La polémique suscitée par l'arrêt « E.B contre France » rendu par la Cour Européenne des Droits de l'Homme le 22 janvier 2008, dans lequel elle consacre la violation par la France du droit au respect de la vie privée causée par le refus de l'adoption par une femme homosexuelle témoigne des enjeux importants autour du mécanisme européen de protection des droits de l'homme. La Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales instaure un mécanisme de protection des droits de l'homme et une garantie dont l'ampleur et l'effectivité sont sans pareil au niveau international. Des droits civils et politiques, dit de « première génération », s'accompagnent de droits économiques et sociaux, dit de « deuxième génération », droits dont la proclamation n'a cessé de s'étendre avec la mise en place de protocoles additionnels pour compléter les droits originairement énoncés dans la Convention. La protection des droits fondamentaux de la personne humaine est en effet la raison d'être principale du Conseil de l'Europe.
Mais un mécanisme aussi développé suscite forcément de nombreuses difficultés, dont la principale semble être l'encombrement de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, cependant signe de son utilité et de sa légitimité. La question de la réforme du mécanisme est au cœur des discussions au sein du Conseil de l'Europe depuis les années 1990. Le Protocole 14, ouvert à la signature le 13 mai 2004, s'inscrit dans la continuité des modifications établies par le Protocole 11, entré en vigueur le 1e novembre 1998, et opère des transformations substantielles dont les conséquences restent incertaines tant qu'il n'est pas entré en vigueur. De par les enjeux qu'il recouvre, il est d'un grand intérêt d'en analyser le contenu et les effets sur le mécanisme de protection européen des droits de l'homme. En effet, son objectif principal est d'améliorer l'efficacité du mécanisme en réduisant l'engorgement de la Cour tout en renforçant l'autorité et l'effectivité de celui-ci.
L'amélioration de l'efficacité du mécanisme européen se fait-elle au profit de l'intérêt des individus et d'une meilleure protection de leurs droits ? Ou au contraire doit-on craindre que des exigences pratiques conduisent à réduire l'effectivité de cette protection ?
Les particularités du mécanisme européen de protection des droits de l'homme, par ailleurs plutôt satisfaisant, ont conduit à plusieurs réformes, et la réalité du fonctionnement de la Cour met en lumière la nécessité de la réforme opérée par le Protocole 14. Il convient ensuite d'en analyser les conséquences pour l'avenir, puis de déterminer dans quelle mesure celui-ci peut-il être critiqué ou encensé.
[...] Si le Protocole 14 modifie plus le fonctionnement que la structure du mécanisme, ses enjeux n'en demeurent pas moins essentiels. Ainsi, il convient de voir les modifications apportées par le Protocole, afin de déterminer dans quelle mesure il atteint les objectifs fixés par ses rédacteurs. II/ Une réforme adequate ? Ces enjeux considérables impliquent de s'interroger sur les effets attendus de la réforme sur le mécanisme de protection des droits de l'homme. Dans une large mesure, cette réforme doit être perçue positivement, ce qui n'empêche pas certaines critiques. [...]
[...] La complexité d'un mécanisme La nécessité et l'efficacité de la protection des droits de l'homme réalisée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme ne sont plus à démontrer. Cependant, la force du mécanisme fait aussi sa faiblesse, car la surcharge de travail de la Cour met en lumière la nécessité d'une refonte du système. Un mécanisme juridictionnel et effectif de protection des droits de l'homme Le mécanisme instauré par la Convention de 1950 a depuis été largement perfectionné. À l'origine, les requêtes étaient filtrées par une Commission, puis par le Comité des ministres qui pouvait se prononcer sur la violation des droits de l'homme. [...]
[...] L'élargissement du règlement à l'amiable qui peut désormais intervenir à tout moment de la procédure, ainsi que l'instauration d'une nouvelle condition de recevabilité des requêtes individuelles, soumise à l'existence d'un préjudice important pour la victime, contribuent aussi à un meilleur filtrage des requêtes. La prise de décision désormais conjointe sur la recevabilité et le fond d'une requête permet d'accélérer les procédures. À travers ces nouvelles mesures, la Cour peut désormais se concentrer sur les affaires importantes en filtrant celles ayant déjà été traitées ou dont le bien-fondé n'est pas avéré. [...]
[...] Il est en effet nécessaire et urgent de modifier le système afin de veiller à ce que la Cour continue de jouer son rôle prééminent dans la protection des droits de l'homme en Europe (préambule du Protocole). Face à cet enjeu, les apports du Protocole 14 semblent indispensables. Il vise en effet à rationaliser le travail de la Cour en accélérant la procédure, tout en renforçant l'autorité du système, notamment en améliorant l'exécution des décisions. Cependant, l'enjeu de cette réforme est complexe. [...]
[...] De plus, les décisions rendues par le juge unique et les comités de trois juges sont définitives, elles ne peuvent faire l'objet d'un renvoi devant la Grande Chambre, un individu n'a donc aucune possibilité de contester la radiation de sa requête. Les chambres sont donc concurrencées par le juge unique et les comités quant à la recevabilité de la requête, car elles ne statuent que si ces derniers ne l'ont pas déjà fait (article 9 du Protocole). La nouvelle condition de recevabilité qui exige l'existence d'un préjudice important subi par le requérant (article 12 du Protocole) confère une plus grande marge d'appréciation à la Cour et peut à terme restreindre la portée du recours individuel. [...]
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