Jusqu'où peut-on déléguer ses compétences, à une organisation, par exemple, comme l'Union Européenne, sans faire deuil de sa souveraineté ? Qu'est-ce qui fait la souveraineté d'un Etat, si celui-ci peut abandonner les compétences qu'elle lui confère ? On voit que l'on se trouve ici dans une sorte d'impasse définitoire. Ainsi, afin de ne pas tomber dans les contradictions que tend à créer le concept de souveraineté, il est peut-être nécessaire de lui donner une autre définition, qui ne serait pas uniquement basée sur la notion de compétences. Dès lors, si la souveraineté de l'Etat établit à son profit une présomption de compétences, l'énumération de celles-ci ne suffit pas à qualifier la souveraineté dans son essence
[...] Par conséquent, peut-on se satisfaire d'une définition de la souveraineté qui ne serait basée que sur l'énumération de ces compétences ? N'existe-t-il pas un autre substrat, un autre paradigme, sur lesquels faire reposer la notion de souveraineté ? II . l'énumération de ces compétences ne suffit pas à qualifier la notion de souveraineté Tout d'abord, il semble nécessaire de lier, comme le fait Pierre-Marie Dupuy, la notion de souveraineté et celle d'indépendance. Cette liaison est double. D'une part, l'indépendance de l'Etat apparaît comme la condition de sa souveraineté : il n'y a pas d'Etats souverains qui ne soient indépendants, et c'est ainsi que l'Etat du Mandchoukouo n'a pu être considéré comme un Etat souverain, puisqu'il était dépendant. [...]
[...] Il jouit également de la souveraineté économique, c'est-à-dire qu'il a la capacité de conduire l'économie nationale, selon les options politiques qu'il a choisies. D'autre part, l'Etat souverain jouit de compétences personnelles, qui ne désignent pas les compétences qu'il exerce à l'égard des personnes vivant sur son territoire, mais celles qu'il exerce à l'égard des personnes liées à lui par la nationalité. L'Etat a donc la compétence de l'attribution de la nationalité. Enfin, l'Etat dispose de compétences internationales, comme tous les autres sujets de droit international : il peut agir dans le cadre des relations internationales. [...]
[...] Toutefois, elle ne l'est pas tant, semble-t-il, du fait de la non reconnaissance par certains Etats de sa souveraineté, mais par ce que l'on peut se demander si Taiwan s'est réellement proclamé indépendant et souverain, tout du moins uniquement sur son territoire (car il s'est proclamé souverain sur le territoire de la Chine tout entière). Conclusion Ainsi, on ne peut dire, semble-t-il, que la souveraineté se réduit à un faisceau de compétences. Le statut de souverain confère à l'Etat certaines compétences, aussi bien dans l'ordre interne qu'international. Toutefois, le contenu de la souveraineté peut être variable, est susceptible de plus et de moins. [...]
[...] En effet, il ne semble pas que la souveraineté prenne des formes identiques selon tous les Etats, selon leur taille, par exemple, leur puissance, ou leur degré d'intégration dans des organisations internationales ou régionales. Peut- être peut-on définir la souveraineté, en définitive, et en sus de tous les éléments que nous avons avancés, par une certaine attitude des Etats souverains eux-mêmes. Pour qu'un Etat soit souverain, il lui faut ce que l'on pourrait appeler un animus, une volonté d'être souverain. L'Etat souverain doit donc vouloir sa souveraineté, par un acte de volonté affirmant son indépendance. [...]
[...] On peut dire en effet que la souveraineté d'un Etat a un contenu variable, que les compétences de l'Etat peuvent être plus ou moins étendues. C'est pourquoi il ne semble pas juste de parler d'Etats semi-souverains en parlant de certains Etats minuscules même si de fait, politiquement ou économiquement, ces Etats sont moins puissants et ont moins de compétences que d'autres Etats. Si la souveraineté est un ensemble de compétences, son contenu peut varier, et il ne semble pas, juridiquement, que l'on puisse dire qu'il existe un noyau irréductible de la souveraineté, ni que l'on puisse déterminer une limite, une frontière, qui, en matière de compétences, séparerait les Etats souverains de ceux qui ne le seraient qu'à moitié. [...]
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