Vie parlementaire et clivages politiques sous la Restauration (1814-1830)

Extraits

[...] En fait, Charles qui croit avoir démontré qu'il n'est pas possible de composer avec les libéraux sans qu'ils ne fassent preuve de prétentions exorbitantes, décide d'interrompre l'expérience des concessions. À l'été 1829, il se sépare de Martignac et nomme à sa place le prince Jules de Polignac. Désormais, les choses sont claires : le roi a choisi de former un ministère chargé de gouverner sans la majorité des Chambres Le ministère Polignac, ou le retour périlleux des « ultras » (1829- 1830) Le choix de Polignac, ancien émigré et dévot, marque le retour des ultras au pouvoir. [...]

[...] La presse ultra se déchaîne contre Decazes, qu'elle rend responsable du meurtre. Il est contraint à la démission et remplacé par le duc de Richelieu, dont le second ministère (févr. 1820-déc. 1821) inaugure une décennie de réaction ultra aux lourdes conséquences pour le régime. II. La réaction des « ultras » (1820-1830) A. [...]

[...] Eux acceptent la Charte, dont ils réclament une application loyale. Peu nombreux (leurs adversaires aiment à répéter que l'ensemble du parti « constitutionnel » peut s'asseoir sur un seul canapé), ils sont avant tout des intellectuels en politique. Familiers de Decazes, ils rédigent des projets, écrivent parfois les discours des ministres, car on compte dans leurs rangs des plumes brillantes, souvent issues du monde universitaire (Royer-Collard, Victor Cousin, et surtout François Guizot). Considérant que la Révolution a provoqué l'apparition d'une société égalitaire en droit, faisant la part belle aux classes moyennes, ils estiment que le pouvoir politique doit nécessairement tenir compte de cette nouvelle situation, ne serait-ce que pour stabiliser le processus à ce stade et éviter qu'il ne s'approfondisse. [...]

[...] Au total, l'histoire de la Restauration, c'est donc l'histoire d'une greffe qui n'a pas pris, le pays se montrant hostile au mélange d'Ancien Régime et de nouveaux principes que les frères de Louis XVI ont tenté d'acclimater en France – surtout, d'ailleurs, lorsque l'équilibre paraît basculer au détriment des seconds. Les événements de 1830 devaient du reste montrer combien les « doctrinaires » ont raison quand ils affirment que l'immense majorité des Français est désormais indéfectiblement attachée à la société que la Révolution a fait naître. [...]

[...] Vie parlementaire et clivages politiques sous la Restauration (1814-1830) I. Le gouvernement des « constitutionnels » (1816-1820) A. Les différentes familles politiques Il n'existe pas alors de parti politique au sens moderne du mot. Mais on peut distinguer, au cours de la Restauration, différents groupes d'hommes partageant un idéal et siégeant ensemble à la Chambre des députés, plus ou moins durablement Les « ultras » À droite siègent les ultras, qui partagent une haine passionnée de la Révolution française. Fortement influencés par la pensée de Joseph de Maistre (1753-1821) et de Louis de Bonald (1754-1840), ils estiment qu'il existe un ordre divin des choses, aussi bien dans le monde biologique que dans le monde politique : la Révolution est donc monstrueuse dans son principe, puisqu'elle est une tentative pour s'écarter des voies tracées par la Providence. [...]