Le 2 Août 1998, les armées du Rwanda et de l'Ouganda ont envahi le territoire de la République Démocratique du Congo afin de renverser le gouvernement congolais accusé par ces états de protéger et soutenir des groupes d'insurgés dont certains auraient pris part au génocide du Rwanda qui a débuté en 1994. Un véritable conflit est né entre la RDC et ses deux pays voisins.
Malgré des accords de paix, cette guerre est toujours actuelle et s'est notamment traduite par des massacres de civils, des tortures, des recrutements d'enfants soldats…
C'est dans le cadre de cet épisode tragique que la République Démocratique du Congo a saisi la Cour Internationale de Justice à plusieurs reprises pour dénoncer et faire punir les agissements de l'Ouganda et du Rwanda.
En 2005, dans l'arrêt « Activités armées sur le territoire du Congo (République Démocratique du Congo contre Ouganda) », la Cour Internationale de Justice a condamnée l'Ouganda à réparer son invasion du territoire congolais en violation du droit international et humanitaire.
L'extrait de l'arrêt que nous avons à connaitre est relatif à l'invasion du Rwanda sur le territoire congolais.
En effet, le 28 mai 2002, la RDC a déposé au greffe de la Cour Internationale de Justice une requête introductive d'instance contre le Rwanda en vue d'obtenir la condamnation de cet état pour « violations massives, graves et flagrantes des droits de l'homme et du droit international humanitaire » qui auraient été commises en violation de la Chartre Internationale des Droits de l'Homme.
Le même jour, la RDC a également déposé une demande en indications de mesures conservatoires en se fondant sur l'article 41 du Statut de la Cour selon lequel elle peut, si les circonstances l'exigent indiquer des mesures conservatoires du droit de chacun et qui sont prises à titre provisoire ; et sur les articles 73 et 74 de son règlement intérieur.
Cette demande de mesures conservatoire a fait l'objet d'une ordonnance rendue par la Cour en date du 10 juillet 2002.
Suite à la saisine par la RDC, la Cour a du, comme dans toute affaire qui lui est soumise se prononcer, en vertu des pouvoirs dont elle dispose, sur sa propre compétence pour régler l'affaire.
En effet, avant de statuer sur le fond de l'affaire, la Cour doit dans un premier faire droit aux exceptions préliminaires qui sont soulevées par les parties au différend et qui relèvent des défauts de recevabilité de la demande, empêchant la Cour d'aller au fond de l'affaire.
Dans la demande qui nous intéresse, la RDC avait fait valoir onze moyens soutenant la compétence de la Cour en l'espèce. Le Congo, quant à lui, répondait par la nécessité pour la Cour de ne pas statuer au fond dans la mesure où l'affaire ne relevait pas de sa compétence.
Au terme de l'étude des onze moyens soulevés par la RDC, la Cour a conclu, par cet arrêt du 3 février 2006, par quinze voix contre deux, qu'elle n'avait pas compétence pour connaitre de la requête déposé par la RDC.
L'affaire en cause ne sera donc pas jugée au fond par la Cour mondiale.
L'extrait qui nous est fourni concerne deux des onze moyens soulevés par la RDC : ils sont donc relatifs à des questions de compétence de la Cour.
Dans le premier moyen, la RDC fait valoir à l'appui de la compétence de la Cour, l'application de la théorie du forum prorogatum, c'est-à-dire l'acceptation tacite par le Congo de la compétence de la Cour.
Dans le second moyen, elle repose son argumentation sur l'ordonnance rendue par la Cour le 10 juillet 2002 et en vertu de laquelle, la Cour refuse de rayer l'affaire du rôle. Selon la RDC ce second moyen sous entendrait la reconnaissance par la Cour de sa propre compétence.
La Cour se trouve donc face aux problèmes suivants : quels sont les différends fondements à la juridiction de la Cour et comment peuvent-ils être acceptés comme tels par elle-même?
Aussi, dans quelle mesure la Cour est-elle liée à la conclusion, par l'ordonnance du 10 juillet 2002, du rejet de la demande de rayer l'affaire du rôle?
Ainsi, dans cet arrêt très clair et explicatif, la Cour examine sa compétence en deux temps : tout d'abord, elle étudie l'hypothèse d'un établissement de sa compétence par un acte unilatéral de volonté sur un mode tacite (I) pour ensuite s'attacher au caractère urgent de la requête dont elle avait été saisie en 2002 et déduire, dans cette hypothèse, les règles d'établissement de sa compétence en s'intéressant à l'ordonnance qu'elle a prononcée un peu moins de quatre ans auparavant (II).
[...] Elle précise alors, à l'inverse de ce que prétend la RDC, que ce constat d'absence d'incompétence manifeste ne la lie pas dans la procédure actuelle qui a pour but d'analyser plus scrupuleusement la compétence. L'ordonnance est en effet justifiée par l'urgence et a pour unique but de prononcer des mesures conservatoires. Le constat que la Cour a en l'espèce effectué dans son ordonnance du 10 juillet 2002 lui offre simplement la possibilité de se prononcer ultérieurement et de manière plus approfondie sur la question de sa compétence. C'est d'ailleurs précisément l'objet de la présente affaire avec à l'appui de son analyse des éléments plus précis, plus nombreux et plus probants. [...]
[...] En l'espèce, la RDC avait demandé le 28 mai 2002 que des mesures conservatoires soient prononcées par la Cour en vertu de l'article 41 de son Statut. Cependant, la Cour, se confortant à une jurisprudence établie a subordonné l'indication de mesures conservatoires à son constat d'une compétence prima facie, c'est-à-dire d'une compétence qui de prime abord, à première vue, avec les pièces fournies par le demandeur, peut être établie par la Cour. En l'espèce, la Cour n'a pas relevé de compétence prima facie, au contraire elle souligne plutôt des doutes sérieux quand à sa compétence sans aller néanmoins jusqu'à trouver une incompétence manifeste. [...]
[...] Au terme de l'étude des onze moyens soulevés par la RDC, la Cour a conclu, par cet arrêt du 3 février 2006, par quinze voix contre deux, qu'elle n'avait pas compétence pour connaître de la requête déposée par la RDC. L'affaire en cause ne sera donc pas jugée au fond par la Cour mondiale. L'extrait qui nous est fourni concerne deux des onze moyens soulevés par la RDC : ils sont donc relatifs à des questions de compétence de la Cour. [...]
[...] C'est notamment le cas du Juge Koroma qui, dans son opinion dissidente, considère que le comportement antérieur du Rwanda et le principe de bonne foi aurait du conduire la Cour à reconnaître sa compétence sur le fondement de la théorie du forum prorogatum ce qui lui aurait permis de se prononcer sur le fond de l'affaire. En effet, il estime que la Cour aurait du se fonder, afin de constater un consentement tacite du Rwanda, sur la volonté exprimée par cet état de reconnaître l'importance des traités relatifs au droit de l'homme ainsi que sa volonté que soit mis en place un tribunal international chargé de poursuivre les personnes responsables du génocide rwandais et d'autres violations graves du droit international humanitaire. [...]
[...] Cour Internationale de Justice arrêt du 03 février 2006, Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête 2002) (République Démocratique du Congo contre Rwanda) Le 2 Août 1998, les armées du Rwanda et de l'Ouganda ont envahi le territoire de la République Démocratique du Congo afin de renverser le gouvernement congolais accusé par ces états de protéger et soutenir des groupes d'insurgés dont certains auraient pris part au génocide du Rwanda qui a débuté en 1994. Un véritable conflit est né entre la RDC et ses deux pays voisins. [...]
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