Devant le silence des traités originaires, la CJCE a refusé, tout d'abord, au nom du principe de l'autonomie de l'ordre juridique communautaire, de contrôler la légalité des actes communautaires au regard des droits fondamentaux garantis par les Constitutions nationales au motif qu'il ne lui appartenait pas « d'assurer le respect des règles de droit interne, même constitutionnelles, en vigueur dans l'un des États membres » (CJCE, arrêt du 15 juillet 1960, Comptoirs de vente du charbon de la Ruhr). Cependant, l'accroissement des transferts de compétences des États vers la CE a rendu cette position de moins en moins tenable. En effet, l'exercice de ces compétences qui, dans les ordres juridiques nationaux, est soumis à des limitations visant à protéger les droits fondamentaux, n'est plus assujetti à de telles exigences après leur transfert à la CE. Le passage du niveau national au niveau européen s'accompagne donc d'une régression en termes de droits fondamentaux ...
En pratique, le principe de primauté des règles de droit communautaires s'est révélé particulièrement difficile à accepter pour des États qui, comme l'Allemagne, font figurer, dans leur Constitution, un catalogue de droits fondamentaux perçu, par la population (et les pouvoirs publics), comme un élément essentiel de la démocratie et de l'État de droit. Pour tout dire, dans des hypothèses d'interférence éventuelle entre le droit communautaire et les droits fondamentaux, la règle de la primauté du droit communautaire emportait le risque de voir la garantie du juge communautaire ? réputée peu efficace ? se substituer à celle offerte par la Constitution et la juridiction constitutionnelle nationales. Afin de rassurer les autorités nationales, tout en maintenant la doctrine de la primauté du droit communautaire, la CJCE affirme, dans l'arrêt Stauder du 12 novembre 1969, que les droits fondamentaux sont partie intégrante du droit communautaire et qu'elle en assure le respect à travers les principes généraux du droit communautaire (PGDC). Dans l'arrêt Internationale Handelsgesellschaft du 17 décembre 1970, la CJCE reprend cette idée et ajoute que « la sauvegarde de ces droits, tout en s'inspirant des traditions constitutionnelles communes aux États membres, doit être assurée dans le cadre de la structure et des objectifs de la Communauté » (...)
[...] : L'arrêt Bosphorus est, sans conteste, un arrêt de principe, en ce qu'il régule, dans l'attente de l'adhésion de l'UE à la CEDH, les rapports entre le droit communautaire et le droit issu de la CEDH. La compétence ratione materiae de la CourEDH Nb. : La CourEDH ne peut directement contrôler la conformité d'actes communautaires au regard de la CEDH. En effet, l'UE ne peut, tant qu'elle n'est pas partie à la CEDH, voir sa responsabilité engagée au titre de celle-ci pour les procédures conduites devant ses organes ou les décisions rendues par eux. [...]
[...] B L'adhésion forcée de l'UE à la CEDH P is tes d e r éfl exio n : - La remise en cause du droit communautaire devant la CourEDH. - Comment, d'un côté, prendre en considération la situation d'une OI non partie à la CEDH et, de l'autre, éviter que, par des transferts de compétences consentis par les États membres à cette OI, il n'en résulte une lacune dans la protection des droits de l'homme ? - Est-ce que les États membres de l'UE peuvent être responsables des violations de la CEDH découlant d'actes communautaires ? - L'UE, un futur justiciable de la CourEDH ? [...]
[...] Ainsi, dans son Préambule, la Charte des droits fondamentaux de l'UE réaffirme les droits résultant notamment ( . ) de la jurisprudence de la CourEDH et, dans l'« explication qui figure sous l'article 52 de la Charte, il est indiqué que le sens et la portée des droits garantis sont déterminés non seulement par le texte de la CEDH et de ses Protocoles mais aussi par la jurisprudence de la CourEDH 10. Nb. : Le seul procédé susceptible d'éliminer véritablement toute divergence d'interprétation entre la CJCE et la CourEDH serait l'adhésion de l'UE à la CEDH. [...]
[...] L'arrêt Bosphorus fonde solidement cette compétence dans la notion de juridiction mentionnée à l'article 1er de la CEDH21. À vrai dire, la CourEDH applique le principe selon lequel les États répondent de leur respect de la CEDH à raison de l'exercice de l'« ensemble de leur juridiction quel que soit le type de normes ou de mesures en cause, et sont, en conséquence, responsables de tous les actes et omissions de leurs organes internes, s'ils sont contraires à la CEDH, qu'ils soient accomplis en application du droit interne ou d'obligations internationales. [...]
[...] De même, le transfert de compétences à une OI ne les délie pas de leurs responsabilités au regard de la CEDH pour les compétences transférées car cela serait contraire au but et à l'objet de la Convention (CEDH février 1999, Beer et Regan Allemagne). CourEDH juin 3005, Bosphorus Irlande : 151. Il convient donc de rechercher si et, le cas échéant, dans quelle mesure l'important intérêt général qu'il y avait pour l'État irlandais de respecter les obligations communautaires peut justifier l'atteinte portée par lui aux droits de propriété de la société requérante D'une part, la Convention n'interdit pas aux Parties contractantes de transférer des pouvoirs souverainsà une organisation internationale compris supranationale) à des fins de coopération dans certains domaines d'activité ( En outre, même en tant que détentrice des pouvoirs souverains ainsi transférés, l'organisation internationale concernée ne peut, tant qu'elle n'est pas partie à la Convention, voir sa responsabilité engagée au titre de celle-ci pour les procédures conduites devant ses organes ou les décisions rendues par eux ( ) D'autre part, la Cour a également jugé que les Parties contractantes sont responsables, au titre de l'article1er de la Convention, de tous les actes et omissions de leurs organes, qu'ils découlent du droit interne ou de la nécessité d'observer des obligations juridiques internationales. [...]
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