Pouvoir politique, pouvoir judiciaire, philosophie des Lumières, séparation des pouvoirs, Montesquieu, arbitraire, volonté générale, désacralisation du pouvoir, pouvoir divin
Il n'est pas de société qui ne connaisse le pouvoir : même les sociétés archaïques, "sociétés sans État", connaissent l'autorité au moins symbolique du chef, et même le pouvoir du chef de guerre. Mais "le" pouvoir existe sans doute moins que "les" pouvoirs, car le pouvoir est d'une nature essentiellement plurielle. Le pouvoir social de l'entrepreneur n'est pas équivalent au pouvoir du citoyen électeur d'une démocratie ni celui-ci au pouvoir du dirigeant qu'il contribue à installer... au pouvoir.
[...] Il n'est pourtant pas le premier en un sens à recourir à cette séparation. C. Pouvoir, autorité Ce que discerne Montesquieu, c'est la nécessaire indépendance de la justice par rapport au politique pour prémunir le risque d'arbitraire, cet arbitraire qui est incarné aux yeux des modernes par ce que nous appelons désormais les « procès politiques ». Ce qui est donc en jeu chez Montesquieu, ce n'est pas une théorie, une parmi d'autres, mais bien une vision fondamentale, la vision moderne, des rapports entre judiciaire et politique. [...]
[...] D'une part, le pouvoir n'est plus d'essence divine. Il appartient donc aux hommes ; c'est essentiellement la leçon de Machiavel. Il n'y a pas de morale du pouvoir, simplement une efficacité du pouvoir politique qui se maintient. D'autre part, à partir du XVIIIe siècle, cette autonomie du pouvoir politique par rapport à une conception sacrale est conçue de manière démocratique en ce sens que c'est l'ensemble du peuple qui doit convenir de ses destinées politiques. Sans être forcément démocratique, au sens strict du pouvoir populaire, cette conception implique que le pouvoir est issu de ce que Rousseau appelle « la volonté générale ». [...]
[...] Ce n'est pas que la politique soit forcément injuste. Mais plutôt le rapport entre justice et pouvoir n'est plus exactement le même. Alors que c'est parce qu'il est légitime que le prince détient le pouvoir de justice, pour les modernes, c'est parce qu'il est conforme à la justice que le pouvoir est légitime. Autrement dit, essentiellement à partir des Lumières, la justice fonde le pouvoir, et non l'inverse. C'est pourquoi le pouvoir de juger, mais aussi, celui, plus général, de faire des lois, doit être distingué du pouvoir politique compris comme le pouvoir exécutif, car il lui est antécédent. [...]
[...] Une vieille complicité Pouvoir politique et pouvoir judiciaire sont de « vieux complices ». D'emblée le monarque est justicier, il est l'autorité suprême qui décide et qui décide en justice, et non seulement en politique. Le roi traditionnel est un roi juge. L'image du roi Salomon, au jugement mythique, ou l'image du roi Louis jugeant sous son chêne sont autant de souvenirs de légende de cette fonction où s'associent étroitement le politique et le judiciaire. Par essence le roi est juge, et toute l'histoire médiévale est celle d'une conquête par les princes de l'exclusivité du droit de juger, et c'est ainsi que les cours royales, les parlements fonctionnent en appel des justices seigneuriales. [...]
[...] Le droit comme fondement du pouvoir A. La notion de la constitution Le renversement d'un prince justicier à un prince injuste s'il détient le pouvoir (l'autorité) de juger est tributaire, à l'évidence de la mutation qui affecte les sociétés occidentales à partir du XVIe siècle : la désacralisation du pouvoir, sa sécularisation. À partir où l'on ne pense plus que le pouvoir politique est le reflet du pouvoir divin, alors la justice entre les mains du pouvoir politique n'est plus un attribut, mais une possibilité de plus d'attenter aux libertés et aux droits de l'individu. [...]
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