Suite à la décolonisation, il s'est avéré nécessaire en droit international, de trouver et d'organiser l'application des principes qui allaient permettre de gérer au mieux l'accession à l'indépendance d'Etats nouveaux. Il s'agissait surtout de résoudre la question des délimitations frontalières d'Etats à la souveraineté nouvelle donc fragile, dont il fallait assurer la stabilité.
La solution adoptée par les Etats d'Amérique latine dont la Bolivie, dans sa déclaration d'indépendance de 1825, a été d'appliquer le principe de l' « uti possidetis juris de 1810 » dès qu'ils ont acquis leur souveraineté. En effet, il était nécessaire d'organiser un ordre nouveau après le départ de l'Empire espagnol, tout en s'assurant qu'il n'y aurait pas de terra nullius que d'autres empires voudraient s'approprier à l'avenir, et en réduisant les risques de guerres entre les Etats frontaliers.
Les Etats d'Amérique hispanique se sont eux-mêmes inspirés d'un principe du droit romain « uti possidetis, ita possideatis » qui signifie : « comme tu as possédé, tu continueras à posséder », devenu selon leur reformulation, « selon que vous possédez ».
Mais ici, l'uti possidetis juris a été défini comme règle de transmission au nouvel Etat des frontières laissées par le colonisateur. En cas de substitution de la souveraineté du fait de la décolonisation, les frontières établies par le prédécesseur s'imposent au successeur au moment du transfert territorial. La date de 1810 fut trouvée de manière assez arbitraire, ce qui montre l'empressement de trouver une solution permettant d'instaurer des frontières de la manière la plus pacifique.
Longtemps considéré comme une règle coutumière d'application régionale, l'uti possidetis juris sera appliqué aux Etats issus des décolonisations en Afrique. En effet, il semblait avoir prouvé son efficacité pour le maintien de la paix, tout en s'écartant de sa définition initiale du droit romain.
Mais de quelle manière l'évolution et la généralisation du principe ont-elles conduit à ce que son utilité ait été reconnue même hors du contexte postcolonial?
Alors, il faudra expliquer comment la reconnaissance de l'universalité du principe a permis son utilisation même hors du contexte de décolonisation (I), et ceci jusqu'à l'appliquer dans des situations assez différentes dont les dissolutions d'Etats fédérés en Europe sont des excellents exemples (II).
[...] Son adoption ne serait pas toujours propre à apaiser les tensions, comme l'indiquent J.- M. Sorel et R. Mehdi. De plus, selon une partie de la doctrine, le fait d'avoir énoncé cette norme comme solution pour délimiter les frontières de l'ex- Yougoslavie, revenait à donner un caractère colonial à cet Etat, puisqu'avant sa dissolution, une Commission au rôle d'«administrateur», décidait de la manière de tracer les futures frontières. Torres Bernardez nie l'utilité de l'application automatique du principe aux cas de dissolutions. [...]
[...] Ils ont compris que l'application de l'uti possidetis juris était tout à fait dans leur intérêt. Le cas de la dissolution de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie . Alors que son éclatement est apparu inévitable, la question de la délimitation des frontières des Etats dont les souverainetés allaient résulter de cette dissolution s'est posée. L'avis du 11 janvier 1992 de la Commission d'arbitrage instituée dans le cadre de la Conférence pour la paix en ex-Yougoslavie, dite Commission Badinter, a voulu y apporter les solutions juridiques appropriées, à l'occasion d'une réponse à la question que posait la République de Serbie sur la validité de ses frontières avec la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. [...]
[...] En effet, il semblait avoir prouvé son efficacité pour le maintien de la paix, tout en s'écartant de sa définition initiale du droit romain. Mais de quelle manière l'évolution et la généralisation du principe ont-elles conduit à ce que son utilité ait été reconnue même hors du contexte postcolonial? Alors, il faudra expliquer comment la reconnaissance de l'universalité du principe a permis son utilisation même hors du contexte de décolonisation et ceci jusqu'à l'appliquer dans des situations assez différentes dont les dissolutions d'Etats fédérés en Europe sont des excellents exemples (II). [...]
[...] Ce sont les règles du droit international général qui doivent alors s'appliquer, d'où l'importance de l'uti possidetis juris. En effet, dans l'affaire du différend frontalier entre le Bénin et le Niger, la Cour considère que l'uti possidetis juris s'applique pour compléter ou suppléer des titres juridiques incertains ou absents L'uti possidetis juris a bénéficié de la reconnaissance de sa généralité, contrairement au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, qu'il a souvent écarté. Alors, parce que le principe est lié aux accessions à l'indépendance, il a pu être redéfini et réutilisé dans des contextes nouveaux. [...]
[...] Alors, la Cour justifie sa position par l'équité que peut offrir cette solution. Elle réside dans l'application d'un principe objectivement équitable et non dans une appréciation subjective, donc discutable, de la situation. Par ailleurs, l'évocation, entre autres, de cette règle a permis de déclarer l'invasion du Koweït par l'Irak illicite aux yeux du droit international, les frontières ne pouvant être modifiées de manière discrétionnaire par la force. Le principe aide alors le rétablissement de la «légalité internationale». Des positions sécessionnistes sont aussi apparues en Belgique, au Canada, en Espagne ou en Italie. [...]
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