Ordre public international, réparation intégrale, peine privée, ordre juridique français, proportionnalité, droit anglais, common law, dommages-intérêts punitifs, Superior Court of California, article 15 du Code civil, article 74 de la Convention de Vienne, juge américain, décision étrangère, obligations contractuelles, enrichissement sans cause, clause limitative de responsabilité, sanction civile, contrôle de proportionnalité, droit subjectif, article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, gravité de la faute, compétence indirecte, clause spéciale
Les dommages et intérêts punitifs sont nés en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle du fait de l'absence, en common law, de principe général de responsabilité civile et de définition unique des « dommages et intérêts ». S'il ne tranche pas de manière catégorique le débat relatif à l'introduction des dommages-intérêts punitifs en droit interne, l'arrêt de la première chambre civile du 1er décembre 2010 apporte des indications précieuses quant au seuil de tolérance de l'ordre juridique français à l'égard de cette figure juridique venue de l'étranger. En effet, en affirmant avec force qu'une condamnation à des dommages-intérêts punitifs n'est pas, en soi, contraire à la conception française de l'ordre public international, la Cour de cassation sous-entend que le principe de réparation intégrale ne constitue pas nécessairement une valeur intangible ne pouvant souffrir aucune exception. À la genèse de cette décision figure un banal contrat de vente internationale aux termes duquel des époux américains acquièrent un catamaran vendu et fabriqué par une société française établie à La Rochelle. Peu de temps après la livraison du bien, les époux constatent certaines avaries qui leur ont été dissimulées lors de la vente. Ils décident alors d'attraire le fabricant et son représentant devant la Superior Court of California, juridiction de leur domicile.
[...] En effet, sauf à procéder à un découpage artificiel du dispositif de la décision américaine, on serait alors en présence d'un exequatur partiel déductif (et non sélectif) assimilable à une révision au fond du jugement étranger. Afin d'éviter un tel retour au pouvoir de révision, il est donc à espérer que la Cour de cassation exigera que le montant des dommages-intérêts soit manifestement excessif au regard des critères mentionnés pour qu'une contrariété de la décision étrangère à l'ordre public international puisse être caractérisée. [...]
[...] C'est précisément ce que les demandeurs contestaient dans leur pourvoi. L'argument utilisé n'était néanmoins pas des plus convaincants, ce qui explique sans doute que la Cour de cassation n'y ait pas explicitement répondu. Le pourvoi faisait valoir que cette convention n'était pas applicable en l'espèce, s'agissant de la vente d'un bateau acheté pour un usage personnel. Or, si cette inapplication était certaine, elle n'empêchait pas pour autant les juges du fond de prendre la Convention en considération pour rechercher le contenu de l'ordre public international français. [...]
[...] L'institution des dommages-intérêts punitifs tolérée par l'ordre public international L'analyse de ces deux principes laisse apparaître qu'une telle qualité ne peut leur être reconnue. En effet, d'une part, le principe de réparation intégrale n'a qu'une valeur relative en droit français D'autre part, le principe de prohibition de l'enrichissement sans cause ne peut s'opposer à la réception en France de l'institution étrangère étant donné que d'autres peines privées, voisines des dommages-intérêts punitifs, y sont consacrées La valeur relative du principe de réparation intégrale Que ce soit en matière délictuelle ou comme en l'espèce contractuelle, c'est à plusieurs reprises que la Cour de cassation a affirmé le principe de réparation intégrale dans le cadre de rapports juridiques internes. [...]
[...] Apprécier la gravité de la faute et le préjudice selon les principes d'évaluation de l'ordre juridique de la loi normalement applicable reviendrait indirectement à réinstaurer un contrôle de la compétence législative pourtant abandonné depuis l'arrêt du 20 février 2007. Par ailleurs, s'agissant de contrôler la conformité à l'ordre public international français, c'est en principe au regard des seuls concepts du for que la compatibilité de la décision étrangère doit être appréciée. Pour autant, évaluer la gravité du comportement et l'étendue du préjudice selon les concepts français, afin de déterminer la proportionnalité des dommages-intérêts punitifs, ne constitue pas non plus une solution idéale. [...]
[...] Par un arrêt du 22 juin 2005, les juges du second degré confirment le refus d'exequatur de la décision américaine. Ils estiment en effet qu'en vertu de l'article 15 du Code civil, la société française était en droit d'exiger d'être jugée par un tribunal français. Très logiquement, la Cour de cassation, réaffirmant le caractère non exclusif du privilège de juridiction de l'article 15 du Code civil, casse la décision des juges du fond et renvoie l'affaire devant la Cour d'appel de Poitiers autrement composée. [...]
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