Selon Bérangère Taxil, « le « Tiers-monde » est considéré comme un vaste champ de
batailles, de conflits ethniques. Le sous-développement n'est plus qu'une fatalité. ».
Par opposition avec les pays développés, les pays du « Tiers-monde », aujourd'hui appelés
pays en développement (PED), se caractérisent généralement par la gravité de leur pauvreté. On
constate ainsi l'apparition d'au moins deux catégories de membres de l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC), qui reflète dès lors l'existence d'une différenciation en leur sein.
Longtemps regroupés sous cette appellation de « Tiers-monde », les pays dits « en développement »
constituent une catégorie d'une double spécificité. En effet, elle est à la fois uniforme dans la
mesure où ces pays sont liés par un facteur commun, celui du sous-développement mais aussi une
catégorie hétérogène car ils connaissent une grande diversité. Il existerait donc plusieurs souscatégories
de PED.
Lors du processus de construction du système économique international, la participation des
PED fut marginalisée du fait de la perpétuation du fait colonial. En effet, à l'époque ils n'existaient
pas encore en tant que tels. Ainsi le nouveau système issu de la seconde Guerre Mondiale fut
construit par et pour les pays d'économie de marché c'est-à-dire les pays développés. Mais à la fin
des années 1960, suite au phénomène de la décolonisation, les PED contestèrent un grand nombre
de règles du droit international classique. Ils critiquaient notamment le fait que celles-ci avaient le
même contenu quel que soit leur destinataire. En effet, le droit international classique est un droit
déconnecté de la réalité concrète dans la mesure où il ignore les inégalités de puissance et de
développement économique entre les acteurs de la vie internationale. Par souci de réalisme, la seule
façon de parvenir à une égalité de traitement entre les membres du milieu économique international
consiste, pour les PED, à instituer des règles comprenant les inégalités de développement Nord-
Sud. Ainsi, ceux-ci voulaient se voir accorder le bénéfice de normes plus avantageuses que celles
s'appliquant aux pays nantis. C'est le principe de l'inégalité compensatrice. Le corollaire de ce
principe réside dans le fait qu'une règle de droit supporterait plusieurs contenus afin de s'ajuster
aux particularités de ses destinataires hétérogènes.
Ainsi, depuis la dislocation du bloc de l'Est, le droit international économique s'intéresse à
plusieurs catégories d'acteurs étatiques et opère une différenciation entre celles-ci. En effet,
certaines de ces catégories se prévalent de certains avantages qui résultent de la mise en place de
régimes juridiques compensateurs des inégalités de développement. Il apparaît donc indispensable
d'identifier ou plutôt de tenter d'identifier ces catégories, plus particulièrement celle des PED. Sur
le plan multilatéral, il a toujours été difficile de définir à l'aide de critères objectifs ce qu'est un
pays en développement. La publication d'une liste unique regroupant l'ensemble des PED n'a
jamais pu voir le jour mais les acteurs de la société international ont cependant réussi à identifier
certains groupes d'Etats en développement qui présentent des caractéristiques particulières : les
pays les moins avancés (PMA).
En octobre 1970, l'Assemblée générale des Nations unies reconnu la nécessité d'identifier les pays
constituant le noyau dur du sous développement. Pour cela, elle se fonda sur trois critères objectifs
et cumulatifs : le revenu national brut par habitant (qui doit être inférieur à 750 dollars pour entrer
dans la catégorie et ne pas dépasser 900 dollars pour y rester), le taux d'alphabétisation de la
population adulte et la part des industries de transformation dans le revenu national brut.
Depuis 1991, elle a fait aussi usage d'un indice composite appelé « indice du capital humain » qui
tient compte d'une perception plus complexe et globale du phénomène avec la prise en compte de la
ration calorique par habitant, du taux de mortalité infantile et du taux de scolarisation (et encore du
taux d'alphabétisation de la population adulte).
Une liste contenant 25 PMA fut d'abord établie et approuvée le 18 octobre 1971. Mais cette
catégorie regroupe aujourd'hui 50 pays ce qui dénote une aggravation du phénomène de pauvreté
surtout en Asie et Afrique bien que les pays développés aient mis en place des mesures d'aide.
Ces mesures d'aide qui s'analysent en des traitements juridiques spéciaux et différenciés (TSD)
constituent d'ailleurs une exception au traitement de la nation la plus favorisée (art I de l'Accord
Général sur les tarifs douaniers et le commerce ou GATT).
Comme le souligne Michel Virally, le droit international économique du développement
présente une double fonction. Dans un premier temps, il s'attache à prendre en considération la
réalité du sous-développement économique des Etats et dans un second temps, il s'efforce
d'éradiquer la pauvreté en tentant de faire coïncider l'égalité juridique entre les Etats avec la réalité.
