Histoire du droit, tentation fasciste, part intellectuelle, ambition politique, valeurs démocratiques, Robert Aron, Arnaud Dandieu, revue Ordre nouveau, Thierry Maulnier, revue Combat, Revue Esprit, Izard, Marcel Péguy, politique
Emmanuel Mounier (1905-1950) quitte Grenoble à l'âge de 19 ans pour entreprendre des études scientifiques à Paris ; mais féru de littérature et de philosophie, lesquelles alimentent sa foi chrétienne non conformiste, il décide de passer l'agrégation de philosophie. Le diplôme obtenu, il renonce à l'enseignement pour embrasser une carrière d'écrivain, d'essayiste et de journaliste.
Le premier ouvrage rédigé par Mounier, en collaboration avec Izard et Marcel Péguy, est consacré au père de ce dernier. C'est en 1931 que paraît La pensée de Charles Péguy. La contribution de Mounier donne le ton de ce qui, toute sa vie, sera une forme de rejet des valeurs démo-libérales. Les valeurs et moeurs des années trente inspirent à Mounier le même dégoût qu'inspirait la Troisième République à compter de 1902. Dans son essai de 1931, Mounier a retenu de Péguy que le socialisme parlementaire de Jaurès n'est que "la dégradation de la mystique en politique" ; que la misère sociale est due aux bourgeois et à leurs valeurs médiocres, contre lesquels il en appelle, comme Péguy en son temps, à "un redressement moral, un rajeunissement spirituel".
[...] Enfin, logiquement, Marcel Péguy rappelle que contre les bourgeois politiciens, intellectuels et parlementaires, la Révolution ne peut être que « totale, globale, absolue ». C'est cette formidable œuvre de sape de la démocratie puisée chez Charles Péguy qui amènera Marcel Péguy à cautionner en 1941 un national-socialisme à la française dans un ouvrage intitulé Le destin de Charles Péguy : « La destinée de mon père a été de combattre toute sa vie pour la race française, et contre la République parlementaire, ce débordement de vice qui est venu corrompre notre race ». [...]
[...] Finalement, Drieu partage le point de vue de Drieu La Rochelle lorsqu'il conclut son article en écrivant qu'il faut « retourner contre les monstruosités du fascisme les vertus du fascisme ». Rien d'étonnant à ce que Mounier assiste avec soulagement à la chute de la Troisième République en 1940. Ni vichyste ni collaborateur, son journal demeure jusqu'en 1941 dans le champ d'attraction d'une forme de fascisme. D'abord parce qu'en 1940, sa critique de la démocratie redouble de virulence : « Nous n'avons cessé depuis notre départ de dénoncer la démocratie libérale et parlementaire. [...]
[...] Mais c'est surtout à la haine du « monde moderne » de Péguy que Mounier donne de l'ampleur. Avec l'avènement vers 1880 de la « part intellectuelle, de l'ambition politique », le socialisme et la République sont entrés dans la voie de la décadence. Mounier fait ainsi l'éloge de l'antipositivisme de Péguy, le positivisme de la Troisième République étant « la corruption de l'organique en mécanique, du mystique en politique, de la vie spirituelle en inscription sociale ». C'est pourquoi, dit Mounier en commentant Péguy, il faut « renoncer à l'illusion du progrès continu ». [...]
[...] Heureusement pour Mounier, la revue Esprit est interdite en août 1941 par Paul Marion, responsable de la censure de Vichy ; la raison en est essentiellement des articles critiques à l'égard du régime de la part des collaborateurs d'Emmanuel Mounier. Arrêté en janvier 1942, car suspecté d'avoir des liens avec le groupe de résistance Combat, il se lance dans une grève de la faim que rend populaire Radio-Londres. Il est jugé, mais acquitté, faute de preuve contre lui. Il devient une figure de la résistance et finit la guerre, réfugié dans la Drôme, sous le pseudonyme de Leclerc. Mais, mêmes résistants Mounier et les anciens cadres d'Uriage ne défendent pas la démocratie, au contraire. [...]
[...] Comme Péguy, il s'adonne à une critique véhémente de ce texte fondateur qu'est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Dans un texte de mars 1938, intitulé « Court traité de la mythique de gauche », il s'en prend vivement à cet héritage revendiqué par les radicaux et les socialistes parlementaires. Aux yeux de Mounier, c'est en effet la faiblesse philosophique qui préside aux Droits de 1789 « qui provoque aujourd'hui l'effondrement d'une certaine forme de démocratie ». Pourquoi ? [...]
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