La reconnaissance internationale de la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo soulève plusieurs interrogations juridiques et politiques dans la communauté internationale. Le Canada a été parmi les premier pays à prendre position, ayant reconnu ce nouvel État le 18 mars 2008 par le biais d'une allocution du Ministre des Affaires étrangères d'alors, Maxime Bernier.
Or, la licéité de la sécession de cet État étant remise en question, notamment dans une procédure en cours devant la Cour Internationale de Justice (CIJ), il convient de se questionner sur la prise de position rapide du Canada en faveur de la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo. À ce titre, nous tenterons d'évaluer la correspondance de la déclaration du Ministre Bernier avec la pratique canadienne usuelle en matière de reconnaissance d'États et de gouvernements (...)
[...] Mitchell Sharp, Allocution avril 1974, reproduite dans Jacques-Yvan Morin, François Rigaldis et Daniel Turp, Droit international public : notes et documents, Tome II Documents d'intérêt canadien et québécois, Montréal, Thémis Mémorandum rédigé par le Bureau juridique du ministère des Affaires étrangères le 5 août 1975 dans (1976) A.C.D.I Edward G. Lee, Canadian Practice in International Law during 1974 as Reflected Mainly in Public Correspondence and Statements of the Department of External Affairs (1975) A.C.D.I Ibid. à la p.356. Sharp, p.452. Tel que l'expose Secrétaire d'État aux Affaires extérieures d'alors, Mitchell Sharp, il importe de se questionner à savoir : nouvel État vient-il vraiment de voir le jour, a-t-il des chances raisonnables de subsister ? [...]
[...] Règle générale, le Canada [ ] views non- recognition as disadvantageous to national interest entre autres puisque une rupture des relations diplomatiques amène son lot de complications bureaucratiques et prive de sources d'informations privilégiées et de liens direct avec une nouvelle administration, empêchant d'améliorer les relations diplomatiques ou d'influencer certains choix de politiques. Aussi, il peut être dans l'intérêt du Canada d'évaluer la position de ses principaux alliés sur la scène internationale et de réagir en accord avec cette position. Habituellement, dans la prise de décision en matière de reconnaissance, les principes et critères tant juridiques que politiques tendent vers un même verdict. [...]
[...] Aussi, il importe de constater que la déclaration du 18 mars débute avec le constat que bon nombre de pays [ ] ont déjà reconnu le Kosovo ce qui confirme l'importance du facteur politique de la reconnaissance internationale déjà octroyée dans la décision finale canadienne. Alors, avec une déclaration où l'on dénote une certaine prépondérance des principes issus de la doctrine Estrada, notamment par l'importance accordée au principe d'effectivité dans la décision de reconnaître, avec l'énoncé de critères secondaires non contraignants, la mention expresse que la décision ne créerait pas de précédent et l'influence de la décision d'autres pays alliés (facteur d'importance incontestable depuis les débuts de l'exercice canadien d'un droit de reconnaissance), il est possible de conclure que la déclaration du ministre Bernier s'inscrit directement dans la lignée de la pratique canadienne, non pas «traditionnelle», mais disons «habituelle», en matière de reconnaissance de nouveaux États. [...]
[...] La décision canadienne de reconnaître repose fondamentalement sur le principe d'effectivité. En matière de reconnaissance de gouvernements, cet impératif d'effectivité demandait que les nouvelles autorités exercent un contrôle effectif sur un territoire raisonnablement bien défini et avec perspectives raisonnables de permanence Avant d'officialiser la reconnaissance d'un nouveau gouvernement, il convenait habituellement, dans la pratique canadienne, de suspendre la déclaration de reconnaissance en cas d'ambiguïté ou d'instabilité politique interne, afin d'éviter l'ingérence dans les affaires internes d'un autre État, conformément à l'article de la Charte des Nations Unies[3]. [...]
[...] Ainsi, le principe d'effectivité a toujours été le principe fondamental, avec ses critères de contrôle du territoire et de perspectives de permanence. Les critères plus secondaires de respect des obligations internationales par le nouvel État ou de la reconnaissance déjà acquise au sein de la communauté internationale sont aussi invoqués de manière récurrente. Dans la mesure où, au Canada, on ne peut pas conclure à la présence d'une pratique traditionnelle, mais où l'on constate tout de même une certaine régularité dans la pratique, les critères et principes invoqués de manière récurrente font pencher la pratique canadienne du côté de la doctrine Estrada. [...]
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