Pourparlers en droit allemand et français : la rupture abusive exclue en cas de transmission par une partie d’une promesse de financement contractée à l’insu de l’autre partie

Extraits

[...] Dans les deux ordres juridiques allemand et français, les parties au contrat sont relativement libres lors de ces négociations pré- contractuelles. En d'autres mots, les parties peuvent décider elles-mêmes si elles veulent se lier à l'autre partie ou si elles veulent, au contraire, rompre les négociations. C'est notamment grâce au principe de la liberté contractuelle que les parties sont libres de conclure ou de ne pas conclure un contrat. À l'inverse, chaque partie peut également mettre fin aux relations pré-contractuelles suivant le principe Nul n'est contraint de s'engager. [...]

[...] Tous les grands projets européens et internationaux de refonte des contrats ou d'harmonisation du droit des contrats (Code européen des contrats (Gandolfi), Principes Unidroit, Commission Landö) s'entendent sur le fait qu'il faut établir des dispositions gouvernant le déroulement de la négociation et spécialement la rupture des pourparlers. Ces derniers entérinent tous, à l'inverse du droit français positif par exemple, une phase pré-contractuelle expressément prévue dans les textes. Or, avec le processus de la réforme du droit des contrats lancé au début de l'année, il ressort clairement que le droit français s'est inspiré de ces projets et que le droit français prospectif va probablement emprunter le même chemin que ces derniers, du moins pour ce qui est de la consécration expresse de la phase pré-contractuelle. [...]

[...] Le juriste allemand estimait que les parties sont tenues à un devoir de loyauté. Selon lui, la partie qui a pu croire légitimement à la conclusion du contrat pendant la phase pré-contractuelle, doit pouvoir obtenir réparation si l'autre partie rend la conclusion du contrat impossible par son comportement. Dans la conception allemande, le seul fait d'entamer des pourparlers dans le but de conclure un contrat établit déjà un rapport de confiance gesteigerte Vertrauensbeziehung entre les parties qui est comme un contrat en lui-même. [...]

[...] Par exemple, l'entrepreneur qui méconnait l'obligation de diligence, car son client a été blessé dans son entreprise (RGZ 78, 239). Faute commise par intention ou par négligence (Verschulden durch Vorsatz oder Fahrlässigkeit) Rupture des négociations sans raison valable (Unbegründeter Abbruch von Vertragsverhandlungen, ohne triftigen Grund). (Un exemple : BGH NJW, 1975) Cette dernière catégorie concerne les faits en l'espèce. La partie demanderesse a avancé qu'il s'agissait d'une rupture abusive des pourparlers parce que les défendeurs auraient fait légitimement croire à eux que le contrat allait être conclu. [...]

[...] En tout état de cause, le droit français des contrats est en pleine ébullition et avec la réforme à l'horizon, il est certain que ce dernier va prochainement changer notablement et probablement se rapprocher (encore) plus du droit allemand. Nombre de caractères : 19.641 Bibliographie : Ouvrages : - Rémy CABRILLAC, Droit des obligations, 8e édition, Dalloz - Rémy CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, L.G.D.J., Lextenso éditions Articles : - Laëtita RIGAULT, L'encadrement des pourparlers Petites AAffiches mai 2012, 108, pp - Reiner SCHULZE, Les divergences franco-allemandes dans la théorie du contrat Rapport de synthèse Revue des contrats octobre 2013 P - Joana SCHMIDT, L'existence de pourparlers est insuffisante à établir la réalité d'un contrat Bulletin Joly Sociétés juin 1992 P Cours : - Schuldrecht AT Das Verschulden bei Vertragsverhandlungen, Harald LANGELS. [...]