc de constitutionnalité les déclarations des droits de l'homme, comme c'est le cas dans la plupart des pays étrangers après la Seconde guerre mondiale ; c'est une autre marque des barrières que l'on pose désormais à la loi). [...]
[...] C'est ce que Jean Carbonnier nomme l'inflation législative : un nombre considérable de lois (au sens matériel, car les règlements, les décrets, et même le droit communautaire connaissent aussi une multiplication de textes) est pris chaque année, de façon croissante. J. Carbonnier parle de passion du droit ; on légifère ou on règlemente de plus en plus, parfois (voire souvent) inutilement car il existe une norme antérieure traitant du problème, ou on réforme des lois préexistantes, ce qui introduit de l'instabilité et une perte en qualité. Surtout, l'inflation législative va de pair avec une complexification de la loi. Or celle-ci nuit fortement à l'autorité de la loi pour deux raisons principales. [...]
[...] Comment remédier à la perte d'efficacité de l'autorité de la loi ? François Terré parle d'une perte de la normativité : cela signifie pour lui qu'il faut recentrer les lois formelles, les lois du Parlement, sur les domaines purement normatifs. Il préconise (et le Conseil Constitutionnel a depuis peu reconnu ce principe[9]) de censurer les lois non normatives, tandis que les lois à portée normative incertaine sont sujettes à des réserves d'interprétation du Conseil Constitutionnel. De même une proposition récente de réforme constitutionnelle de M. [...]
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