Révélée « au cours de la seconde moitié du XIXe siècle devant les tribunaux de différents pays », « la question du renvoi n'avait pas été aperçue par les premiers théoriciens de la règle de conflit ». Pourtant, le renvoi figure aujourd'hui parmi les plus grandes controverses qui ont animé et animent encore le droit international français. Sur ce sujet, les questions débattues sont de natures différentes : les auteurs se sont interrogés tant sur les fondements de cette institution, que sur ces modalités d'application ou encore son bien fondé.
L'arrêt De Marchi, du 7 mars 1938, de la chambre civile de la Cour de cassation, a alimenté ces débats. Dans le cas présent, il s'agissait d'un citoyen argentin – dont le nom a été associé à l'arrêt – qui, après avoir vécu sur le territoire français, y est mort. Dès lors, se posait la question de sa succession mobilière, à laquelle plusieurs personnes prétendaient. D'où la saisine d'une juridiction, qui devait permettre de déterminer « l'ordre de préférence entre successibles ». La Cour d'appel avait alors estimé que cette difficulté devait être réglée, selon la loi nationale de la personne décédée, le de cujus, à savoir la loi argentine. Plus précisément, il s'agit de l'article 3283 du code argentin, qui prévoit la compétence de la loi du domicile. Or, il se trouve que le de cujus a vécu principalement en France. Malgré cela, les juges français ont refusé le renvoi du droit argentin à la loi française, car l'intéressé n'avait pas « acquis en France un domicile régulier ». Suite à cette décision, un pourvoi fut formé. Il reprochait aux juges du fond d'avoir effectué une mauvaise application de ce texte, en ce qu'ils auraient « méconnu la compétence de la loi successorale du domicile du défunt », conformément aux dispositions de l'article 3283 du code argentin. En d'autres termes, les demandeurs au pourvoi auraient souhaité que soit pris en compte le domicile français du de cujus. Il aurait donc été question d'une hypothèse de renvoi au 1er degré.
La Cour de cassation est ainsi confrontée à deux difficultés. D'une part, elle doit déterminer les modalités d'interprétation de la loi étrangère. En fait, elle doit se demander si l'interprétation d'une loi étrangère, en cas de renvoi du droit international français à celle-ci, doit se faire selon les conceptions du for. Puis, elle doit se pencher sur son éventuel contrôle a posteriori de cette interprétation. D'autre part, la Haute juridiction doit prendre en compte le problème du renvoi. Doit-elle admettre la possibilité qu'en l'espèce, le droit argentin renvoie à une loi tierce, étant donné que la loi française ne peut se reconnaitre compétence ? En d'autres termes, un renvoi au second degré peut-il être valable ?
[...] C'est en cela que l'interprétation de la loi étrangère constitue une question de fait. Certes cette conception présente l'inconvénient majeur de soumettre le justiciable à des interprétations différentes, selon le tribunal saisi, cependant, pour pallier à cette lacune, la Cour de cassation a admis la recevabilité des pourvois pour dénaturation de la loi étrangère. Bernard AUDIT, Droit international privé, édition Economica Yvon LOUSSOUARN, Pierre BOUREL, Pascal de VAREILLES-SOMMIERES, Droit international privé, Précis Dalloz, 8ème édition Thierry Vignal, Droit international privé, édition Armand Colin Francescakis, La théorie du renvoi et les conflits de systèmes en droit international privé, Paris GADIP Le 7 novembre 1933, la chambre des requêtes, a admis, dans l'arrêt Forgo, la possibilité du renvoi au premier degré, à propos des successions mobilières. [...]
[...] Effectivement, la Cour de cassation se doit de combler les lacunes du droit français , en interprétant par exemple, ses textes. Il ne s'agit en aucun cas de donner son interprétation des droits étrangers. Si elle le faisait, la Cour s'arrogerait des prérogatives qui n'appartiennent qu'aux juges des Etats étrangers. Elle ne peut prendre le risque de conférer un sens précis à un texte issu d'un pays étranger, alors que cette interprétation pourrait être au total porté à faux avec le législateur étranger. [...]
[...] En d'autres termes, les demandeurs au pourvoi auraient souhaité que soit pris en compte le domicile français du de cujus. Il aurait donc été question d'une hypothèse de renvoi au 1er degré. La Cour de cassation est ainsi confrontée à deux difficultés. D'une part, elle doit déterminer les modalités d'interprétation de la loi étrangère. En fait, elle doit se demander si l'interprétation d'une loi étrangère, en cas de renvoi du droit international français à celle-ci, doit se faire selon les conceptions du for. Puis, elle doit se pencher sur son éventuel contrôle a posteriori de cette interprétation. [...]
[...] Or, c'est là que le bats blesse Effectivement, les juges français, en déclarant la loi argentine compétente, brisent la chaîne de renvois de loi, précédemment décrite. Ils font s'arrêter ce processus avant le renvoi à la loi française, de sorte que le renvoi n'a plus lieu d'être, en l'espèce. La règle de conflit française s'est bornée à déclarer le droit argentin compétent, qui sera tenu d'accepter celle-ci. En cas de refus du droit argentin, le conflit serait insoluble, et le problème de l'ordre de préférence entre les successibles dans une impasse. [...]
[...] En premier lieu, elle a mis en exergue le caractère en principe obligatoire du renvoi De facto, elle manifeste sa volonté de régler le conflit, sur le terrain du renvoi. L'on ne peut alors discuter la présence, en l'espèce, du renvoi. Pour la Cour, il ne fait aucun doute que le renvoi est le sujet majeur de cet arrêt, balayant ainsi toutes les critiques et contestations que les auteurs ont pu apporter. L'expression du caractère en principe obligatoire du renvoi peut susciter une interrogation. [...]
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