L'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 16 mars 2010 est, en matière de lois de police, d'une grande importance. En effet, selon Dominique Bureau et Louis d'Avout, « cette décision mérite [...] une attention toute particulière en ce qu'elle marque d'une éclaircie la période récente, laquelle ne brillait précisément pas par la clarté quant au régime des règles impératives pouvant assujettir les contractants ayant noué des liens par-delà les frontières ».
En l'espèce, une société (Viol frères) avait vendu de la viande congelée et avait confié le transport de cette marchandise de la France au Ghana à une autre société (Philippe Faudever et Compagnie). Or l'état du Ghana avait décrété un embargo sur les viandes bovines françaises. Ainsi la société Faudever s'est vue dans l'obligation de ramener la viande au propriétaire.
La société Viol a donc assigné la société de transport en indemnisation de son préjudice.
[...] Il faut donc émettre des réserves quant à l'application de ces lois d'embargo étrangères, car il sera compliqué de leur donner effet. On assiste donc à une espèce de retour en arrière puisque la Convention de Rome de 1980 était plus souple quant à l'application des lois de police étrangères et donc des lois d'embargo étrangères. [...]
[...] En effet, la mission du juge sera de trancher le litige et d'appliquer la solution que la loi de police donne. Une autre série d'observations doit cependant être faite. Tout d'abord, la cour exige que la loi soit effectivement invoquée par le justiciable devant elle, elle ne peut être relevée d'office par le juge. En l'espèce, la question reposait au départ sur le caractère illicite de la cause du contrat et non pas sur la question de l'applicabilité de la loi d'embargo. [...]
[...] Cette condition, avec le règlement Rome I est devenue indispensable à la validité de l'application d'une loi de police étrangère, même si le juge dispose d'un pouvoir discrétionnaire d'appréciation quant à leur mise en application au regard du critère de comptabilité des lois de police étrangères avec les valeurs essentielles internes du for (Aurore Marchand). Ainsi, le juge n'appliquera pas une loi de police étrangère étant en incompatibilité totale avec les valeurs du for. L'impact de ce caractère strict sur l'application des lois d'embargo étrangères est important. En effet, il faudra exclure toutes les lois ayant pour critère de rattachement, un critère autre que la territorialité. Ainsi, le choix du juge compétent pourra permettre aux parties de s'affranchir des lois de polices gênantes pour elles. (Mankowski). [...]
[...] Ainsi, le juge français du contrat a la possibilité d'appliquer les lois d'embargo étrangères en vertu de leur qualification de loi de police par la cour de cassation. Mais, cette décision a été prise par la cour alors que le règlement Rome I relatif aux obligations contractuelles n'était pas encore entré en vigueur. Il faut dès lors s'interroger sur la place qu'auront ces lois étrangères d'embargo sous l'empire du règlement Rome I II- Le règlement Rome I ou la limitation de la reconnaissance d'impérativité des lois étrangères d'embargo Le règlement Rome I est entré en vigueur en 2008. [...]
[...] La place des lois d'embargo étrangères dans le cadre des contrats internationaux C'est au regard de l'article 7 paragraphe 1 que la cour de cassation donne effet à la loi d'embargo unilatérale ghanéenne le caractère de loi de police. Mais cela ne permet pas vraiment de savoir le sens que l'ont doit donner à ces lois. Selon Cyril Nourissat: la décision permet d'offrir une illustration potentielle de la loi de police étrangère. Or la chambre commerciale donne une solution partielle : il appartient aux juges du fond de considérer, au regard de la Convention de Rome, l'effet pouvant être donné à la loi d'embargo ghanéenne. [...]
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