A la fois droit situationnel et droit finaliste, le droit économique international se caractérise avant
tout par son souci de réalisme. C'est ainsi que le droit que nous étudions opère une différenciation
entre les membres de l'OMC afin tenter de mettre fin autant que faire se peut aux inégalités de
développement Nord-Sud voire Sud-Sud en accordant une surpréférence aux PMA par rapport aux
autres pays en développement. Ce traitement préférentiel (accentué concernant les PMA) devrait
alors aboutir à une accélération du développement économique des pays concernés grâce à l'essor
des échanges économiques et financiers mettant en jeu les PED. Cependant, comme nous avons pu
le constater, la césure entre les différentes catégories de membres de l'OMC est tout de même floue,
difficile à matérialiser du fait du manque de critères et du défaut de consensus entre les acteurs de la société internationale. Cette lacune dans la notion de différenciation constitue d'ailleurs un enjeu politique qui souligne les insuffisances des mesures préférentielles accordées aux PED. En effet,
comment le droit international économique veut-il inciter (sans obliger) les pays développés à
accorder des préférences aux PED si la notion actuelle de PED n'est pas certaine et est difficile à
remettre en cause dans la mesure où elle constitue un « tabou » pour ces derniers ?
L'étude d'une différenciation juridique admise (I) et d'une différenciation contestable (II)
sera notre fil d'Ariane.
[...] Rien ne s'oppose à la mise en place d'une politique de graduation dans le cadre d'un SPG. A travers la clause évolutive, l'on cherche à inciter le PED avancé à se conformer de manière graduelle, progressive aux règles de droit commun du GATT. Par la suite, ces pays devraient se soumettre au respect intégral de la loi commune lorsqu'ils possèderont tous les attributs de nouveau pays industrialisé (NPI). Cependant, la décision de 1979 omet de définir les critères objectifs permettant d'identifier les destinataires des clauses évolutives. [...]
[...] Mais ces derniers ne sont prêts à accorder des concessions au titre du TSD que si elles sont proportionnées à la situation économique et au niveau de revenu réel des PED. Tout approfondissement des concessions accordées par les pays développés au titre du TSD devrait effectivement trouvé sa contrepartie dans l'approfondissement de la différenciation des PED parmi les membres de l'OMC. Cependant, la question de la différenciation des PED est devenue un véritable tabou pour les PED à l'OMC. En effet, la plupart d'entre eux s'opposent radicalement à toute évocation du sujet par peur de sortir de cette catégorie. [...]
[...] Mais rien n'oblige juridiquement les pays développés de la CE à instituer de tels programmes. En effet, les SPG sont des instruments unilatéraux ou autonomes de la coopération pour le développement. La plupart des produits originaires des PED bénéficiaires de ces instruments n'acquittent plus de droits de douane ou bénéficient de réductions douanières substantielles : on parle de concessions commerciales gratuites. Vu l'extrême gravité de la situation des PMA, les membres de la société internationale s'accordèrent sur la nécessité d'offrir une aide exceptionnelle et spécifique à l'ensemble de ces pays. [...]
[...] Ce sont les PMA dont les critères de différenciation ont été précédemment évoqués. La liste des PMA a d'ailleurs été reprise par l'OMC. La Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) à son tour, donné la définition des pays émergents caractérisés par leur croissance économique entamée mais tout de même fragile. Mais en l'absence de définition juridique de ces acteurs, il est difficile d'être plus précis. Mais le droit international économique s'intéresse de plus en plus à cette catégorie de pays en leur offrant un statut moindre que celui des PMA mais qui leur est tout de même favorable. [...]
[...] L'étude d'une différenciation juridique admise et d'une différenciation contestable sera notre fil d'Ariane. I - Une différenciation juridique établie dans une perspective de développement économique Lors de la construction du nouvel ordre économique international, une différenciation était établie entre les pays développés ou nantis et les PED nouvellement apparus à la suite de la décolonisation. Cependant, au sein de ce dernier groupe d‘Etats, il faut prendre également en compte l'existence de sous-catégories qui témoigne d'un développement économique inégal entre les PED Le corollaire de cette différenciation des membres de l'OMC est l'application à chaque catégorie d'un traitement différent concernant ses échanges commerciaux : en effet, si les pays développés se voient appliquer le droit commun, les PED bénéficient d'un traitement préférentiel A - La prise en compte de situations plus particulières La nouvelle démarche finaliste et compensatrice du droit international économique aurait du conduire les acteurs de la société internationale à dresser une typologie des acteurs étatiques pour distinguer les nantis des PED. [...]
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