Il est courant de mentionner la communauté internationale, mais aucune définition précise n'en est donnée. En effet, durant la seconde moitié du vingtième siècle, "la communauté internationale est devenue omniprésente dans la bouche et sous la plume des hommes d'Etat, des diplomates, des journalistes, et depuis lors, ce formidable engouement ne s'est plus démenti", selon les termes de Prosper Weil.
René-Jean Dupuy estime pour sa part qu'il s'agit d'un « usage généralisé d'un concept au timbre rassurant, qui tend à donner une vision euphorique du droit des gens, présenté comme l'instrument de la fraternisation et de la paix entre les peuples ». Enfin, M. Moreau-Defarges considère qu'« à la lumière du concept de communauté, la communauté internationale est un horizon toujours fuyant, une tension entre réalité et rêve ». Le concept de communauté internationale recouvre des notions très différentes. C'est un terme commode pour désigner l'ensemble des États. Dans ce cas, il s'agit plus d'une expression « à la mode » que d'une idée spécifique.
Dans son avis consultatif sur la réparation des dommages subis au service des Nations Unis (1949), la CIJ rappelle que l'Organisation des Nations Unies a été créée par « une très large majorité des membres de la communauté internationale » : elle veut dire par là qu'elle a été créée par une majorité d'États. D'une manière générale, la Cour se réfère à la notion de « communauté internationale » pour désigner l'ensemble des États. Mais progressivement, le terme de communauté internationale s'est chargé de sens. Parfois, en effet, on entend l'expression employée comme référence non plus à tous les États, mais à la communauté internationale organisée et institutionnalisée, c'est-à-dire en pratique à l'ONU.
La communauté internationale sous cette forme institutionnalisée et personnifiée possède des intérêts fondamentaux dont la sauvegarde est essentielle et leur méconnaissance justifie l'application de sanctions à l'encontre des États membres de cette communauté internationale qui se sont rendus coupables de la violation. Il ressort de ces considérations que le concept de « communauté internationale » recouvre un ensemble à la fois très vaste et très flou, et par conséquent complexe à définir.
Si la communauté internationale est vue comme une notion médiatique et idéaliste, il reste à savoir si elle a une véritable existence juridique. Il nous faut tout d'abord définir cette notion de communauté: une communauté désigne un groupe d'individus unis par des traditions communes dans la reconnaissance de valeurs commune. Un tel groupe possède un intérêt général commun. Il ne faut pas confondre communauté et société. La notion de communauté renvoie à un ensemble plus ordonné et plus coordonné qu'une société ; elle représente le degré plus évolué par rapport à la société qui est le degré plus primitif de la vie en groupe. En ce sens, toute communauté est d'abord naturellement nationale, d'où la surprise et le choc du terme « communauté internationale ». La « communauté internationale » désignerait alors un groupe dans lequel des nations communieraient selon des traditions, des valeurs et des intérêts communs. C'est là qu'apparaissent les premières contradictions : les nations ont par essence des traditions, des valeurs et des intérêts différents, c'est le critère même de la nation. En effet, les différences de race, de culture et de religion séparent les peuples, ainsi que les conflits idéologiques et politiques, également facteurs de divisions. Cette constatation pose alors la question de savoir si l'idée de communauté internationale n'est pas une pure fiction juridique. Néanmoins, il semble aujourd'hui établi pour la plupart des internationalistes que la communauté internationale ne saurait être vue comme une simple fiction mais qu'elle a une véritable existence juridique, bien que celle-ci soit encore loin d'être précisément définie.
Ainsi, puisque l'idée de l'existence d'une communauté internationale ne semble plus guère remise en cause, il convient de se poser les questions suivantes : quelle est son origine historique ? Quelles sont les entités qui la composent ? Quel est son rôle ? En essayant de répondre à ces questions, nous comprendrons pourquoi le problème de l'existence de cette communauté soulève tant de difficultés car, comme nous allons maintenant le démontrer, aucune de ces questions n'est susceptible de recevoir de réponse claire et univoque.
Ainsi, nous allons voir l'émergence historique de la notion de communauté internationale (I), avant d'étudier ses caractéristiques actuelles et les incertitudes qui y sont liées(II).
[...] La CIJ s'y réfère souvent: elle a ainsi affirmé dans son avis consultatif relatif à la réparation des dommages subis au service des NU (1949) que"cinquante États, représentant une très large majorité des membres de la communauté internationale, avaient le pouvoir de créer une entité possédant une personnalité internationale objective". Elle a également évoqué l'existence d'obligations pesant sur les États "envers la communauté internationale dans son ensemble" (affaire de la Barcelona Traction en 1970 ; affaire des Essais nucléaires en 1994). La communauté internationale est une de ces notions à la formation complexe issue de dynamiques longues. Mais lorsque cette entité s'exprime on peut se demander qui parle réellement? Comment l'existence de cette communauté internationale se manifeste-t-elle dans la pratique? [...]
[...] Elle interdit en principe le recours à la force, à l'exception de l'hypothèse de la légitime défense d'un Etat en réponse à une agression armée d'un autre Etat (art.51). Mais, pour assurer le respect de ces dispositions, il devrait exister une autorité habilitée à vérifier la réalité de l'agression armée ainsi que la légitimité de la défense. Or en l'état actuel du droit international, il existe de nombreuses et importantes lacunes. Néanmoins, la Charte institue un gendarme: le Conseil de sécurité, chargé de veiller au maintien de la paix et de la sécurité internationales (art.39), et pour cela investi du monopole du recours à la force. [...]
[...] _ La résolution de l'Assemblée générale de l'ONU du 2 novembre 1970 dispose que "les conventions et déclarations internationales conclues sous l'auspice des Nations Unies sont l'expression de la conscience morale de l'humanité en même temps qu'elles constituent des normes humanitaires que doivent respecter tous les membre de la communauté internationale." Il semblerait ressortir de cette affirmation que les membres des Nations Unies ne se confondent pas avec la communauté internationale, laquelle serai une entité plus vaste. On peut alors émettre l'hypothèse selon laquelle la communauté internationale serait l'ensemble de la société mondiale. Mais étant donné que seuls de rares mini-États (comme par exemple le Vatican) ne sont pas membres des Nations Unies, cette conception n'est guère satisfaisante. B. Le problème de la force légitime. Toute communauté poursuit deux buts indissociables: elle doit, d'une part, protéger ses membres contre les agressions extérieures et, d'autre part, éviter les conflits entre ces membres eux-mêmes. [...]
[...] En 1918, la création simultanée de la Société des Nations et de l'Organisation Internationale du Travail matérialise cette nouvelle approche de la paix. Mais la Seconde Guerre mondiale ne tarde pas à éclater et la SDN se révèle être un échec retentissant. Mais l'idée persiste et en 1945, au lendemain de cette guerre, l'ONU est créée à l'initiative des principaux vainqueurs de la guerre : la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, l'URSS et la Chine, qui s'octroient le statut de membres permanents du Conseil de sécurité. [...]
[...] Effectivement, les États membres de cette organisation ont manifesté leur adhésion à des principes communs, tels que l'abstention du recours à la force, le respect mutuel de leur intégrité territoriale et de leur indépendance politique, la non-ingérence dans les affaires intérieures De manière à permettre la mise en œuvre de ces principes, les États consentent à confier la mission de maintien de la paix à un organe supérieur: le Conseil de sécurité. Mais l'ONU reflète en même temps les contradictions de la notion de communauté internationale. En effet, la notion de communauté implique l'idée d'un groupe par rapport à l'extérieur. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture