Nation et Etat ne sont pas toujours superposés dans l'espace. L'appartenance ethno-culurelle ne correspond pas obligatoirement au tracé des frontières. Un Etat peut partiellement recouvrir une partie d'une nation voisine, qui elle-même n'est pas forcément comprise par un seul et même Etat. Se pose alors la question des minorités. Les minorités sont des acteurs importants de la scène européenne au XXe siècle. Elles ont, dès les années 1920, joué un rôle très important dans les préoccupations des chancelleries et des milieux intellectuels en Europe. Des organisations pan-européennes telles que le Congrès européen des minorités ont joué un rôle moteur et ont collaboré de façon étroite avec la Société des Nations (SDN). Cependant, dans les années 1930, les régimes fascistes et autoritaires s'emparent de la majorité des Etats d'Europe et utilisent leur minorité « à des fins irrédentistes, impérialistes voire tout simplement bellicistes » comme le souligne Yves Plasseraud . Par exemple, les nazis ont financé et utilisé les mouvements nationalistes minoritaires préexistants contre les Etats occupés. Après la Seconde Guerre mondiale, du fait de la Shoah, des pertes dues au conflit et des déplacements massifs, le nombre de minoritaires en Europe centrale tombe à quelques dix millions. Entre 1945 et 1948, la plupart des Etats d'Europe centrale et orientale a dû adopter les conceptions de l'URSS. Aucun Etat n'a été autorisé à susciter ou à encourager la moindre velléité autonomiste où que ce soit au sein du camp socialiste. En Europe de l'Ouest, les dirigeants ne s'intéressent guère au sort des minorités de l'Est respectant ainsi une sorte de pacte tacite avec Moscou. La Yougoslavie de Tito constitue un cas à part puisqu'elle est officiellement organisée sur la base du fédéralisme ethnique . Au fil des années, avec l'accumulation des difficultés économiques et politiques, les dirigeants des démocraties populaires et même ceux de l'Union soviétique sont de plus en plus souvent tentés de détourner l'attention du peuple en faisant vibrer la fibre patriotique majoritaire. Cela a pour conséquence d'attiser les humeurs minoritaires. Par exemple, dans les années 1970, Nicolas Ceaucescu flatte le nationalisme roumain au détriment des minorités telles que les Hongrois de Transylvanie et les Souabes (Allemands) du Banat. Le début des années 1990 marque la fin du communisme et le tournant pour les minorités européennes de l'Europe de l'Ouest et de l'Est. Certains groupes sont vite menacés comme les Serbes de la Krajina croate ou les Polonais de Lituanie. Les conflits se multiplient, aussi bien entre Etats-nations comme entre la Croatie et la Serbie qu'au sein de ces Etats (Serbie et Kosovo, guerre en Bosnie-Herzégovine). Tous les problèmes ne se résolvent cependant pas dans la violence. En 1993, les Tchèques et les Slovaques trouvent un compromis pour résoudre leur différend. La plupart des minorités des pays d'Europe centrale et orientale ont été tentées par la solution de l'autonomie territoriale. C'est le cas par exemple des Hongrois de Transylvanie et de Slovaquie. Aujourd'hui, la question des minorités en Europe centrale et orientale, et plus particulièrement dans les Balkans, est toujours aussi brûlante. En effet, qu'il s'agisse des Serbes du Kosovo ou de la Republika srpska, les revendications d'indépendance sont vives. On peut alors se demander dans quelle mesure on peut qualifier un groupe de minorité et quel impact, une telle qualification a sur la stabilité d'un pays tel que la Serbie. La notion de minorité est une notion aujourd'hui encore débattue. Même si les contours sont flous, la notion doit être précisée pour une meilleure protection nationale et internationale des minorités (I). Nous étudierons par ailleurs deux cas qui posent problème en Serbie : celui des Kosovars albanais de Serbie mais aussi des Serbes du Kosovo et celui des Hongrois de Voïvodine (II).
[...] DERENS J.-A., Indépendance du Kosovo, une bombe à retardement Le Monde diplomatique, mars 2007, p6. GARDE P., Les Balkans désenchantés Politique internationale, automne 2005, n°109, pp. 363-386. LASSERRE I., L'exception serbe Politique internationale, automne 2005, n°109, pp. 387-398. LOSONCZ A., Une convergence sous tension. Les Magyars de Voïvodine et leur relation à la “mère-patrie” Revue d'études comparatives Est- Ouest, décembre 2007, volume 38, pp. 5-28. PERROT O., Kosovo : conflits autour d'un peuplement Alternative Internationale, mars 2008, 38. PLASSERAUD Y., Minorités et nouvelle Europe Le courrier des pays de l'Est, novembre-décembre 2005, n°1052, pp. [...]
[...] du Conseil de l'Europe pp. 57-78. Cette doctrine ancienne est composé de Claude qui définit la minorité comme telle : une minorité nationale existe lorsqu'un groupe de gens dans un Etat professent la conviction de constituer une nation, ou une partie de nation, distincte de l'entité nationale à laquelle la majorité de la population appartient, ou lorsque l'élément majoritaire de la population estime posséder un caractère national que des groupes minoritaires ne veulent pas partager. voir p.58. Voir la Recommandation 1134 (1990) relative aux minorités http://assembly.coe.int/Documents/AdoptedText/ta90/frec1134.htm Arrêt n°12 du 26 avril 1928, Droit des minorités en Haute-Silésie, Cour permanente de justice internationale, série A p.72 http://www.icj- cij.org/pcij/serie_A/A_15/46_Droits_de_minorites_en_Haute_Silesie_Ecoles_min oritaires_Arret.pdf RAMU S., op.cit., pp. [...]
[...] Le droit des minorités se distingue des autres droits de l'homme car il est individuel et collectif c'est-à-dire que les droits octroyés sont accordés à chaque individu de la minorité dans un contexte collectif. On fait bénéficier des droits individuels à ces minorités parce qu'ils appartiennent à un groupe minoritaire, ce ne sont pas des droits collectifs comme le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. C'est l'«exercice collectif de droits individuels selon F. Capotorti. Malgré le chevauchement de multiples concepts, il ne faut pas oublier que l'important est leur protection et la conservation de leurs caractéristiques propres. [...]
[...] La Hongrie a alors adopté une des premières lois sur les minorités en 1993. Cependant, le deuxième gouvernement hongrois de gauche (1994-1998) a infléchi cette politique et remodelé le discours sur la nation en se concentrant sur la communauté des citoyens hongrois Le gouvernement envisageait principalement les minorités hongroises sous l'angle de la sécurité. Le gouvernement Orban (1998-2002) a renoué avec la politique du premier exécutif conservateur tout en la réinterprétant. Ils ont voulu jouer un rôle actif en Europe centrale et orientale quitte à être critiqués par leurs voisins. [...]
[...] En réaction, les Albanais au Parlement du Kosovo votent en 1990 pour la création d'une province indépendante dans le cadre de la Fédération yougoslave. Trois jours plus tard, ils sont destitués par le parlement serbe. Se développe alors au Kosovo un système parallèle mené par la Ligue Démocratique du Kosovo (LDK). La séparation de la minorité albanaise en Serbie d'avec la majorité serbe continue de s'accroître. Les enseignants et élèves albanais qui se voient interdits d'accès aux écoles et doivent se rendre dans des écoles privées. [...]
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