La notion de contrat d'Etat a été inventée par la doctrine pour rendre compte du développement d'une pratique contractuelle venant régir les rapports entre une partie étatique et une partie privée (en l'occurrence, une ou plusieurs entreprises). Plus précisément, la notion de contrat d'Etat s'est développée à propos des contrats d'investissement et, en particulier, des contrats d'investissements pétroliers entre Etats et concessionnaires pétroliers dans les années 1950-1960.
Cependant, la qualification de contrats d'investissement n'englobe pas parfaitement les contrats d'Etat dans la mesure où la doctrine considère généralement que ces derniers désignent des contrats dits de « développement économique », dans lesquels des obligations spécifiques pèsent sur les entreprises étrangères qui participent au développement de l'Etat d'accueil.
Au delà de cette spécificité contextuelle, le contrat d'Etat se distingue, d'une part, du contrat entre Etats et, d'autre part, du contrat administratif qui régi les relations entre une partie étatique et une partie privée dans l'ordre juridique interne de l'Etat considéré.
La différence majeure avec cette seconde catégorie de contrat procède de ce qu'en principe, le contrat administratif s'articule sur la prééminence reconnue à la partie étatique, alors que les contrats qualifiés de contrats d'Etat sont théoriquement marqués par le refus, ou du moins l'atténuation de cette prééminence, rendu visible par la présence de clauses venant protéger la partie privée :
- clauses compromissoires faisant échapper un éventuel litige aux tribunaux de la partie étatique
- clauses de stabilisation mettant le contrat à l'abri des changements de législation de l'Etat cocontractant
- clauses de droit applicable soumettant le contrat au droit d'un autre Etat que celui de l'Etat cocontractant.
Malheureusement, quand on a dit cela, on n'a encore rien dit sur le contrat international d'Etat.
Sa spécificité pourrait alors être recherchée dans une double perspective…
- par rapport au contrat d'Etat dans l'ordre national, c'est-à-dire au contrat administratif
- par rapport au contrat international classique régissant les relations commerciales de deux parties privées
… et dans la dualité de ses effets:
- sur la partie privée
- sur l'Etat.
[...] Pourtant, Bruno Oppetit avait, il y a vingt ans déjà, dégagé une triple disparité entre les parties au contrat international d'Etat : disparité économique / disparité des objectifs (la partie privée entend faire respecter strictement la loi du contrat, l'Etat entend quant à lui conserver le pouvoir de modifier le contrat de façon unilatérale) / disparité juridique (l'entreprise est régie par le droit privé, l'Etat par le droit public)[9]. Cependant depuis quelques années[10], le développement de l'arbitrage des contrats d'Etat participe, via les solutions dégagées dans les arbitrages pathologiques (Eduardo Silva Romero)[11] d'une redéfinition des modalités de ces contrats et leur confèrent de nouvelles spécificités. La partie privée : l'internationalisation du contrat d'Etat face à l'aléa de souveraineté 1. [...]
[...] C'est pourquoi j'ai choisi d'envisager la spécificité du contrat international d'Etat par contraste, en partant de l'ambiguïté première d'un contrat régissant des cocontractants appartenant à des ordres juridiques différents (à quel ordre s'intègre le contrat d'Etat puis en remarquant que celle-ci pouvait s'articuler sur deux difficultés caractéristiques que l'on ne retrouve dans aucune des deux catégories de contrat précédemment envisagées : une première, conceptuelle, déterminant une seconde, pratique. Une difficulté d'ordre conceptuel : qu'est-ce qu'un contrat international d'Etat ? 1 Le contrat d'Etat, un contrat de droit international 2 La partie étatique : l'Etat sujet de droit international comme partie au contrat d'Etat Le professeur P. Mayer a montré le premier que les contrats d'Etat sont des contrats conclus entre une personne privée (une entreprise en général) et l'Etat sujet de droit international, par opposition à l'Etat- administration[2]. [...]
[...] Lemaire, Les contrats des personnes publiques internes en droit international privé vol. thèse Paris mars 1999 (directeur de thèse P. Mayer) Les Etats et l'arbitrage international, esquisse de systématisation Revue de l'arbitrage En France, l'Etat est libre de signer un contrat international comprenant une clause compromissoire, c'est-à-dire prévoyant que tout litige sera soumis à l'arbitrage depuis l'arrêt Civ. 1ère mai 1966, Galakis. E. Silva Romero, La Dialectique de l'arbitrage international impliquant des parties étatiques, observations sur le droit applicable dans l'arbitrage des contrats d'Etat Bulletin de la Dour internationale d'arbitrage de la CCI Vol. [...]
[...] Eisennmann, Paris, Dalloz et 368 : Etat stricto sensu Dans le cas du CIRDI, la majeure partie de la procédure est inscrite dans la Convention de Washington, ce qui en fait une procédure arbitrale régie par le doit international et les tribunaux CIRDI disposent de voies de recours autonomes des juridictions étatiques. J. Combacau, S. Sur, Droit international public, Paris, Montchrestien D ; Anzilotti, Cours de Droit international, t Paris, Sirey traduction Gidel, reprise Université Panthéon-Assas (Paris collection les Introuvables 53-54. [...]
[...] L'argument sous-tendant l'ensemble de la démarche est un argument de souveraineté, en tant que cette dernière tombe lorsqu'un Etat se soumet à un droit étranger ou à des arbitres internationaux. La partie étatique peut donc recourir à des techniques de nationalisation du contrat : en amont même de la signature du contrat, certains Etats exigent de leur cocontractant privé étranger qu'il constitue une filiale régie par leur droit interne comme condition à la passation d'un marché public. Une fois le litige né, les parties étatiques tentent généralement de se prévaloir de la localisation du projet sur leur territoire, invoquent l'immunité de juridiction ou d'exécution, refusent de participer à la procédure arbitrale, s'opposent au déroulement normal de cette procédure en faisant des objections à la compétence des arbitres, allèguent que le fonctionnaire ou l'émanation de sa propre personne ayant souscrit au contrat d'Etat comprenant la clause d'arbitrage n'était, en droit interne, pas habilité à le faire, défendent l'intérêt public (ex : affaire CCI dans laquelle une partie étatique ne disposait pas des ressources en électricité nécessaires pour subvenir aux besoins de sa population en l'absence de pluie. [...]
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