L'arrêt Cornelissen de la première chambre civile supprime, en droit commun des effets des jugements étrangers, le contrôle par le juge de l'exequatur de la compétence de la loi appliquée par le juge étranger. La cour d'appel d'Aix-en-Provence infirme et considère qu' « ayant omis de présenter ses moyens devant le juge américain, le défendeur ne pouvait se prévaloir de la carence de sa défense pour paralyser l'exécution en France du jugement rendu à son encontre ».
Cornelissen forme un pourvoi fondé sur l'argument selon lequel l'exequatur d'un jugement étranger ne peut être accordé que si le juge étranger a appliqué la loi désignée par la règle de conflit française ou une loi conduisant à un résultat équivalent.
Le critère tiré de la non-application par le juge étranger de la loi applicable désignée par la règle de conflits de lois française est-il suffisant pour ne pas accorder l'exequatur d'une décision étrangère ?
[...] Commentaire de l'arrêt rendu par la 1re Chambre civile de la Cour de cassation le 20 février 2007 Comme l'a déjà décerné M. Chauvin, un des chroniqueurs de la Cour de cassation et membre de la chambre qui a rendu la présente décision, en date du 20 février 2007 ; l'arrêt Cornelissen de la première chambre civile mérite son qualificatif de grand arrêt en ce qu'il supprime, en droit commun des effets des jugements étrangers, le contrôle par le juge de l'exequatur, de la compétence de la loi appliquée par le juge étranger. [...]
[...] Chauvin appelle ce phénomène celui de la privatisation du droit international privé pendant que d'autres raisonnent en termes de dé-publicisation de celui- ci. Se tournant vers l'avenir du droit international privé commun français, les juges ont voulu limiter à des situations exceptionnelles, les cas de refus de reconnaissance des décisions étrangères. Les conditions résiduelles de reconnaissance opèrent toutes sur un mode casuistique : le rejet des jugements étrangers est résolument conçu pour être exceptionnel. Grâce à cette décision, aujourd'hui, la conformité des décisions aux exigences de l'ordre juridique français peut donc être présumée. [...]
[...] Dans ce cas, l'invocation de la violation d'une loi de police du for semble être un obstacle à la reconnaissance du jugement étranger. Dans un souci d'harmonie internationale, comment doit être reconnue cette décision ? Selon une approche doctrinale ancienne, la condition de régularité du jugement étranger devait être réservée à l'hypothèse de la violation d'une loi de police du for, voire étrangère, lorsqu'il existe des liens suffisamment étroits entre le système juridique dont émane cette loi et le rapport juridique objet de la décision dont l'exequatur est demandé. [...]
[...] Il n'est pas fait mention non plus d'une clause attribuant compétence à celle-ci et la situation litigieuse ne présentait au demeurant aucun lien avec la France. Hors l'hypothèse de la fraude au jugement, non alléguée en l'espèce, ce n'est donc que par l'appréciation des éléments rattachant le litige à la juridiction étrangère que le pourvoi espérait trouver une issue favorable. Or, le lien avec le for américain pouvait paraître ténu puisqu'il était soutenu que ne constituait pas un lien suffisant, la seule signature à Washington, lieu du ressort du tribunal saisi où étaient survenus les faits qui lui étaient reprochés, de la convention entre le défendeur et une société colombienne Indirectement, les juges français étaient amenés à se prononcer sur la question de savoir si le critère du lieu de conclusion du contrat comme critère de rattachement avec la juridiction américaine suffit-il pour en faire un for approprié ? [...]
[...] La mise en œuvre de l'ordre public peut susciter des difficultés propres au droit de l'exequatur, comme le met particulièrement bien en évidence l'arrêt Cornelissen. Le pourvoi n'avait pas invoqué la contrariété à l'ordre public d'un jugement portant condamnation à des indemnités triplées. Même si sa conformité à la conception française de l'ordre public international pourrait être discutée, comme elle le fut en Allemagne avec un arrêt rendu par la Haute Cour allemande (BGH juin 1992), le moyen était inutile : la contrariété à l'ordre public de cette condamnation ne pouvait être critiquée devant la Cour de cassation, car elle suppose un contrôle de l'évaluation du préjudice que celle-ci se refuse d'exercer. [...]
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