Lʼaccueil des jugements étrangers par les juridictions françaises a fait lʼobjet dʼune longue évolution : dʼabord subordonné à la révision du fond, cet accueil va ensuite porter uniquement sur quelques conditions de régularité. La reconnaissance et lʼexécution en France des décisions étrangères, en lʼabsence de conventions bilatérales ou de règlements communautaires, sont alors soumises aux conditions posées par lʼarrêt Munzer (Civ. 7 janvier 1964). Cʼest dans ce cadre quʼintervient lʼarrêt Simitch, rendu le 6 février 1985 par la Première Chambre civile de la Cour de cassation.
En lʼespèce, le divorce entre un américain et une Britannique avait été prononcé à Londres. Cette dernière, ayant obtenu lʼallocation dʼune pension alimentaire à titre de mesure provisoire, demanda lʼexequatur de la décision en France.
Le tribunal de Paris y fait droit, mais ce jugement est réformé par la Cour dʼappel le 5 novembre 1982 au motif de lʼincompétence du juge étranger: "il est de principe que la compétence juridictionnelle internationale est déterminée par lʼextension des règles de compétence territoriale interne" . Celles-ci désignent les juridictions françaises, le défendeur ayant sa résidence en France.
La Cour de cassation est alors saisie sur le pourvoi de Mme Fairhurst, créancière de la pension alimentaire selon la décision anglaise, et qui conteste le raisonnement de la Cour dʼappel.
La Haute juridiction casse lʼarrêt dʼappel et énonce un attendu de principe qui va justifier lʼinfluence et la notoriété de la jurisprudence Simitch: "toutes les fois que la règle française de solution des conflits de juridictions nʼattribue pas compétence exclusive aux tribunaux français, le tribunal étranger doit être reconnu compétent, si le litige se rattache dʼune manière caractérisée au pays dont le juge a été saisi et si le choix de la juridiction nʼa pas
été frauduleux".
[...] En lʼespèce, les juges ont relevé un faisceau dʼindices pour admettre la reconnaissance du jugement anglais: il est mentionné que la demanderesse était de nationalité britannique, quʼelle avait son domicile en Angleterre, que le mariage y avait été célébré, que les époux y avaient fixé leur domicile conjugal, et que le mari y possédait encore certains biens. La Première Chambre civile sʼinspire du principe de proximité. Est-il nécessaire de réunir plusieurs critères ou bien est-il suffisant dʼobserver la présence dʼun seul indice significatif? Dans ce dernier cas, comment distinguer ce qui est déterminant de ce qui est inopérant? La nationalité commune des époux a été jugée suffisamment caractérisée en matière de dissolution du mariage (Civ 1ère mai 1994, Asfi; dans le même sens: Civ Juin 1994). [...]
[...] Cʼest bien la différence entre le droit commun et le droit communautaire dans le domaine de la reconnaissance des décisions étrangères (entre autres). Lʼunion européenne est guidée par un principe de confiance mutuelle, et un objectif de libre circulation. Les Etats, la France la première, cherchent à libéraliser leur droit positif, et y parviennent progressivement par le biais de décisions telles que lʼarrêt Simitch. Mais cet élan sera toujours freiné par la méfiance, justifiée dans certains cas, et le réflexe protectionniste, aussi inconscient soit-il. [...]
[...] 1ère février 1985, Simitch Lʼaccueil des jugements étrangers par les juridictions françaises a fait lʼobjet dʼune longue évolution: dʼabord subordonné à la révision du fond, cet accueil va ensuite porter uniquement sur quelques conditions de régularité. La reconnaissance et lʼexécution en France des décisions étrangères, en lʼabsence de conventions bilatérales ou de règlements communautaires, sont alors soumises aux conditions posées par lʼarrêt Munzer (Civ janvier 1964). Cʼest dans ce cadre quʼintervient lʼarrêt Simitch, rendu le 6 février 1985 par la Première Chambre civile de la Cour de cassation. [...]
[...] Cʼest en 1819, avec lʼarrêt Parker, que la Cour de cassation abandonne définitivement la théorie du juge naturel et introduit lʼaction en exequatur en droit international privé français. Cela suppose alors une révision du fond du jugement étranger, équivalente à lʼexigence dʼune identité des décisions. La suppression de ce contrôle du fond survient dʼabord en matière dʼétat et de capacité des personnes (DeWrède, Cass civ 9 mai 1900). Mais il a fallu attendre 1964 pour abandonner totalement cette méthode (Une étude du fond peut néanmoins sʼenvisager si elle sʼinscrit dans lʼune des conditions, notamment pour la théorie de lʼéquivalence), et établir les conditions de régularité de manière limitative. [...]
[...] Lʼabsence de fraude au jugement et de compétence exclusive En ce qui concerne la fraude, il sʼagit dʼun simple rappel de la condition énoncée par lʼarrêt Munzer, mais visant ici la fraude aux jugements, se rattachant alors à la compétence internationale. Cette fraude suppose la réunion d'un élément matériel (manœuvre ou agissement visant à créer les conditions de la compétence du juge recherché) et d'un élément intentionnel (volonté de soustraire le litige au juge normalement compétent). En pratique, lʼhypothèse la plus fréquente de lʼapplication de lʼarrêt Simitch sera celle des répudiations marocaines ou algériennes, au sujet desquelles il est facile de confondre lʼappréciation du comportement du demandeur avec le caractère choquant de lʼinstitution dont le bénéfice est recherché. [...]
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