Le rôle central de l'affaire Tadic dans l'évolution du droit international contemporain s'explique tout d'abord par le fait qu'il s'agit de la première affaire du TPIY, mais surtout que la décision de la Chambre d'appel du 2 octobre 1995 a notamment permis aux juges d'éclaircir certains points clés du droit international concernant les compétences des organisations internationales.
Cette décision porte le nom de l'accusé Dusko Tadic, ancien dirigeant du parti démocrate serbe d'une ville de l'actuelle Bosnie et ancien membre des forces paramilitaires. Dusko Tadic était accusé d'avoir participé aux agressions, viols, arrestations, meurtres et mauvais traitements de Musulmans et Croates bosniaques à partir de fin mai 1992 en Bosnie-Herzégovine. Arrêté en 1994 en Allemagne, le TPIY a obtenu de l'Allemagne en 1995 un accord de dessaisissement en faveur du TPIY afin qu'il y soit transféré pour être jugé. Tadic a été inculpé pour 34 crimes relevant de la compétence du TPIY, sur le fondement de sa responsabilité pénale individuelle (article 7 du Statut du TPIY) pour des chefs d'accusation de crimes contre l'humanité, de violations des lois ou coutumes de la guerre et d'infractions graves aux conventions de Genève de 1949.
En juin 1995, la défense a soulevé l'exception préjudicielle d'incompétence du TPIY en invoquant la création illégale du TPIY et l'exercice abusif de la primauté du TPIY sur les juridictions nationales. Le 10 août 1995, la chambre de première instance a refusé de statuer sur le premier moyen et rejeté le deuxième. La défense a alors interjeté un appel devant la Chambre d'appel le 14 août 1995 qui a été rejeté le 2 octobre 1995. Cependant les juges ont pu se prononcer sur les questions de savoir si la création d'un tribunal international relève ou non de la compétence du Conseil de sécurité de l'ONU et si ce tribunal a la compétence pour juger de la légalité de sa propre création. La Chambre d'appel dans son arrêt du 2 octobre 1995 va contredire la chambre de première instance en se reconnaissant compétente pour juger de la légalité de sa création par le Conseil de sécurité de l'ONU.
[...] Ainsi le maintient de la paix ou le rétablissement de cette dernière peut très bien passer par la création d'un tribunal pénal international, solution tout à fait envisageable du point de vue du droit. En effet, le chapitre VII de la charte des Nations Unies n'interdit en rien le recours à une telle création puisqu'au contraire il laisse libre le Conseil de Sécurité de choisir ses moyens d'action, s'ils sont bien évidemment en accord non seulement avec les missions qui lui sont confiées mais aussi celles plus globales de l'ONU, de laquelle il reste un organe subsidiaire. [...]
[...] En effet, le juge international explique que les compétences implicites sont fondamentalement des compétences impliquées par celles inscrites dans le statut du TPIY. Elles sont donc en lien de continuité et étendent le spectre des compétences abstraites prévues par l'acte constitutif, vers des compétences liées le plus souvent aux domaines de fond. Dès lors, la théorie des compétences implicites permet notamment aux organisations internationales de se déclarer compétentes pour interpréter des chartes constitutives des organisations internationales. Il faut aussi noter que l'intention du Conseil de sécurité de l'ONU était de créer non pas un simple organe subsidiaire mais un tribunal. [...]
[...] Cependant, l'expérience a pu montrer que la simple attribution expresse des compétences contenues dans le traité constitutif de l'organisation internationale ne permettait pas l'accomplissant de manière convenable des missions qui lui étaient confiées. Dès lors est apparue la théorie des compétences implicites. B. L'utilisation de la théorie des compétences implicites A l'origine, la théorie des compétences implicites est issue de la jurisprudence de la cour suprême des États unis. En effet, dans son arrêt Mac Culloc contre Maryland de 1819, cette juridiction a reconnu à l'État fédéral le droit d'adopter des actes qui n'étaient pas expressément autorisés par la constitution fédérale. [...]
[...] L'importance du statut fondateur dans la détermination des compétences La création d'une organisation internationale, et donc par suite la détermination de ses compétences, est soumise aux règles relatives à la conclusion des traités, mais aussi aux droits et obligations des États parties inscrits dans la Convention de Vienne de 1986, notamment à travers son article 5. Soumis à des appellations diversifiées (pactes, charte, statut) il présente cependant des règles propres à son organisation. Ainsi, en utilisant l'outil de formation conventionnelle du droit international, les États parties à ce traité (aussi appelés États fondateurs) expriment leur consentement à l'apparition d'une nouvelle personne juridique, susceptible d'avoir des incidences sur l'exercice de leurs compétences propres. [...]
[...] Or l'article 39 de la Charte des Nations Unies stipule que le Conseil de Sécurité des Nations Unies est compétent en matière de maintien ou de rétablissement de la paix mais aussi en matière de sécurité internationale. Dès lors, il convient de dire que du fait que la définition du champ d'action de cette organisation soit particulièrement large, il en résulte que le conseil de sécurité possède un pouvoir d'appréciation très large ou discrétionnaire. Cependant, en précisant même largement les contours, il ne s'agit pas d'un pouvoir illimité. Par conséquent, le Conseil de sécurité est soumis au respect des missions explicites qui lui ont été clairement conférées. [...]
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