erga omnes, obligations erga omnes, droit international, actio popularis, jus cogens, CIJ Cour Internationale de Justice, arrêt Barcelona Traction, principe de non intervention
Depuis l'arrêt de la C.I.J. en l'affaire Barcelona Traction, peu de termes ont connu une faveur auprès des auteurs s'intéressant à la protection internationale des droits de l'homme, comme celui d'actio popularis. Traditionnellement, le principe de l'actio popularis en défense d'une norme consacrée n'est pas une situation "normale", naturelle en droit international public. Comme le dit le Juge Jessup, pourtant partisan de la reconnaissance de l'actio popularis dans certains domaines de la matière, « il n'y a pas d'actio popularis généralement établie en droit international ».
Dans son opinion dissidente à l'arrêt de la C.I.J. de 1962 relatif au Sud-ouest Africain, le juge Winiarski déclare quant à lui qu'« on a invoqué à cette occasion une institution du vieux droit pénal romain appelée actio popularis, qui est cependant étrangère aux systèmes juridiques modernes de 1919-1920 et au droit international ». Si l'actio popularis signifie, dans le cadre international, que tout État a qualité pour introduire un recours contre un autre devant un tribunal ou un organe quasi juridictionnel international sans qu'il soit besoin que l'État défendeur accepte préalablement la juridiction du tribunal ou la compétence de l'organe, il est certain que cette situation n'est pas la règle en droit international.
[...] Stern, et qui concerne les droits de l'homme pour l'essentiel, c'est précisément cette virtualité de l'actio popularis dont on a fait état. Pour le Professeur Verhoeven, « à supposer que la violation des droits de l'homme devienne l'objet d'un différend entre États, l'on revient alors aux procédures habituelles de règlement pacifique, qui privilégient massivement toutes formes de conciliation interétatique, en excluant par ailleurs toute actio popularis ». Pour cet auteur, il n'y a rien de particulièrement choquant à admettre l'actio popularis, du point de vue théorique, pour la défense des droits de l'homme ; seulement, il faudrait nettement faire le départ entre les considérations de pure théorie juridique et le droit positif, entre la lex ferenda et la lex lata, étant entendu que pour lui les enseignements que l'on peut tirer de l'affaire Barcelona Traction en termes d'actio popularis relèvent de la lex ferenda, ce qui est sans doute juste. [...]
[...] En effet, l'obligation de se présenter devant un tribunal international pour un État ne relève pas du droit international général, indépendamment de tout engagement, la juridiction d'un tribunal international vis-à-vis d'un État ne se présume pas, n'est pas automatique, actuellement, elle doit toujours être explicitement prévue et acceptée par l'État en cause. C'est du reste le sens des clauses facultatives de juridiction obligatoire qui existent actuellement en droit international. Sur le problème de l'actio popularis, la jurisprudence internationale est demeurée indécise. On a cru voir dans l'arrêt de la C.P.J.I. sur l'affaire du vapeur Wimbledon une consécration de l'actio popularis. Toutefois, cette façon de voir a été battue en brèche, de façon convaincante, par d'autres auteurs. [...]
[...] C'est avec raison que le Professeur Dupuy écrit, à propos des travaux de l'Institut du Droit International sur les droits de l'homme et le principe de non-intervention, que « c'est se placer au-delà des intérêts nationaux, c'est une sorte d'actio popularis, une manière d'ordre public mondial des droits de l'homme qui se trouve ainsi affirmée dans la résolution de l'Institut du droit international ». M. Tran Van Minh juge également qu'à partir de l'arrêt Barcelona Traction, « il est possible de penser que le droit d'intervention est ouvert à tous puisque l'obligation de respecter les droits de l'homme est une obligation à l'égard de tous les États et non seulement envers sa population ». [...]
[...] Cela semble fâcheux, en effet, il eût mieux valu reconnaître la qualité pour agir en justice à tous les États en cas de violation des obligations erga omnes, dont l'obligation de respecter les droits de l'homme, plutôt que de s'appesantir sur l'intérêt pour agir qui, en matière de droits de l'homme, semble un peu inapproprié, si tant est que l'intérêt pour agir signifie « l'avantage que procurerait au demandeur la reconnaissance par le juge de la légitimité de sa prétention ». Cela signifie qu'il faut aller dans le sens de l'actio popularis, en la consacrant clairement et non en l'obtenant par des procédés d'interprétation forcée d'espèces jurisprudentielles plus ou moins explicites. [...]
[...] Penser à l'intervention d'humanité quand on parle d'actio popularis, même si c'est pour la récuser, ne peut qu'entretenir la confusion dans les esprits. Un autre auteur, considérant que la conséquence logique de l'établissement des obligations erga omnes réside dans l'objectivation et l'universalisation de l'intérêt pour agir écrit que « les utilisations abusives éventuelles d'une actio popularis violente à laquelle peuvent aboutir ces thèses ont nourri les craintes d'une grande partie de la doctrine : tout État peut-il désormais arguer de la violation d'une obligation erga omnes pour refuser d'honorer ses engagements en guise de contre-mesure ». [...]
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