Dans le langage traditionnel la réciprocité se définit comme un échange entre deux parties au cours duquel chacune reçoit la même chose que ce qu'elle donne. Le droit international retient une définition relativement similaire de ce principe de réciprocité, dont la cour administrative d'appel de Versailles fait une application dans son arrêt du 8 octobre 2007.
L'arrêté du 8 février 1999 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'espace économique européen, énonce dans son article 7.1.1 que l'échange des permis se fait sous la condition que l'autre « état procède, de manière réciproque, à l'échange du permis de conduire français ». Il s'agit de ce que l'on appelle en droit international, la clause de réciprocité. Un état n'est complètement lié par une convention internationale à l'égard d'un autre Etat que s'il applique lui aussi la convention.
Au terme de l'article 14 de ce même arrêté, « le ministre chargé des transports établit, après consultation du ministre des Affaires étrangères, la liste des Etats qui accordent aux ressortissants français les avantages ou privilèges analogues à ceux mentionnés aux articles 4 et 7.1.1 ».
Par une décision du 5 mars 2002, le sous-préfet du Raincy, commune de Seine-Saint-Denis a refusé d'échanger le permis de conduire congolais de M Mvuala Zola, contre un permis français. Le sous-préfet justifiait alors son refus par la violation de la part de la République démocratique du Congo de la condition de réciprocité en matière d'échange des permis.
Dans un jugement du 6 octobre 2005 ; le tribunal administratif de Cergy-pontoise a annulé cette décision, au motif que le sous-préfet ne prouvait pas la violation de la condition de réciprocité. Le ministre de l'Intérieur décida alors de faire appel de ce jugement.
[...] De plus dans bien des cas, il existe une autorité juridictionnelle indépendante capable de sanctionner la non-exécution du traité par un Etat. Mais sommes-nous en présence d'une situation où est en cause le principe de réciprocité ? En effet, il n'y a dans cette décision de la cour administrative d'appel de Versailles aucun traité à appliquer. Cependant la situation est la même, l'application de l'arrêté du 8 février 1999 s'inscrit dans les rapports entre la France et un autre pays, en l'espèce la République du Congo. [...]
[...] Mais la condition de réciprocité existe depuis longtemps dans le paysage normatif international. D'abord en tant que coutume, puis par le truchement de la convention de Vienne sur les traités de 1969, en tant que convention internationale. Au terme de l'article 60§1 de la convention une violation substantielle d'un traité bilatéral par l'une des parties autorise l'autre partie à invoquer la violation comme motif pour mettre fin au traité ou suspendre son application en totalité ou en partie Le principe de réciprocité traduit le fait que les Etats qui contractent sont tous égaux en droit, et qu'ils restent des entités indépendantes qui ne sont soumises à des obligations que par leur propre volonté. [...]
[...] La doctrine a toujours condamné cette position du Conseil d'Etat, la qualifiant même de mutilation de la fonction juridictionnelle C'est sans doute pourquoi dans cette décision du 8 octobre 2007, la cour administrative d'appel de Versailles donne une lecture différente de l'évaluation de la question de réciprocité d'un traité. Partie 2 : la nécessité d'un changement dans l'appréciation de la condition de réciprocité Il est en effet essentiel de modifier la lecture de l'article 55 de la constitution, d'abord parce que l'opportunité de la procédure de renvoi préjudiciel au quai d'Orsay n'est plus d'actualité et qu'il existe un autre système garant du droit à un procès équitable : L'incompréhension du maintien de la compétence liée en matière de réciprocité Il convient dans un premier temps de préciser que si cette jurisprudence est peu utilisée, elle n'en demeure pas moins toujours le droit applicable. [...]
[...] Par le truchement de la circulaire du 4 décembre 2000, la ministre de l'intérieur et de l'Aménagement du territoire, en application de l'article 14 de l'arrêté du 8 février 1999, a défini les pays ne remplissant pas la condition de réciprocité. La République du Congo figure parmi ces pays. La cour administrative d'appel de Versailles entérina complètement la circulaire du 4 décembre 2000 et décida d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2005. D'après le juge de cette cour, la condition de réciprocité n'était satisfaite, du seul fait que le ministre de l'Intérieur l'avait décidé dans sa circulaire. [...]
[...] En vertu de la décision de la première chambre civile du 6 mars 1984, Mme Kappy épouse Lisak, le juge judiciaire considère que la condition de réciprocité est remplie, tant que le ministère des Affaires étrangères n'a pas déclaré, de sa propre initiative qu'il n'en était le cas. Mais cette solution sous-entend que le quai d'Orsay ait les moyens de vérifier pour chaque convention si la condition de réciprocité est bien respectée, ce qui est impossible. La cour administrative d'appel de Versailles a choisi de se placer entre la solution du Conseil d'Etat, et de la Cour de cassation. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture